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Le grenier de la mémoire 18 : Christophe !

Publié le par Bernard Oheix

L'actualité en écho de mon passé ! Christophe, s'en est allé accompagné de ses mots bleus pour retrouver les Bevilacqua et goûter un repos bien mérité. Il a illuminé ma jeunesse avec des bouts de ficelle et du papier, et le dandy qui restait si beau dans la vieillesse s'est figé pour l'immortalité même si je cris son nom !

J'ai aimé Christophe, non comme un fan transis, mais comme une voix qui me répondait en provoquant de mystérieuses émotions, des élans d'un coeur passionné, des bouffées de rêves d'un monde d'harmonie.

Et aujourd'hui, qu'il nous quitte, sa mort nous rend plus humble en cette heure où les disparus se comptent par dizaine de milliers, où nos repères se fondent dans le flou d'un avenir incertain.

Le grenier de la mémoire 18 : Christophe !

J'ai eu le privilège de croiser son chemin, de le programmer en deux occasions, de le voir plusieurs fois en concert, mais aussi et surtout, d'échanger des bribes de mots et des regards furtifs, de sentir sa présence chaude et chaleureuse. Il faisait partie de ces artistes qui, à priori, semblent inaccessibles et hors de portée, distants et froids, et qui, pourtant, à l'épreuve de la réalité, sont humains, de proximité, dans l'empathie réelle d'un instant de partage !

Je peux en témoigner, parce qu'il a fait partie, si brièvement certes, mais si concrètement, de ceux que j'ai côtoyés et qui se sont retrouvés dans une plaquette, sur une scène et devant un public venu pour l'aimer dans une salle dont j'étais le directeur.

Il a traversé tous les âges, de la midinette au jeune branché électro, de la mère de famille à l'esthète cultivé, réussissant l'exploit, malgré quelques éclipses, de toujours renaître de ses cendres pour coller à cette époque qu'il interprétait si génialement par des notes de musique ! Curieux de tout, il savait tendre la main à des jeunes (n'est-ce pas Mathilde Cabezas ?), porter un regard profond, s'entourer de grands paroliers, aller jusqu'au bout d'une note de musique même si sa voix avait perdu un peu de sa superbe avec l'âge !

Petite anecdote : il existait, à côté de chez moi, à La Bocca, un restaurant de pâtes, familial, où l'on se retrouvait entre amis autour de Marie di Giuglio et de Sandro. Un couple devint de ses amis de rencontre que l'on prenait plaisir à revoir autour d'une "pasta à la Norma" succulente. Souvent leur fille les accompagnait, une Aline d'une trentaine d'années, et l'intimité aidant, ils nous avouèrent qu'ils l'avaient baptisée ainsi à cause de Christophe et de cette Aline qu'il cherchait partout en criant.

Or, le jeudi 23 septembre 2010, dans le cadre des Concerts de Septembre qui lançaient ma saison, j'eus le plaisir de le présenter dans un double programme avec Jean Louis Murat. Ils réservèrent leur place dès l'ouverture de la billetterie, ne ratant jamais un de ses concerts... ils devaient en être à plus d'une vingtaine !

C'est avec leur fille que j'avais tout combiné. J'en avais parlé avec Christophe en allant le saluer et il avait souri en donnant son accord. A la fin du concert, sa fille prétextant de me voir, accompagnée d'un gardien dûment averti, les emmena dans le couloir des loges. Ils ne se doutaient de rien, même à ce moment, tant leur "Christophe" était un mythe inabordable ! 

Et quand Aline me fit chercher, j'ouvris en grand les portes de la loge de Christophe. Il les accueillit d'un large sourire, faisant la bise à "son" Aline, avant de saluer la mère et le père tétanisés. Depuis ces décennies à le suivre, il ne l'avait jamais rencontré de visu et je devins à jamais un Père Noël pour eux.

Je repense souvent à ce qu'ils ont ressenti, à la violence d'être devant son idole, lui serrer la main, oser lui dire deux mots, moi qui en avais tant approché de ces êtres de légende qui peuplent notre histoire. Le père n'en a pas dormi de toute la nuit, d'après Aline, et de ce jour, à chaque fois que nous nous retrouvions à la Pasta, il y allait de sa petite larme et d'une tournée à la santé de "son" Christophe !

Et je dois dire que mon estomac fragile n'a jamais regretté cette bonne action !

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