Pérégrinations et protocole
Après un mois d'absence, j'ai intérêt à me faire pardonner. Je vous offre un peu de ma vie en gage de réconciliation, non qu'elle soit d'une richesse folle.... Quoique ! Quelqu'un qui pose avec Monsieur Bouquet pour l'éternité et serre les mains de Jacques Chirac et du Prince Albert de Monaco...en une semaine, ne peut être totalement inutile sur cette terre de passion !
Voici un petit voyage au coeur d'un monde en train de s'évanouir.
Tout à commencé le 2 février avec Carmen, (quelle entame pour quelqu'un qui a aimé une belle espagnole aux yeux de braise !) dans un grand audit du Palais complet. Bizet, belle distribution, beaux décors, belles voix, très belle recette ! Mais c'est avec Goran Brégovic, le 3 février, que tout a continué. Imaginez... 20 choristes, un orchestre symphonique, les voix bulgares, une fanfare... et devant, un percussionniste et Goran, ex-rock star, créateur de musiques de films géniales et leader de cette formation qui va faire chavirer le Palais des Festivals rempli de plus de 2000 personnes. J'en rêvais, il l'a fait. Avec douceur et gentillesse, élégance et noblesse. La musique est un melting-pot incroyable, entre la fanfare, la messe grégorienne, les volutes classiques, les voix cristallines, les accords de rock et reprises de morceaux à la sauce Brégovienne. Ambassadeur de la paix, Goran Brégovic se situe dans le camp de ceux qui fuient les horreurs de la guerre fratricide qui a déchiré en lambeaux son pays. Vive le barde brégovic !
Une semaine à Paris et sur les routes de France !
Du théâtre bien sûr. Post-it, petite pièce sans saveur sur les émois de 3 jeunes femmes... La danse de l'albatros où Martin Lamothe s'échoue sur la grève de l'humour, ses ailes de nain incapables de dominer un texte insipide. Reste l'événement. Michel Bouquet est l'avare. Plus personne ne pourra interpréter ce rôle sans faire référence à sa voix criarde, à ses mouvements compulsifs, à la perversité de ses yeux fureteurs. Il est génial, sublime, émouvant et désespérant. C'est Monsieur Bouquet, au crépuscule flamboyant de sa carrière. Merci monsieur Bouquet de nous rappeler que le théâtre peut aussi rendre merveilleux le monde qui nous entoure.
Après la représentation, Il m'accueille dans sa loge et nous parlons de ses passages à Cannes (j'avais eu l'honneur de le recevoir avec Noiret il y a 5 ans et dans la pièce de Ionesco, le roi se meurt en 2005) de son avenir (!). Il est un vieux comédien qui mourra sur les planches pour le bonheur de ces textes qui chantent sous sa voix !
Quand à ma virée au Stade de France pour voir une équipe nationale se déliter sous la maestria des argentins, elle ne fut une réussite que parce que je l'ai vécu avec mon fils et que nous avons communié aux souvenirs des exploits de notre Zizou, le vrai, celui qui envoyait des coups de boules pour projeter le ballon au fond des filets et non sur la poitrine d'un italien goguenard !
Destination Annecy, chez mon pote Jean-Eric Ougier, celui des feux d'artifices, qui viendra tirer à Cannes cet été. Un manoir accroché à la colline, au-dessus du lac. Un peu de neige et la pièce de Samuel Benchetrit, Moins deux avec Jean-Louis Trintignant. Bof ! Bof ! Pièce inintéressante au possible. Vive le grand air et les génies des alpages ! Pour le fun, quelques descentes de pistes rouges et bleues m’ont prouvé que le ski n’est pas comme le vélo… on oublie avec le temps et la forme météorique qui était la mienne n’a sans aucun doute pas arrangé la situation. Bon heureusement, il n’y avait pas de photographe dans le coin !
Retour au bercail donc avec l’ouverture du sommet des chefs d’états africains. De mon bureau, j’ai vu défiler une des plus imposante panoplie de potentats imaginable. Combien de pots de vin, de crimes et de prévarications étaient réunis pendant deux jours sous le toit du palais. En uniformes, en boubous, costumés, ils refaisaient le monde avec la certitude de ne rien vouloir y changer.
Par contre, le vendredi, à la sortie des artistes, Chichi himself est sorti de son cordon de sécurité pour un bain de foule des plus surprenants. Il m’a serré la main en me remerciant pour ce que j’avais fait pour la réussite de son dernier sommet (sic). Bon, OK, je n’avais rien fait du tout mais cela m’a fait plaisir quand même. Le mot gentil, sourire au vent, plaisanterie en coin, le bougre, il m’a impressionné et j’ai mieux compris la fascination qu’il provoque. Pas seulement celle du pouvoir mais aussi celle d’un tribun populaire, d’un homme normal. Et dire que je n’ai voté qu’une fois pour lui ! Vive Jacques Chirac… surtout s’il ne se représente pas, on ne va pas oublier son bilan de sitôt !
Mardi 20 février. Le jeu de la vérité, une bonne comédie de ma programmation et rebelote avec les affaires d’état. Cette fois-ci c’est notre Prince Albert de Monaco qui s’y colle. Coup de fil discret de la sécurité. Gardes du corps sympathiques tout droit issus du film « men un black ». Je demande comment je dois accueillir le prince. La Réponse vient sans tarder : Monseigneur ! Et me voilà donc serrant la main de mon auguste visiteur et lui donnant du Monseigneur long comme un jour sans pain. Après la pièce (gros succès), je l’emmène dans la loge rejoindre les comédiens et je participe aux effusions de mise. Ils ont réservé une table en face du Palais et je les accompagne cérémonieusement et sur un dernier Monseigneur, ils me quittent pour s’engouffrer dans le restaurant. Je tiens à vous le dire, il est normal notre Prince Albert et plutôt sympathique. Il va quand même falloir que je fasse attention, deux têtes couronnées dans la même semaine, c’est un coup à se retrouver dans Gala ou Voici !
Le festival des jeux démarre alors pour une semaine d’épouvante. Je suis déjà sur les rotules quand 120 000 personnes se ruent sur les stands, que 15 000 joueurs luttent pour l’emporter dans tous les jeux de la terre possible. C’est fascinant et épuisant. 50 nationalités, des rencontres des discussions, un gala de magie superbe, la remise des récompenses dans un spectacle où j’officie avec parait-il, une grande sobriété et beaucoup de classe… c’est nouveau cela !
Je me garde une nuit, le samedi, pour plonger dans le OFF. Des centaines de joueurs répartis dans deux salles qui se rencontrent avec des passions et des cris en testant des prototypes où des jeux plus standard. Moi, c’est au poker que je vais flamboyer, mes adversaires coriaces, des sommités du monde des jeux, vont y perdre leur latin et leur talent et j’empoche la mise d’une soirée qui écrit une page de ma légende en lettres d’off !!! Oui, mes amis, même diminué, je bande encore pour quelques cartes dessinant des figures ésotériques que je suis le seul à pouvoir décrypter. Ego flatté, Bernard est content.
Les Stargotz vont s’y retrouver cul nu à ce petit jeu de dupes. Moi, j’encaisse royal la mise et je leur souhaite une belle revanche, dès l’an prochain. Le festival des jeux c’est la folie et la passion, c’est l’enfer et le paradis, c’est un long marathon qui nous pousse dans nos derniers retranchements. A ce petit jeu, j’ai encore quelques forces pour me transcender quand il est nécessaire de conforter ma réputation !
Le lundi 26 février, exsangue, je goutte enfin un peu de repos bien mérité. Quelques examens qui m’assurent que je vais vivre encore 3 décennies et le Palais accueille des spectacles de la saison en cours, les danses et légendes du monde et surtout, le violon sur le toit, excellente comédie musicale qui résonne du tintamarre des événements troubles de notre société (racisme, antisémitisme, ultranationalisme et autres ismes en odeur de putréfaction qui envahissent notre univers du 3ème millénaire). Une belle leçon d’humanité que cette comédie sur la tragédie des exclus.
Voilà mon petit tour d’horizon. A bientôt sur ce blog, vos commentaires me ravissent !!! Continuez
PS : Il est urgent d’écouter un morceau de Bizet tiré des pêcheurs de perles, « Mi par di udir ancora ». Ce morceau est hallucinant. Il est en boucle sur ma chaîne !
PPS : Pas besoin de vous précipiter pour aller visionner lady Chatterley, le césar de l’année. C’est une grosse daube, un long téléfilm ennuyeux et inintéressant. Le snobisme parisien a encore frappé !