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Les années 70 et le cinéma

Publié le par Bernard Oheix

Cet article a été écrit pour illustrer une des séquences d'un livre-jeu que nous sommes en train de concevoir avec Luc Michel Toledano, Patrick Coulomb et Julien Oheix. Il s'agit d'une adaptation du jeu Le Cinéphile que nous avons créé devant déboucher sur une édition prochainement.

Le découpage des fiches jeu en décennie est précédé d'un texte introduisant chaque période, tant sur le plan de l'histoire que du cinéma, dans une volonté de lier à la fois les drames et les joies de chaque moment de notre vie avec les films qui en ont fait le succès.

Il s'agit pour moi d'écrire sur les années 70 et je vous présente ici la première partie de mon texte, le contexte en quelque sorte de ces années si riche cinématographiquement !

La dernière vague du baby-boom (cette génération enfantée avec la paix revenue et l’espoir renaissant) déboule dans ces années 70 avec les rêves d’une génération dorée. Ils ont encore sous leurs yeux la génération de leurs parents, issue de la guerre et de ses ravages, de la privation et de l’horreur d’un monde basculant dans la folie, et peuvent en contempler les stigmates toujours présents une vingtaine d’années après la fin du chaos de la Deuxième guerre mondiale.

Ils ont vu dans la précédente décennie, les biens de consommation faire irruption dans leur vie et transformer leur environnement. Le frigidaire, la voiture, le solex, la machine à laver le linge puis la vaisselle, le téléphone qui abolit les distances et cette toute nouvelle lucarne fascinante, la télévision, qui ouvre leurs yeux au monde de l’ailleurs et dévoile des pans d’une humanité inconnue.

On se déplace encore peu dans ce monde où les frontières et les distances enferment l’individu dans sa région et les seules migrations sont celles héritées des guerres de décolonisation et de la volonté des industriels de trouver des bras à bon marché ! Qui se souvient encore du «plein emploi» de l’Age d’Or et de l’importation massive d’une génération sacrifiée à l’industrie «taylorisée» de la production des biens de consommation dans des chaînes qui aliènent le travailleur et le coupent du produit fini ?

On y vit pourtant bien dans cette France assoupie où les convulsions d’un Mai 68 portées par les jeunes et les étudiants ont créé un électro-choc !

Les années 70 s’ouvrent sur cette montée en puissance d’une jeunesse avide de prendre sa place. La majorité va basculer rapidement de 21 ans à 18 ans sous l’impulsion d’une nouvelle droite plus «moderne» incarnée par Valéry Giscard D’Estaing, les femmes s’imposent comme une force à part entière et militent pour l’appropriation de leurs droits et de leurs corps, obtenant même, contre cette société machiste, le droit à l’avortement en 1974. L’ascenseur social fonctionne à plein, permettant à des enfants des classes moyennes et ouvrières d’accéder à l’Université avec la certitude d’un emploi à la sortie et d’une montée dans l’échelle sociale leur permettant de «dépasser» le niveau de leurs parents.

Tout irait pour le mieux si le premier choc pétrolier de 1973, consécutif à la guerre du Kippour, ne venait lancer un coup de tonnerre, rappelant aux français que le monde extérieur avait son mot à dire dans notre destin national !

Et personne en ce début de décade ne peut imaginer qu’elle sera celle de la fin des utopies. Envolés les élans libertaires d’un mai 68 où tout semblait possible. Choc de la guerre du Kippour, guerre tournée vers l’avenir au contraire des guerres de décolonisation, séquelles d’un passé qu’il faut bien accepter de solder. Lecture de l’Archipel du Goulag de Soljenitsyne qui vient abolir la frontière entre l’idée d’un monde imparfait issu de l’idéologie communiste et ses bourreaux d’un capitalisme conquérant. Même si c’est dans la décennie d’après que le Mur s’écroule, c’est en cette année 74 qu’un livre ravageur dévoile l’atroce vérité d’un monde concentrationnaire érigé sur une philosophie des vertus !

Ces années 70 sont fertiles en événements majeurs. La sécheresse du Sahel, la fin de la guerre du Vietnam par les Etats-Unis contraints de signer les accords de Paris en 1973 pour sortir du bourbier sous la pression d’une jeunesse se révoltant en créant les bases d’une contre-culture où les drogues se développent. Cette même jeunesse se radicalise en Europe avec Les Brigades Rouges en Italie et la Bande à Baader (Fraction Armée Rouge) en Allemagne, tentatives terroristes de basculement de l’Etat.

La Révolution Culturelle de Chine avec un Grand Timonier à la barre sanguinaire d’un pays sous électro-chocs d’une jeunesse avide de casser le moule de « l’ancien » afin de faire ce « nouveau » pays que Mao Tse Toung dessine pour eux. Les luttes de libération en Asie débouchant sur un gigantesque camp d’extermination dont les Kmers Rouges sont les apôtres sanguinaires, le coup d’état au Chili organisé par une CIA imposant une dictature sanglante et les pouvoirs militaires qui investissent l’espace public en Amérique du Sud, les convulsions du continent Africain entre les séquelles des décolonisations douloureuses et un néo-colonialisme qui pille leurs richesses en soutenant des gouvernements fantoches où la prévarication règne en loi d’airain…

Et pour terminer cette « décade prodigieuse », en un mouvement concomitant, l’Iran fait sa révolution et L’URSS envahit l’Afghanistan. Les heures sombres des années 2000 s’annoncent alors… mais personne se s’en rend vraiment compte sur le moment !

Cette jeunesse Française qui ouvre la décennie des années 70 ne sait pas que les Trente Glorieuses, cette période bénie de la reconstruction avec plein-emploi, miracle économique et course aux biens de consommation, est en train de se terminer. Un nouvel ordre se dessine, mondialisé, avec l’émergence de l’Asie dont les règles se formateront dans les soubresauts de l’agonie des économies industrielles européennes traditionnelles. Le monde est en train de changer…

Pourtant, cette jeunesse reste insouciante, gorgée de passions, est avide d’une culture qui se démocratise, des revues de musique qui naissent, un espace réel qui s’ouvre à leurs désirs. Le rock et les revues de musique comme vecteur de leurs aspirations, Johnny qui perdure et les Beatles qui se sont séparés, les Pink Floyd qui percent le « mur » de l’oppression. La scène musicale toute neuve s’ouvre au jeune public qui a désormais les moyens de consommer, d’écouter des vinyles, de voir des vedettes dans des Festivals ou des salles spécialement construites adaptées à cette passion électrique…La fin de l’utopie aussi avec les « punks » qui se radicalisent contre un rock populaire trop institutionnalisé à leurs yeux. C’est bien dans ces années que l’on bascule de l’optimisme béat initial au pessimisme d’un monde trop imparfait qui nous guette !

Le cinéma a fait sa grande révolution formelle dans les années soixante, cassant un système de production figé grâce aux progrès de la technique, inventant un langage moins académique et collant à la réalité d’un monde en mouvement ! Le cinéma de papa agonise dans l’académisme des productions classiques. D’ailleurs, le cinéma populaire, la sortie en famille, la notion de films « détente », tout cela explose pour répondre à la soif d’une nouvelle catégorie de spectateurs dont les jeunes sont le pilier et qui revendique que le 7ème Art soit celui de l’intelligence et de l’émotion, du reflet d’une réalité et de l’interprétation d’un présent que l’on peine à décrypter.

Ils se sont formés à la « cinéphilie » dans les nombreux ciné-clubs qui pullulaient, à coups de débats énergiques, de réflexions sur le fond et la forme, esthétique revendiquée devant renvoyer aux problèmes d’un monde qui perçait alentour. La pellicule en 16mm autorisait la diffusion la plus large, dans tous les recoins du territoire, des oeuvres plus confidentielles trouvant un public que les réseaux de salles ne lui offrait pas forcément. Une salle de classe, l’arrière cour d’un restaurant, une place dans un camping, un « drive in »… tout pouvait concourir à la diffusion d’un film brésilien ou japonais qui n’aurait jamais trouvé sa place dans le réseau traditionnel commercial !

Dans ces années 70, les revues de cinéma foisonnent et sont des forums de discussions acharnées. Les Cahiers du Cinéma comme une institution dispensant la « loi », Positif en opposant stratégique, Ecran et Cinéma 70 comme la vulgarisation intelligente du 7ème Art, Image et Son, Jeune Cinéma, émanations des fédérations de ciné-clubs. Chaque mois, des milliers d’exemplaires se retrouvent sur le marché, une génération de critiques naissant grâce à l’extraordinaire appel d’air de toutes ces revues qui luttent afin de s’imposer.

Voilà, la semaine prochaine je vous présenterai la deuxième partie, celle sur le cinéma et les films. Vos remarques sont les bienvenues, n'hésitez pas à me faire part de vos impressions !

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BoccaSamba... clap de fin !

Publié le par Bernard Oheix

Un été 2015 au rythme de la Samba...

Tout est né dans l'imagination de mon ami producteur, Richard Stephant, un jour de lecture d'un article sur le jeune dynamique et enthousiaste Maire de la Ville de Cannes, mon ancien président et complice du Palais des Festivals de Cannes, David Lisnard, lançant un projet pour La Bocca au nom évocateur de Boccacabana !

A l'origine un constat, La Bocca possède le plus grand front de mer de Cannes... mais celui-ci est totalement inexploité, dans un état pitoyable et l'idée de David Lisnard est de reconfigurer cette zone en la restructurant et en l'aménageant pour un plus grand confort mais aussi pour l'attractivité de ce quartier haut en couleurs où j'ai grandi et réside !

Car Boccassien je suis, reste et fier de l'être !

Aussi, après de nombreuses sessions de travail avec Richard Stephant (avec qui j'ai co-produit Le Requiem de Verdi, Le Canto General, le Mozzartissimo et tant d'autres galas de danse et concerts !), je me présente devant le Maire et lui lance, "-Si vous faites Boccacabana, je vous propose BoccaSamba pour accompagner votre chantier ?"

Regard interloqué, discussions animées, connivence retrouvée et "Banco" du Maire pour une édition 2015 qui devrait décoiffer !

BoccaSamba... clap de fin !

Mes motivations étaient simples et évidentes... pour moi !

1) Devenir le "Roi de La Bocca", ce quartier qui est le mien, dans lequel j'ai grandi, où j'ai vécu l'essentiel de ma vie. C'est ici que j'ai joué au foot, fait mon collège, dragué mes premières fiancées, vu mon premier film (dans l'Enfer Vert !) avec mon père dans un vieux cinéma de quartier... C'est ici que je me suis réinstallé après ma parenthèse burgienne, que mes enfants ont grandi, que je vais à la mer (au rocher rouge de Bernard, s'il vous plait !) et que je vieillis au fil des années qui s'enchaînent à un rythme incroyable !

2) Continuer mon équipée avec mon Maire, mon ami que j'ai soutenu pendant sa campagne, moi l'éternel soixante-huitard aux côtés du jeune quadra de droite à l'avenir certain ! Un paradoxe pour certains, une fidélité évidente pour moi ! Un homme avec qui j'ai eu une vraie liberté pendant les douze années où il a été président du Palais des Festivals et où j'étais son Directeur de l'Evènementiel, qui est à l'origine du succès de nombre de mes programmations... Iggy Pop, Pete Doherty, l'opéra moderne concocté avec Michel Sajn avec Archive et le CD avec l'orchestre de Cannes qui en a découlé, toutes ces idées bizarres qu'il a toujours soutenues et encouragées... Alors oui ! Pour lui et pour perpétuer notre amitié, mon BoccaSamba collait parfaitement à son Boccacabana !

3) Faire vivre ma boite, Bocca Conseils (cf. le site officiel de Bernard Oheix) en trouvant de nouvelles idées comme la Nuit de la Tchatche, Battles in the sky ou Le cinéphile, le jeu sur le cinéma que je développe avec une équipe de marseillais et Luc-Michel Toledano, son créateur.

4) Enfin et surtout, retrouver le terrain, le vrai ! J'ai commencé comme animateur de MJC (à La Bocca Frayère, justement !), j'ai toujours aimé la simplicité et le naturel des opérations menées avec les gens, sur le terrain, en proximité. L'animation n'est ni un gros mot, ni un concept désuet pour moi qui pendant 22 années a géré les plus grandes stars, la culture avec un grand "C", réalisé des manifestations de prestige. Derrière le Directeur, assoupi parfois, l'animateur a toujours veillé au grain, en maintenant un contact étroit avec la vérité du terrain... Cela explique sans aucun doute beaucoup des choix que j'ai fait !

 

BoccaSamba... clap de fin !

Alors que reste-t-il de cet été chaud et complexe à souhaits ?

La vraie beauté des gens, de ce public que l'on oublie trop souvent, se laissant aller, jeunes, vieux, arabes noirs ou blancs, à danser la samba, à se trémousser devant une scène improbable, entre deux tours où logent en s'ignorant des milliers de personnes, sur une terre battue, dans le soir caniculaire tombant.

L'excitation et la sensation grisante du dérisoire de la situation. Seuls avec Richard et Amélie, contre vents et marées, enfourchant ma moto afin de repérer les groupes sur la plage et leur offrant la vision surréaliste de corps emplumés, de silhouettes belles comme le crépuscule en train de danser aux sons d'une Batucada. Déchaînement sympathique des passions humaines, ferveur et bonheur de l'étrangeté de la situation !

Les heures avec les artistes, danseuses belle à couper le souffle, vieux musiciens brésiliens rompus à toutes les joutes musicales, star comme Zezihno, le roi du tic, tic, tac, débarquant spécialement de Manaus pour un concert gratuit sur une place de marché remplie d'un public avide de sensations.

La beauté des filles et des costumes de la Parade Fleurie transformée en corso carnavalesque sillonnant l'avenue principale de La Bocca au milieu de milliers de touristes et de Boccassiens en extase.

Le visage illuminé d'une petite fille se trémoussant en suivant une des danseuses dans des figures de plus en plus sophistiquées, l'oeil rieur d'une mamie esquissant un pas fatigué, son cabas à la main, devant la foule, l'embrassade émue d'un animateur à La Frayère après le concert de Dona Flor, nous demandant de revenir pour d'autres soirées aussi belles, le mot du Maire sur mon portable me remerciant pour mon action, la complicité des journalistes et photographes qui ont permis que la réussite évidente sur le terrain devienne un succès tout court, dans les esprits même les plus chagrin qui me prédisait une belle "gamelle" et ont parfois tout fait pour me mener à l'échec !

Mais les dieux de la Samba étaient avec nous en cet été et BoccaSamba 2 se déroulera, peut-être, en 2016 aux rythmes plus intenses des jeux olympiques qui se dérouleront à Rio de Janeiro sur la même période !

Alors vive le Brésil et les Brésiliennes !

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