LES ENFANTS APRÈS EUX.
Le roman de Nicolas Mathieu avait eu un véritable succès, couronné du Prix Goncourt 2018 et de ventes records à plus de 400 000 exemplaires. C'est à cette oeuvre majeure que Ludovic et Zoran Boukherma se sont confrontés avec un talent certain pour peindre cette jeunesse paumée d'une région frappée de plein fouet par la fermeture des usines sidérurgiques. Heillange, en Moselle, 1992, et à 14 ans, le désir d'un adolescent pour les filles et son mal être de vivre qui l'empêche d'aimer.
Ce roman sera porté sur scène et à l'écran, présenté à la Mostra de Venise où Paul Kircher, le jeune héros désenchanté obtiendra le Prix du meilleur Espoir en 2024
Le film démarre en 1992, dans le marasme d'une région dévastée. Anthony Casati à 14 ans et du désir plein ses rêves. Après sa rencontre avec Stéphanie, il décide de prendre la moto iconique de son père afin de la rejoindre dans une soirée. Las, les embrouilles avec un jeune maghrébin de la cité voisine, Hacine, font qu'il lui dérobe la moto et qu'avec la complicité de sa mère, il le dissimule à son père (interpretté par un remarquable Gilles Lelouche). Pour se venger, Hacine qui est renvoyé au "bled" à cause de son vol, vient brûler la moto devant sa maison et son père, fou de rage. La famille explose.
2 ans passent, Anthony travaille dans un club nautique et recroise Steph. Il tente de nouveau sa chance et lui donne un rendez-vous pour la soirée mais le sort s'en mêle. Hacine revenu du Maroc avec un statut de dealer et de caïd agresse Anthony dans les toilettes d'un bar et il est sauvé par son père.
Il décide malgré tout d'aller à son rendez-vous avec Stéphanie.
1996. Anthony décide de s'engager dans l'armée, fuyant sa mère dépressive et son père retombé dans l'alcool, c'est sa dernière soirée de liberté. Il se retrouve au feu d'artifices du 14 juillet et croise Hacine, rangé des trafics, qui travaille et a une famille. Leur contact est apaisé et Anthony peut presque conclure avec son amour de toujours, la belle Stéphanie.
C'est en 1998 que l'affaire se dénoue, dans la folie d'une équipe black, blancs, beurs, en train d'obtenir son premier titre en football avec Zidane dans un match projeté sur un grand écran qui réunit tous les protagonistes pour terminer le cycle d'une vie de rencontres avortées après une dernière échappée.
C'est un grand film sur les petites choses de la vie, les errances et les rêves qui portent ceux qui n'ont rien et tentent de s'inventer un avenir. Les frères Boukherma composent une ode filmique à ceux qui cherchent et ne trouvent pas toujours un sens à leur destinée. Sur la trame du roman, avec fidélité, ils offrent le tableau réaliste d'une jeunesse perdue sur les traces de leurs parents paumés.
Reste l'espoir malgré tout, et ce film qui fait honneur à un certain cinéma à la Française, qui n'a pas peur d'affronter les petits riens pour de grandes causes et nous rappelle que le cinéma n'est peut-être pas la vie, mais qu'il peut la dépeindre sous tous ses angles afin de nous offrir un souffle d'espoir !