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Le grenier de la mémoire 17 : La Palestre e(s)t le Titanic !

Publié le par Bernard Oheix

"-Mon pti't gars, t'es vraiment trop payé et tu bosses pas assez" éructa Pierre Bachelet, pas le chanteur, l'autre, le Député Maire du Cannet, d'une voix rauque et graveleuse...

C'est le genre d'agressions que j'encaissais quotidiennement en me retenant au maximum de réagir, sur les conseils de Ressources et Valorisation qui me soutenait en me demandait de leur laisser le temps de dénouer la crise. Gérard Mathieu un jeune cadre intelligent de RV avec qui je m'entendais bien me poussait à m'accrocher en me prodiguant ses conseils. Il suivait mon dossier en subissant par ailleurs le caractère  imprévisible de cet atrabilaire convulsif... Comment la France des années 90 pouvait-elle encore donner du pouvoir à cette caricature d'un tyran petit bras, petit d'intelligence ? Comment pouvait-on voter pour un tel pantin ? La Démocratie décrit parfois des méandres surprenants !

A partir de Décembre 91 (on n'en était qu'à 3 mois de présence !), la tension monta à son zénith en une guerre de tranchées permanente. Refus de signer les factures pendant 15 jours d'affilée, refus  de me donner une signature sur un compte courant (je n'étais que le Directeur après tout !), refus d'accepter ma nomination comme conseiller (bénévole) à l'ADEM des Alpes Maritimes, refus de me laisser organiser la future inauguration en choisissant un intervenant extérieur grassement rétribué, refus de me laisser programmer sans son aval, (par exemple Guy Bedos et Noah non acceptés !)...

Mais c'est début janvier, au moment de l'arrivée de mon adjointe Sophie Dupont que tout c'est emballé ! Outre que le secrétaire-général de la Mairie la convoque sans m'en informer pour lui annoncer "-Qu'il y a un problème entre le Président (Le Maire) et le Directeur (moi)" et qu'il remette en cause son salaire en le rognant de 2000f alors qu'il avait été accepté en commission et par RV... Lequel secrétaire-général, véritable carpette, continuait à me présenter comme le secrétaire de La Palestre et non comme son directeur... me conseillant de ne pas irriter le Maire "-Car après, c'est tout le monde qui trinque...".

Ce qui mit le feu au poudre, c'est la réussite d'une négociation que je menais depuis plus d'un mois avec GSF. Ma mission consistait de trouver les moyens de faire tourner La Palestre sans argent public, que la Ville ne donnerait qu'une subvention minimum et qu'il fallait que je me débrouille pour trouver les financements de mon développement... C'était un challenge, et il était plutôt exaltant !

C'est à ce titre que j'obtins un accord de partenariat portant sur 3 ans de 500 000F (la 3ème tranche résiliable suivant la réussite des programmations et l'activité des 2 précédentes). En échange, une concession du marché nettoyage de 4 ans appuyée par un devis joint, le titre de sponsor officiel et une loge permanente. Un excellent deal qui me permettait enfin de construire une programmation et de m'orienter vers le démarchage de congrès.

Las ! Quand Pierre Bachelet apprit cette nouvelle, il devint fou furieux ! Il avait négocié en direct et sans m'en avertir avec une autre société et quand je lui rétorquais que la-dite entreprise avait été, comme les autres, sollicitée mais ne voulait pas d'un partenariat, il me répondit que je n'avais pas à me mêler de "ses" affaires en jetant le dossier par terre ! Cas classique d'un argent occulte qui allait atterrir sur un compte secret, bien à l'abri, et qui à défaut de permettre le développement de La Palestre, servirait à améliorer le quotidien de ses vieux jours !

Dans la foulée je reçus deux lettres :

Le grenier de la mémoire 17 : La Palestre e(s)t le Titanic !
A la réception de ces deux lettres, j'ai compris que ma mission au Cannet s'achevait et qu'il ne me restait plus qu'à démissionner avec, en plus, la culpabilité d'avoir entraîné Sophie Dupont dans cette galère !

A la réception de ces deux lettres, j'ai compris que ma mission au Cannet s'achevait et qu'il ne me restait plus qu'à démissionner avec, en plus, la culpabilité d'avoir entraîné Sophie Dupont dans cette galère !

Il y a parfois, dans la vie, des moments incroyables ! Le jour même où je comprenais que l'aventure Palestre s'achevait, je reçus un coup de fil de Françoise Léadouze, mon ancienne Adjointe à la Culture de Cannes, celle avec qui j'avais vraiment partagé un projet culturel ambitieux, avec qui je m'entendais à merveille et qui m'avait gardé son amitié en comprenant les raisons de mon départ : "-Bernard, les festivals se cassent la gueule, Pierre Jean n'est pas capable de gérer votre équipe, j'ai besoin de vous, est-ce que vous êtes d'accord pour revenir à Cannes ?".

Je jure que c'est vrai !

Et instantanément, sans réfléchir, je répondis :"-Françoise, je rêve de retravailler avec vous. C'est une catastrophe ici, un désastre, mais j'y mets 2 conditions : la première c'est que je revienne avec Sophie, je ne peux pas la laisser dans ce merdier, et la 2ème, c'est Mouillot qui ne m'a pas donné le poste et je veux être certain qu'il souhaite mon retour, dites-lui de me téléphoner pour me demander de revenir..."

Silence au bout du fil... "-Ok, Bernard, je transmets le message !".

Et là, en raccrochant, j'ai vu mon monde s'écrouler. J'imaginais le pire, je me mordais les lèvres de ne pas avoir accepté tout de suite la proposition, je me maudissais de mon inconscience, de cette fierté qui m'avait amené à exiger ce que je craignais impossible : demander à un maire comme Michel Mouillot de se dédire et de s'abaisser à me quémander de revenir ! J'étais fou... et surtout d'angoisse.

Les deux jours qui suivirent furent les plus longs, les plus interminables de toute mon existence ! Je n'ai pas beaucoup dormi. Et puis une sonnerie, et la voix chaude et chaleureuse de Michel Mouillot au bout du fil me disant "- Allez, Oheix, arrêtez vos conneries, la-haut ! Revenez à Cannes, on a besoin de vous ici. Je vous attends à mon bureau demain à 16h !"

Je crois que jamais de ma vie, je n'ai ressenti avec autant de violence, une bouffée d'adrénaline m'envahir comme en ce jour, en ce moment précis, en raccrochant un combiné qui venait de me délivrer de l'enfer dans lequel j'étais prisonnier !

Et c'est le sourire aux lèvres que j'ai pondu dans la foulée la lettre qui suit :

Je vous assure que la jubilation d'écrire cette lettre peut s'assimiler à un orgasme absolu !

Je vous assure que la jubilation d'écrire cette lettre peut s'assimiler à un orgasme absolu !

Le lendemain, un Michel Mouillot goguenard m'accueillit dans son bureau de la Mairie. Il m'annonça qu'il avait décidé de garder Pierre Jean à la Direction de l'Événementiel Fêtes de la SEMEC mais qu'il créait un Évènementiel Culturel dont je serai le Directeur au sein du Palais des Festivals !

Et c'est ainsi que, en refusant d'être un "animateur" sous les ordres de Pierre Jean, 6 mois après, je me retrouvais au poste que je voulais au départ, en ayant au passage, plus que doublé mon salaire !

PS : merci encore, après tant d'années, à Françoise Léadouze de m'avoir sauvé des affres de l'inconnu !

PPS : merci à Michel Mouillot d'avoir pris le Téléphone pour m'appeler !

PPPS : merci à Pierre Jean de n'avoir su prendre en main mon équipe et d'avoir échoué dans sa mission initiale !

PPPPS : merci aussi à Sophie Dupont qui m'a suivit dans cette aventure et ne m'a jamais lâché dans l'adversité !

Et pour la petite histoire, quand je me suis pointé au Palais des Festivals, la Directrice Générale de l'époque, Marie Pierre Colas, en me faisant signer mon contrat de travail, me déclara : "-Alors vous êtes ici parce que vous avez eu la tête de Pierre Jean, mais avec moi cela ne se passera pas comme ça, vous avez intérêt à marcher droit !". Bon, vu le personnage et ce que j'avais traversé, cela ne m'a pas inquiété outre mesure mais bonjour l'ambiance !

Quand à l'aboutissement de mon passage éphémère à La Palestre, ce n'est que quelques années après qu'il se conclut par la réception  d'un coup de fil à mon bureau du Palais des Festivals :

- Bonjour Monsieur, vous êtes Bernard Oheix, l'ancien Directeur de La Palestre...

-Moi-même...

-Ici la brigade financière de Nice. On aurait besoin de vous parler.

-A quel sujet ?

-Disons que l'on voudrait éclairer certains aspects de votre passage à la Soducan. Alors, si vous le souhaitez, on peut le faire discrètement, vous venez à la Caserne Auvare sur Nice pour une discussion amicale, sinon, on sera obligé d'employer des moyens, disons, plus officiels... Et au passage, amenez tous les documents que vous jugez indispensables pour justifier de vos missions et votre action pendant vos 6 mois de Direction...

Je me suis donc rendu à la Caserne Auvare avec une certaine angoisse, ce n'est pas tous les jours que l'on est convoqué par une brigade financière ! Mais j'avais tout conservé (pour preuve les documents présentés précédents !) et après 3 heures à donner un éclairage sur ma fonction, mes missions, les rendez-vous et les projets, ils m'ont libéré très cordialement et j'ai clôturé définitivement ce dossier... jusqu'à aujourd'hui où les conditions d'un confinement m'amène à dévoiler le dessous des cartes !

Quand à La Palestre, elle a vivoté quelques temps avant de sombrer dans un relatif anonymat. Elle n'est pas devenue cette salle incontournable de la Côte d'Azur ! Et le chantier de mes 40 ans, ce challenge d'une vie, il est mort-né, dans les éructations d'un cacochyme Pierre Bachelet que j'aurai par la suite, le plaisir d'inviter le 18 novembre 2000 au Palais des Festivals pour chanter "Au nord, y avait les corons".... Euh, pardon. Là, c'est le vrai Bachelet, l'artiste, qui chanta sur la scène ce soir là, pas le bateleur de foire qui m'avait pourri la vie pendant 5 mois et 28 jours sur les hauteurs du Cannet ! 

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P
Tu es un aventurier !!!<br /> <br /> GC
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B
Aventurier petit bras... mais un grand coeur ? Salut à toi mon ami ! J'espère que tout va bien et que tu es prêt le 11 mai prendre la mer pour aller à l'abordage du vieux monde ! Je crois que l'on aura pas mal de travail !
P
TU ES UN AVENTURIER !<br /> <br /> GC
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