Le Taj Mahal
Il est 5h du matin. Après une courte nuit dans ls bruits d'une fête à Agra et dans la chaleur étouffante qui monte, nous avons rendez-vous avec le lever du soleil sur le Taj Mahal. En calèche, nous débarquons en suivant une promenade de pierres dallées qui longe un parc et après un contrôle, passons le portique de sécurité gardé par l’armée avec une sourde impatience au fond de nous. Le Taj Mahal, ce mythique lieu dont même le nom est magique s’offre à nous, enfin.
Derrière un immense sas d’entrée, une coupole se dessine. Le rêve fou d’un amour sans fin découpe l’horizon.
Shâh Jahan, 5ème empereur de la dynastie des Moghols, tomba follement amoureux de la belle Bânu Begam. Il l’épousa pour en faire la reine du plus grand des empires de l’époque. Un royaume qui s’étendait de l’Afghanistan au Bengale dont il était le maître éclairé, défenseur des arts et des religions, conquérant redoutable et bâtisseur de génie.
Elle lui offrit 13 enfants et mourut à 39 ans pendant la naissance du 14ème, le 17 juin 1631.
Fou de douleur, il décida de lui ériger un mausolée à la dimension de leur passion.
Il fallut 22 ans pour le construire, 20 000 ouvriers et 1000 éléphants. Des sommes colossales pour construire la sépulture dont il savait qu’un jour, elle réunirait leur amour.
Pendant les 6 dernières années de son existence, son fils le déposséda de sa charge, tua ses frères et l’enferma dans une prison dorée, le Fort Rouge. Chaque matin, il pouvait contempler son oeuvre et s’y rendre de temps en temps pour s’y recueillir par un passage secret sous bonne garde.
La vision de ce dôme gigantesque de marbre blanc, de ces piliers incrustés de versets coraniques, de ses 4 tours qui s’élèvent dans le ciel, des bâtiments ocres qui ceinturent l’espace et du fleuve Yamuna qui serpente en le longeant, la perfection des jardins et des plans d’eau, ne peut que nous couper le souffle et nous laisser un vide au fond du coeur.
La perfection des incrustations dans le marbre et les pierres précieuses serties, l’incroyable modernité de ce mausolée échappe au temps et nous serre la gorge, comme si derrière cette beauté, l’angoisse ne pouvait que naître de sa perfection.
Il est étrange d’ailleurs, de partager cette magnificence avec des milliers de gens de races et de couleurs diverses, d’âges différents, hommes femmes, tous pétrifiés de cette langueur qu’une rencontre avec la forme ultime d’un art peut provoquer.
Quelque soit la religion, ou l’absence de religion, il y a du divin dans cette offrande éternelle. Leur deux corps réunis ont fusionné avec l’intemporel, et c’est bien ce que ressentent ceux qui ont eu le privilège de voir les premiers rayons de soleil d’un matin de mars caresser le marbre immaculé d’un rêve impossible.
Changement d’univers sur ce quai de la gare d’Agra où des milliers de passagers attendent un train de nuit en retard. Dans un désordre indescriptible et les hurlements d’une sono assourdissante, des gens dorment par terre, grignotent en faisant passer le temps d’un retard de plus de 2 heures... qui se transformeront par la suite, en une longue reptation vers Vanarasi, la ville sacrée. Arrivés à 19 heures dans la gare d’Agra, nous nous extrairons de la cohue du train à 15 heures à Vanarasi...avec une nouvelle impatience au coeur de notre fatigue. Bénares, Vanarasi , la ville de tous les mystères !