Le grenier de la mémoire 16 : La palestre 1... l'Espoir !
A 40 ans, ma carrière s'était déroulée sur un rythme linéaire, 2 à 4 ans par poste (La Frayère, la MJC Bourg, La Belle Bleue, Les Campelières et l'OMACC). Réussissant globalement, à chaque fois, malgré l'échec de La Belle Bleue qui me permettait de garder la tête froide en me rappelant que je n'étais pas infaillible, loin s'en fallait !
C'est dans cette période d'euphorie que Michel Mouillot, le charismatique Maire de Cannes, sous la pression de la chambre régionale des comptes, en alerte depuis que "Jacques Médecin", le Maire de Nice, avait amené le détournement d'argent public par le biais des associations para-municipales jusqu'à une forme d'Art, décida de créer la SEMEC (Société d'Economie Mixte pour les Événements Cannois) afin de se conforter à leurs préconisations.
Il s'agissait de fondre en une entité juridique offrant plus de transparence les 3 mastodontes associatifs que gérait la Ville : l'association Palais des Congrès, le Comité des Fêtes et l'Omacc. Dans ce nouveau système, l'argent public était utilisé sur un mode de gestion "privée" mais avec des contrôles très rigoureux. Un chantier colossal !
Si le Directeur-Général de l'ensemble ne pouvait que se rattacher à la gestion du Palais, le poste de Directeur de l'Évènementiel ne pouvait (me semblait-il !) que me revenir, vu que j'en étais l'adjoint et que René Corbier restait à la Direction des Affaires Culturelles (Orchestre de Cannes, Ecole Régionale d'Acteur, Bibliothèques et autres institutions de la ville...).
Las ! Michel Mouillot, avec qui, pourtant, j'avais d'excellentes relations, en décida autrement. Au printemps 1991, il annonça qu'il nommait Pierre Jean (le responsable du Comité des Fêtes) sur ce poste. Un coup de poignard auquel succéda une mise à mort quand le dit Pierre Jean m'informa au cours d'un déjeuner "amical" que son adjoint serait Daniel Delesalle du Comité des Fêtes et que j'intégrerai la Direction de l'Evénementiel de la SEMEC comme animateur !
Pour la petite histoire, Pierre Jean était un ami du Maire, pianiste du groupe de jazz les "Haricots Rouges". Franc-Maçon, nommé au Comité des Fêtes depuis quelques mois, totalement incompétent dans ce métier d'organisation, même si c'était un homme très intéressant et cultivé dont j'étais l'ami et que je l'avais aidé dans ses premiers mois à faire une programmation d'été !
Quand à Daniel Delesalle, mon rival, ses limites faisaient que je n'imaginais pas qu'un jour il puisse être en concurrence avec moi et encore moins de me retrouver sous ses ordres !
Le paradoxe, c'est que si Pierre Jean m'avait attribué la Direction-Adjointe qui me revenait de droit, j'aurais accepté, même avec la rage au coeur ! Mais là, impossible de reculer... Et j'étais bien seul pour lutter à ce moment-là !
Je me devais de réagir !
Je me suis mis en campagne et très rapidement, j'ai trouvé un poste... Et quel poste ! Le challenge de mes 40 ans, l'objectif d'une vie. Je savais qu'au Cannet, une grande salle était en construction. Un montage complexe entre une municipalité qui concédait des terrains pour construire un ensemble résidentiel et qui en échange, se voyait offrir une salle polyvalente, sports spectacles et congrès, avec une gestion commune de l'établissement sous la forme d'une SEM (Société d'Economie Mixte !). Ultime paradoxe, je me retrouvais par le biais de Ressources et Valorisation, Directeur de la SEM qui gérait la plus grande salle en construction du Sud Est. Le Président de la SEM était le Député-Maire du Cannet, Pierre Bachelet, et je dois dire que le premier contact, l'entretien d'embauche avait été plutôt frais :"-Alors c'est Mouillot qui vous envoie pour m'espionner ? ".
Mais Ressources et Valorisation avait imposé leur choix. Et même un double choix puisque j'avais soumis ma candidature à la condition de venir avec mon adjointe, Sophie Dupont, celle dont je ne pouvais plus me séparer, professionnellement parlant !
Entre temps, j'avais demandé un rendez-vous à Michel Mouillot pour lui annoncer de vive voix mon départ. A mon entrée, il m'avait lancé "-Je sais, j'ai eu tort de ne pas vous nommer... Je le regrette ! ".
Puis on avais discuté amicalement de mon futur poste à la Palestre et il m'avait confié :"-Vous verrez, Bachelet est un incompétent, c'est un fou furieux, vous ne pourrez pas travailler avec lui. Sachez une chose, Bernard, ma porte vous restera toujours ouverte et si vous avez besoin de moi, je serai là !"
Et le 1er septembre 1991, j'intégrais mon "Graal" avec des bureaux situés temporairement à la Mairie du Cannet. La tête que j'ai fait le premier jour en découvrant sur la porte d'entrée une affiche appelant au rétablissement de la peine de mort !
Et je me suis attelé au travail, Sophie devant me rejoindre le 1er janvier 1992 même si nous avons tout partagé pendant ces 4 mois. Le premier (et seul !) problème que j'ai dû affronter était Pierre Bachelet. Un être abject, colérique, méprisant, fou à lier ! Je l'ai entendu dire en fin d'un repas qu'il arrosait trop, à une délégation du POP Bercy que j'avais amené dans l'objectif de réaliser des co-productions et des opérations croisées que : "-Finalement, Hitler, il n'avait pas fait que des mauvaises choses !". Imaginez la t
ête des émissaires de la plus grande salle parisienne à l'époque !
Chaque réunion hebdomadaire dégénérait en cris et hurlements (une partie m'appartenaient) et le secrétaire général de la Mairie est passé plusieurs fois pour me demander de ne pas énerver Monsieur le Maire et de me montrer plus souple !
Un jour, je lui ai apporté un parapheur avec des factures, branchement d'eau, raccord d'électricité, achats de sanitaires... Je me souviens encore de sa façon de prendre le parapheur et de le jeter en hurlant : "-Des factures, encore des factures et je ne vois jamais de recettes...". pour la petite histoire, la salle n'était pas ouverte et le toit à peine posé !
Malgré tout j'avançais, les plus gros tourneurs venaient visiter la salle pour signer des accords de partenariats vu que nous représentations la seule salle de cette gamme de 4000/5000 places dans la région.
Je commençais donc à bâtir une programmation jusqu'à m'entendre dire, à la proposition d'une soirée spectacle sport/culture (un match exhibition de Yannick Noah qui avait pris sa retraite de tennisman et un concert du jeune chanteur qu'il était devenu dans la foulée)..."- Yannick Noah, mais on va quand même pas faire un concert de nègres !". Pour la petite histoire, c'est un projet que je reprendrai plus de 10 ans après aux Concerts des Hespérides avec une soirée Noah (match plus concert) et I Muvrini, une autre soir !
On était mi-décembre, et cela commençait à sentir sérieusement le roussi ! Toutefois, pour le dénouement de mes aventures de La Palestre, il vous faudra attendre le prochain billet de ce blog !