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culture

La danse sur un fil !

Publié le par Bernard Oheix

La biennale de Danse de Cannes changeant tous les 6 ans de Directeur Artistique, c'est désormais Didier Deschamps (pas le footballeur, l'autre, le danseur) qui s'y colle avec bonheur. Sa connaissance aiguë de cet Art, son carnet d'adresses, sa passion qu'il utilise dans la réalisation d'une première édition somptueuse, ont transformé Cannes et sa région où sont décentralisés des spectacles (La Scène 55 à Mougins et le Théâtre de Grasse en particulier) en capitale d'une danse qui sort des sentiers battus et permettent de découvrir des créateurs hors du commun.

Avec le soutien de Sophie Dupont et de son équipe de l'Évènementiel du Palais des Festivals de Cannes, le public a vécu 15 jours d'une plongée dans des spectacles que les chorégraphes inventent à la frontière de tous les arts, là où le geste, le son et l'image ouvrent des horizons sans limites.

Antoine Le Ménestrel sur le fil d'Ariane d'une danse du vertige !

Antoine Le Ménestrel sur le fil d'Ariane d'une danse du vertige !

Avec sa compagnie Lézards Bleus, Antoine Le Ménestrel perpétue ses étranges spectacles "d'allumeur de rêves". Ici, dans la ville du cinéma, au sein du Festival de Danse, c'est au film muet de 1923 d'Harold Llyod qu'il rend hommage, projetant des extraits du film (la scène de l'horloge) sur la façade du Cinéum pendant qu'il est suspendu, accroché à un filin, et que ses complices se contorsionnent en se poursuivent sur les arêtes du bâtiment construit par l'architecte Rudy Ricciotti.

C'est fascinant, 40 mn de haute volée, dans une nuit fraîche où les spectateurs lèvent la tête pour assister à la fuite d'un équilibre dans la recherche d'une sens profond. Le cinéma sur le cinéma dans une danse de la vie !

Et des coups de coeur, il y en aura de nombreux, tant la scène actuelle est riche d'une pléiade de nouveaux chorégraphes arrivant à maturité.

C'est le cas avec Into the Hairy de Sharon Eyal et Gai Behar. Sharon Eyal, issue du vivier de la Batsheva, tente avec son complice de créer une danse envoûtante, répétitive et désaccordée, comme pour enrayer la fuite du temps. C'est étonnant et le spectateur reste enfermé dans l'univers de bruits et de fureur d'un monde désaccordé.

Plus traditionnel mais tout aussi passionnant, le dernier ballet créé à Cannes en avant-première par le Ballet de Biarritz de Thierry Malandin : Les saisons. Encore un peu frais, mais porteur de belles émotions.

Recirquel,la compagnie hongroise, sera un des coups de coeur de cette quinzaine. Entre le cirque et la danse, sur le thème de l'amour, des acrobates-danseurs vont évoluer sur la scène comme dans les cieux, à la recherche d'une harmonie où chaque corps tente de fusionner avec l'autre dans une recherche perpétuelle de l'accord parfait. Sublime !

Et bien sûr, les dernières oeuvres de Keléménis et Cie, le collectif espagnol de Kor'sia, David Coria, une compétition de films sur la danse et des moments de partage avec le public assidu et passionné.

Le Ballet du Grand théâtre de Genève

Le Ballet du Grand théâtre de Genève

Et pour terminer la flamboyance de deux oeuvres du Ballet de Genève. Skid du chorégraphe Damien Jalt, ou une fois encore, le danseur va faire reculer les lois de l'équilibre. Sur un plateau incliné à 34°, des corps apparaissent surgissant du néant pour glisser vers le sombre d'une fosse, ils vont tenter d'organiser le chaos en refusant la gravitation. Glissades, enchevêtrements, chaines humaines et ruptures du sens. Un moment de force sans repères pour troubler l'ordre naturel des choses.

Et Fouad Boussouf avec Via va achever en trois tableaux cette déconstruction de l'univers. Le rouge où les danseurs sautillent dans un paroxysme de trémoussements, la bleu où le geste se libèrent et les corps se cherchent et pour conclure, le jaune ou les danseurs deviennent fluides et réharmonisent l'espace en créant le mouvement sans attaches.

Bravo à Didier Deschamps et à l'équipe de Sophie Dupont d'avoir réenchanté l'univers de la danse sur les scènes de la région. Une danse libéré des contraintes de la scène, dans la ville où Rosella Hightower créa son école pour la postérité et qui lui rend bien son amour du geste juste, libéré, bien loin des affres d'un monde plongé dans l'obscurité !

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Introduction à La Métisse du Peuple des Épines

Publié le par Bernard Oheix

Je vous offre le paragraphe qui ouvre mon livre, comme une pincée de cet air du large qui m'a séduit dans la vie de Talike, cette incroyable aventure humaine d'une femme à la recherche de ses rêves dans une île de mystère. De ce feu qui hante ses nuits, à la quiétude d'un retour au pays, auprès des siens, après une vie de femme et de mère, et un exil pour chanter sur les scènes du monde entier les histoires de son peuple, il y a tout le courage de celles qui affrontent leurs désirs sans se renier, leurs passions, en acceptant les revers d'une vie dans une région où le prix de son existence se mesure à l'aune de son courage. Talike est une métisse, petite fille du dernier roi du Peuple des Épines, et sa voix résonne comme un hymne à la liberté et à la différence !

Le phare de l’enfer. Chaque volute grimpe à l’assaut des étoiles, se contorsionne et projette des nuages incandescents qui retombent en pluie de feu, irisant la nuit de particules rougeoyantes. Chaque bras s’échappant du foyer vient se fondre dans la matrice infernale qui grossit et gagne en hauteur, atteignant des sommets démesurés. Les flammes tutoient le néant. Un grondement sourd manifeste la colère des cieux. Le brasier se nourrit des tonneaux de rhum entreposés dans la cave, se gorgeant des bouteilles d’alcool qui explosent sous l’action de la chaleur. Tout lui est bon pour s’enrichir et conforter sa violence. Le bois des charpentes, les meubles, les papiers et les draps l’alimentent sans faiblir. Il rue par saccades et croît dans une tornade de fumée noire zébrée d’éclairs carmin. Nuit d’apocalypse.

Il paraît que l’incendie fut visible à plus de 40 Km. Sur ces contreforts de l’Androy, au sud de Madagascar, cette tragédie provoqua des rassemblements dans chaque hameau. Les familles se regroupaient, nez en l’air, cherchant la cause d’un sinistre qui illuminait l’horizon. Les vieux hochaient sentencieusement la tête, les femmes jacassaient en pointant du doigt le foyer qui rugissait, les enfants hurlaient. Quelques hommes se rendaient à pas pressés vers le lieu du sinistre, ombres furtives s’évanouissant dans les ténèbres. Chacun pressentait qu’un tel incendie annonçait un drame terrible.

Je marchais dans l’obscurité, m’éloignant du crépitement assourdissant de la chaleur. Les gens couraient autour de moi, se dirigeant vers l’épicentre de ce bouleversement. À contre-courant, du haut de mes 4 ans, je me fondais dans le noir, suivant des chemins inconnus entre les cases, contournant les carrefours où la population se regroupait. Le silence m’attirait. J’avais si peur du bruit. Je chantonnais une comptine que ma maman me psalmodiait pour m’endormir et à chaque refrain, j’avançais de quelques pas, persuadée qu’elle me protégerait contre les fantômes qui profitaient de cette confusion pour narguer les vivants.

 

On m’a retrouvée à l’aube, dans la forêt d’épineux, les pieds lacérés par les dards, la peau striée de cicatrices où le sang perlait, un pouce dans la bouche, les yeux secs d’avoir trop pleuré. Des voisins me reconnurent, ils me ramenèrent à ma grand-mère, la vazaha dont la maison-restaurant venait de se consumer.

Les cendres étaient encore chaudes, quelques fumerolles sourdaient de l’amas noirâtre, un tas impressionnant de meubles hétéroclites gisait dans un coin de la cour. L’incendie avait épargné les cases de mes oncles et tantes. La population avait extrait tout ce qu’il était possible du brasier, sauvant quelques bribes de la puissance de mes grands-parents paternels. Ma mère était absente. Elle avait accouché dans cette nuit d’horreur et se remettait au dispensaire de la naissance d’un enfant qu’elle appelera Afolahy, « enfant du feu », en mémoire de ce drame qui ensanglanta le jour de son arrivée intempestive sur cette terre Malgache. Plus tard, il apprit à marcher sur les braises et à dompter les flammes. Il se produisait sur les marchés, avalant des flammèches, jonglant avec des massues ardentes, devenant célèbre dans la région de l’Androy. Son existence se décline autour de ce maître du feu tout puissant qui l’accueillit avec tant de fracas la nuit de l’incendie qui illumina le ciel des Antandroy.

 

C’est ma mère qui avait donné l’alerte. Le terme s’annonçait, elle ne réussissait pas à dormir et avait perçu la fumée en train de ramper, se glissant comme un serpent venimeux à travers les interstices des parois, les trous dans les plafonds. Une fumée noire chargée des fureurs de l’enfer qui dégorgeait sans bruit en roulant sur le plancher, attendant de se réveiller et de rugir. Elle avait crié de toutes ses forces et senti se déchirer son ventre rebondit. Ses eaux inondant le plancher, elle s’était traînée dans la cour, entamant sa parturition pendant que chacun tentait d’éteindre le brasier, de sauver quelques meubles, d’arracher des souvenirs à la gueule brûlante du dragon qui ronflait d’aise. Une sage-femme arrivée à la rescousse l’avait soutenue et c’est dans la cour dévastée de mes grands-parents que mon frère naquit, par une nuit de folie où la nature avait décidé de se révolter contre la loi des hommes.

 

Mon père et mes oncles n’étaient pas encore revenus de la mine de pierres précieuses qu’ils exploitaient sur les contreforts d’Ambatomika. Depuis des semaines, ils s’acharnaient à extraire de minuscules saphirs, des tourmalines et améthystes d’une veine épuisée. Ils espéraient récupérer dans le sous-sol quelques miettes d’un festin abandonnées par les précédents exploitants. Ils étaient en route dans leur voiture cabossée sur les chemins défoncés qui sinuaient à travers la péninsule. Il n’y avait que les femmes et les enfants pour contempler les dégâts et tenter de remettre un peu d’ordre dans le chaos qui régnait.

Ce sont les policiers qui ont découvert le cadavre de mon cousin dans sa chambre. Personne ne s’était aperçu de son absence. Son corps desséché et recroquevillé restait le seul témoin de ce qui s’était déroulé dans l’ombre d’une nuit malfaisante.

Ce cousin qui venait de mourir, aîné de trois enfants, avait été élevé par ma famille. Après la guerre d’Indochine, son propre père, engagé dans un bataillon d’élite des fusiliers marins, était retourné en France et avait disparu. On ne savait pas ce qu’il était devenu. Évanoui dans la nature, ses enfants avaient naturellement trouvé refuge au sein de notre fratrie.

 

C’est ma grand-mère vazaha qui régentait ce lieu, moitié bar, moitié restaurant, halte à mi-chemin sur la route reliant Fort Dauphin à Ifotake. Équidistant des deux villes, le bourg d’Amboasary était une étape indispensable pour tous les marchands qui sillonnaient ce pays de l’Androy où le peuple des épines avait élu domicile, quelques siècles auparavant, quand aucune route ne perçait les buissons infranchissables. C’est dans cette grande bâtisse carrée qu’ils pouvaient se restaurer, boire en nouant des discussions avec les représentants des hameaux voisins. Ils écoulaient leur marchandise, prenaient des commandes, réglaient leurs affaires en consommant l’alcool de palme, le whisky où la bière française que des camions déversaient une fois par mois dans l’immense cour pour être stockés dans un cellier au rez-de-chaussée. C’est là que le feu avait pris pour se répandre comme une traînée de poudre.

 

La famille de mon père avait fui les persécutions en Alsace au milieu du 19èmesiècle. Dans les guerres qui ravageaient les terres des confins, il n’y avait pas de place pour des Bonapartistes espérant le rétablissement d’un empereur déchu au retour de l’île d’Elbe. C’était une période trouble pendant laquelle la vie était dure et incertaine dans les campagnes reculées. L’immensité océane ouvrait une route aux aventuriers que rien ne rattachait à leur pays. Ils s’étaient embarqués pour un confetti perdu au milieu de l’océan Indien, important leurs idéaux de justice et de fraternité auprès d’une population qui émergeait de l’oppression. Ils avaient créé une coopérative pour fabriquer des tonneaux de bois sur l’île Maurice avec d’anciens esclaves, puis imaginé un phalanstère pour cultiver une plantation de canne à sucre, échouant avec constance, incapables d’assumer les contradictions d’une société primitive où la force brute servait d’étalon à la réussite. Finalement, ils débarquèrent à Madagascar au début du 20èmesiècle, dans le sud désertique et sans eau d’une région sauvage coupée de toute civilisation. Ma grand-mère avait investi toutes ses dernières économies dans cette maison de bois d’un étage au centre d’une cour immense où chacun avait construit une case pour abriter sa famille.

 

Mes parents paternels sont donc des vazahas, blancs venus d’un pays lointain. La couleur de leur peau fait d’eux des colons, ces hommes qui régentent le pays, dictent leurs propres lois, construisent les routes, enseignent à l’école et perçoivent les taxes en important leur culture. Ils n’ont bien souvent que mépris pour les populations locales, indigènes à la peau foncée qu’ils croisent du haut de leurs certitudes, et toisent sans aménité. Mais plus que le mépris pour les indigènes, il y avait leur haine pour les métisses, les mulâtres, ces traîtres à leur race, jamais du bon côté, versant sombre de leurs peurs qu’ils ne pouvaient situer avec certitude sur une échelle des rapports humains. Les sangs mêlés semaient la confusion, ils étaient porteurs d’indécision devant les certitudes des blancs.

Mes ascendants étaient différents, leur blancheur qui commençait à se colorer n’était pas synonyme de désir de puissance. Ils étaient sur les routes depuis des lustres, chassés de toute part. Ce coin perdu à l’écart de tout était l’aboutissement d’une errance qui avait commencé si longtemps auparavant. Bien sûr qu’ils avaient la peau blafarde, que mon père avait poursuivi ses études en France et qu’il était employé comme contremaître à l’usine de sisal de Tsiarapoke, juste en face du village de Befaitse où il avait croisé le regard de ma mère. Mais ils avaient abandonné cette couleur de peau pour se fondre dans la vie des Antandroy, adopté leur rythme de vie, épousé leurs croyances.

 

La nuit, le ciel de mon pays a la pureté d’une eau translucide. La voûte étoilée rase le crâne, on a l’impression d’être plongé dans une mer sombre déchirée de lumières. Le firmament est constellé d’étoiles qui scintillent, l’air semble immobile quand le soleil se lève à l’horizon et que ses rayons viennent réchauffer la nature.

Il me manque mon ciel.

J’avais quatre ans le jour de l’incendie et j’ai entendu ma grand-mère pleurer. C’était la première et la dernière fois que j’ai vu des perles couler de ses yeux et suivre les chemins de ses rides, contourner chaque preuve de ses douleurs et tomber sur la terre sèche pour s’engloutir. Elle savait que la malédiction perdurerait, qu’ils n’auraient nul repos pour les fautes inconnues, qu’il fallait bien assumer pour ceux qui les avaient précédés en leur léguant ce fardeau. Mais la vie a continué.

J’avais 4 ans et je ressens encore cette langue incandescente surgir et tenter de me mordre, se débattre et hurler mon nom. J’ai toujours peur du feu.

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La Métisse du Peuple des Épines

Publié le par Bernard Oheix

La Métisse du Peuple des Épines

Après de longues vicissitudes, ce livre écrit en 2008 vient de naitre officiellement au Festival de Mouans-Sartoux, un Festival de toutes les passions qui a su s'imposer comme un des lieux incontournables de la création et de l'édition en France. 

Prévu pour fin octobre, c'est Laurence Berlioz, la collaboratrice de mon éditeur Frédéric Ovadia qui m'a convaincu de foncer afin d'être présent avec une édition spéciale pour le festival. Et c'est ma correctrice et amie, Myriam Zemour, qui a fait un travail superbe, qui a été heureuse de ce challenge, dans l'obligation de cravacher afin de tenir le délai. Et le miracle a eu lieu en ce vendredi matin du 6 octobre, à 9h, pour l'ouverture, un colis de 20 livres signés de Bernard Oheix m'attendant sur le stand des éditions Ovadia. Émotion indicible de voir l'objet, de toucher ce papier, de sentir cette encre encore fraiche, d'aimer cette couverture concoctée par Laurence.

Le vendredi, 7 exemplaires vendus dans cette foire d'empoigne, dont 5 à des inconnus séduit par la couverture, par Madagascar et par cette héroïne des temps modernes que je vendais avec passion !

Le samedi, jour blanc, le mariage d'un ami très cher avec sa compagne belle comme un soleil Brésilien, m'empêchant d'être au rendez-vous. Mais il restait le dimanche et dès le matin, mon réseau s'activa, avec l'inéluctable frustration de n'avoir plus de livres à vendre à 13H. Il faut dire que l'article ci-dessus d'une demi page dans le Nice-Matin du jour, m'a bien aidé dans ma tentative de séduction ! Merci à toi Alexandre Carini d'avoir aimé ce roman biographique d'une chanteuse Malgache

Alors, avec le dernier exemplaire restant, j'ai pris les commandes (35 unités) et j'attends désormais la livraison des 100 exemplaires qui me permettront de réaliser ce doux rêve de donner un peu de son âme à des lecteurs attentifs.

Oui, j'étais bien à Mouans-Sartoux, dans la cohue de ceux qui tentent de partager un soupçon de leurs passions avec ceux qui désirent ouvrir leur yeux aux horizons du large.

Alors, si cela vous tente, vous savez où me contacter en attendant la diffusion du livre dans 200 librairies de France !

 

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Le Phoenix, Zaho de Sagazan, et de la musique !

Publié le par Bernard Oheix

Grâce à l'excellente programmation de Sophie Dupont, la directrice de l'Événementiel du Palais des Festivals de Cannes, 2000 spectateurs ont communié avec Phoenix, un des plus grands groupes de Rock de la scène musicale Française et internationale, et avec la pépite émergente de 23 ans, Zaho de Sagazan, qui  a convaincu tous les présents d'un avenir radieux.

Il faisait chaud sur Cannes en ce jeudi 13 juillet et la silhouette de l'église du Suquet en fond de scène découpait l'horizon, offrant un paysage magnifique à ceux qui avaient décidé de s'offrir une place sous les étoiles d'une Méditerranée envoûtante pour renouer avec le passé et l'avenir d'un rock aux multiples facettes.

Et ils ne l'ont pas regretté ! Et moi non plus, retrouvant toute cette équipe de l'Évènementiel si passionnée et évoquant les belles années d'un parcours commun qui nous a mené aux cimes de la béatitude musicale.

C'et Zaho de Sagazan qui a ouvert le bal des fous de musique !

C'et Zaho de Sagazan qui a ouvert le bal des fous de musique !

Zaho de Sagazan est toute jeune, elle vient de produire son premier opus, La Symphonie des éclairs dont elle est l'auteure et la compositrice. Accompagnée de deux musiciens qui jonglent avec leurs machines pour créer les sons électro qui sertissent sa voix si pure, elle s'empare de la scène, et captive le public, parle et bouge avec justesse, déclenche sa voix qui vient servir des mots étrangement cristallins parlant de la vie, de sa vie, de ses rencontres, de l'amour, de son corps et de l'attente de l'autre.

C'est magnifique et si frais dans un déferlement de plages sonores électro qu'elle maîtrise avec audace et simplicité.

Nul doute que son chemin est tout tracé et qu'elle s'imposera comme une grande artiste de scène comme de studio tant elle a à dire... et avec la manière en plus !

Le phoenix des hôtes de ce toit du Palais !

Le phoenix des hôtes de ce toit du Palais !

Phoenix est né en 1997, sur la base d'un groupe d'amis se connaissant depuis le collège. Ils vont exploser en surfant sur l'électro et la French Touch et conquérir la scène anglo-saxonne pour devenir un des plus grands groupes de rock international. On ne compte pas les premières et évènements exceptionnels qui parsèment leur carrière depuis 25 ans même s'ils affichent toujours ce désir de convaincre et d'emporter le public dans les volutes de leurs partitions échevelées.

Dans cette soirée cannoise, la première fois qu'ils jouent un concert complet dans la ville du Festival du Film, ils proposent un set particulièrement rock, deux guitares, basse et batterie, et la voix de Thomas Mars comme fil conducteur. C'est un rock tribal, une plongée dans les riffs et les sons déchirants, du rock pur et dur.

La mise en scène est superbe avec des effets visuels particulièrement réussis dans cet écrin magique. Ils vont emporter le public et le guider sur les traces de ces années de bonheur qu'ils ont traversées sous les sunlight d'une renommée qui n'a pas entamé leur désir de rocker avec les spectateurs.

Phoenix, un parfum d'histoire dans une page qui s'écrit chaque jour de notre existence. Et le public ne s'y est pas trompé qui leur a offert une ovation à la romaine !

Mais il y a aussi deux Cd hérités d'une plongée vers Lyon et La Bresse que je souhaite vous présenter ?

Le premier est issu d'une rencontre impromptue, une cousine de Thérèse qu'elle n'avait pas revue depuis 25 ans et des retrouvailles émues à Sathonay Camps. Le temps d'un repas avec un homme à la coupe de rocker sympathique, une discussion passionnée et déjà le temps de se séparer pour continuer notre route avec la certitude d'avoir passer un beau moment et la promesse de se retrouver sur les chemins de la musique !

Et quoi de plus sincère que de vous transmettre la lettre que j'ai écrite à Jean-Jacques Fau à l'issue des écoutes de ce CD venu d'un monde inconnu.

 
N’étant pas un grand spécialiste du Hard-Rock, j’avais quelques appréhensions à écouter ce CD que tu m’avais si gentiment 
offert.
Une semaine on the road again, et l’arrivée en mon home avec la Méditerranée comme horizon et enfin prêt à subir les affres des Fauz.
 
Et je dois dire que le 1er titre m’a un peu, légèrement, beaucoup... déstabilisé…. particulièrement hard dans le vrai sens du terme !
Mais je suis tenace, et j’ai continué mon écoute en bravant Le Cul des sorcières et puis, et puis… Bon, j’espère que cela ne vous décevra pas de la part d’un non-spécialiste du Hard… mais j’adore votre CD !
Les 2 intros musicales de Story of little Grapefrut et de Metalorganic Heart sont de vrais bijoux !
L’écume des jours est une superbe ballade avec un texte magnifique.
Et quelqu’un capable de ce rire satanique après avoir prononcé le nom honni de Donald Trump dans Poor James ne peut être que quelqu’un de bien !
 
On perçoit l’osmose du groupe, son métier né dans tant de plans galères et dans ces soirées à rêver d’un son unique, les guitare, basse, batterie en harmonie même parfois violente, les textes riches servis par des voix graves comme un élément à part entière de la composition.
 
Bravo à vous, vieux routiers du Hard et vive les riffs effrénés de vos passions !
 
Amitiés
 
Bernard Oheix, le mari de la cousine !
 
 N'hésitez pas, si vous avez la chance de croiser le chemin de Fau'z, allez les voir en concert et achetez leur CD, il vaut le détour par la voie du Hard-Rock ! 
Le Phoenix, Zaho de Sagazan, et de la musique ! Le Phoenix, Zaho de Sagazan, et de la musique !

Et le petit dernier pour la route, Astoria avec À l'écart du Chaos, un CD composé par Thomas Le Gall pour les paroles et la musique avec une bande de copains aux guitares, basse et batterie. Groupe de Boug en Bresse, composé de jeunes quadragénaires, ce CD est excellent et prouve que la richesse et la nouveauté ne sont pas incompatibles, qu'ils ne riment pas forcément avec un nom et une histoire. Ici, c'est le désir qui s'exprime dans de superbes ballades, et l'on sort des mots si intelligents portés par une musique de qualité un peu plus émerveillés par l'inventivité et le chaleur d'une jeunesse qui a tant de choses à dire.

Bravo à Thomas Le Gall (guitare et choeur), à Sylvain Eymery (voix et choeur), Guillaume Delage (batterie et clavier), Laurent Costechareyre (basse et choeur), et autres acteurs de cet opus. Et félicitations à l'équipe d'enregistrement et de  mixage du Studio de la Façonnerie dirigé par Fred Sonnery.

Le Phoenix, Zaho de Sagazan, et de la musique !

Et voilà une belle plongée dans un paradis de notes et de mots chargés d'espoir. Et cela n'est pas rien en cette période de doute général que des porteurs de lumières éclairent notre avenir. Quand le monde semble se figer dans l'horreur, il y a toujours des voix pour nous inciter à croire en un avenir meilleur. Les bateleurs des temps modernes sont toujours les hérauts d'une espérance et le vent l'emportera contre les tourmentes qui nous enchaînent à une réalité parfois bien trop pesante avec ses chaînes qui veulent nous ligoter dans le désespoir. Vive la musique !

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La Métisse du Peuple des Épines.

Publié le par Bernard Oheix

C’était dans la première décade d’un nouveau millénaire. De par mes fonctions de directeur de l’Évènementiel du Palais des Festivals de Cannes, j’avais le privilège de voyager à travers le monde, de sauter de la Russie aux États-Unis, de la Chine à l’Afrique.

Arrivant de New-York où j’avais rencontré un producteur de danse et écumé quelques salles de Broadway avec mon ami producteur Richard Stephan, Séville m’ouvrait ses nuits chaudes aux sons de la musique du monde : le Womex, marché international réunissant les producteurs et les artistes d’une musique qui tentait d’émerger et de rayonner à travers les scènes et de conquérir un public friand des sons d’ailleurs. J’en programmais avec constance, de Salif Keïta à Huun-Huur-Tu, des Mory Kanté Youssoun N’Dour, Idir et Tiken Jah Fakoly, Rokia Traore ou Ismaël Lô…

Présentés dans Les Saisons de Cannes que j’avais créées en 1997, une trentaine de soirées autour de la danse, du théâtre et de la musique de septembre à avril, complété par des festivals et des animations en été. Je ne pouvais imaginer que ces voix portant les siècles et les couleurs de l’ailleurs ne retentissent pas pour emporter le public dans les volutes de l’étrange. Et cela marchait formidablement. Des salles pleines d’un public chamarré et bon enfant.

Je venais donc faire mon marché à Séville, trouver des pépites, ouvrir des horizons, en compagnie d’une bande de jeunes producteurs et tourneurs particulièrement passionnants pour lesquels j’étais devenu, de par mon statut cannois, un grand frère amical. Trois jours de bonheur, de rencontres, de concerts, et de recherches d’un mystérieux chapeau vert, avant de prendre un taxi pour l’aéroport et un retour au bercail. Las, des incidents techniques en cascade, trois heures minimum de retard avant l’embarquement, un bar comble avec une table de libre, un café les yeux dans le vague.

-Pardon monsieur : mon avion pour Bruxelles a du retard, toutes les places sont prises. Acceptez-vous que je m’installe à votre table ?

Elle était superbe la belle inconnue qui venait d’interrompre le cours lâche de mes idées vagabondes. Une métisse au teint caramel, des cheveux noirs brillants, une lueur dans les yeux qui accrochait la lumière.

 

Comme deux inconnus que le hasard rapproche, des mots d’échange, de bienvenue, l’évidence pour moi qu’elle venait du Womex, sa surprise d’apprendre que j’étais un programmateur, et la discussion qui s’engage sur Madagascar : des anecdotes, son apprentissage du chant au long de la rivière Mandrare et des garçons qui rivalisaient avec elle par chants interposés en questions/réponses d’une rive à l’autre, son grand-père le dernier roi du Peuple des Épines, sa vie en Belgique avec son groupe Tiharea dont elle m’offrit un CD, comment elle avait grandi aux sons des veillées avec les vieux qui racontaient les louanges des anciens guerriers en luttent contre les envahisseurs.

Et le temps qui file, désormais trop vite, jusqu’à une annonce informant que les passagers pour Nice étaient attendus et mon départ, non sans avoir récupéré son numéro de téléphone, son mail et son adresse.

En arrivant à Cannes, j’avais sa voix dans la tête comme un litanie qui refusait de me quitter. Je me suis précipité sur mon ordinateur et j’ai commencé à taper, sans savoir où j’allais, brodant sur des mots entendus, des images imaginées. Trente pages dans la frénésie que je lui envoyais avec un message : « -Si tu le souhaites, on peut continuer ? ».

Elle m’a répondu, émue, me demandant comment j’avais réussi à rêver sa vie. Et nous avons entamé un véritable travail, à base de rencontres sur Paris ou Bruxelles. Je l’interviewais, remplissais des carnets de notes et retournais dans ma solitude pour orner sa vie à l’aide de mes phrases et de mes espoirs. Je les lui renvoyais alors et elle corrigeait, agrémentais de commentaires et de précisions mon travail.

C’est ainsi que cela a commencé. Rencontre impromptue, fascination mutuelle, amitié réelle naissant sur un livre en train de s’écrire au fil du temps et d’une matière si riche que mon imagination se contentait d’errer sur les chemins d’une île que je n’avais jamais parcourue mais qui me hantait désormais.

Au fil du temps et des rencontres, ce livre s’est dessiné, moitié sa vie, moitié rêvé. Elle en a lu des extraits à sa mère et me racontait en riant, qu’elle ne savait plus si ce qu’elle lisait à haute voix parlait d’elle ou d’une étrangère.

Les années ont passé et un jour, Basile Ngangue Ebelle, au cours d’une discussion, a appris l’existence de ce manuscrit dans les greniers de ma mémoire. Il m’a demandé de pouvoir le lire et après avoir créé une commission de lecture, a décidé de l’éditer pour la vingtième édition du Festival Panafricain de Cannes, en octobre 2023.

Vous l’aurez bientôt entre les mains et s’il vous guide en territoire inconnu, si vous chassez les épines en compagnie de la belle Talike, alors, peut-être que vous sentirez le parfum de la liberté errer sur la mémoire des hommes et des femmes qui tentent de vivre l’avenir sans renier leur passé.

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Simone Veil, Les combats d'une effrontée.

Publié le par Bernard Oheix

Comment ne pas sortir bouleversé du spectacle Simone Veil, Les combats d'une effrontée, qui plus est, quand on a eu le privilège d'assister à cette représentation au Mémorial de la Shoah, à Paris, dans le Marais, dans ce temple d'un drame à nul autre pareil, dans cette période ou trop nombreux sont les héritiers de ce "détail de l'histoire"comme disait Le Pen, où même un bateleur de la dernière présidentielle a pu soutenir que Pétain avait sauvé des juifs.

Quand l'antisémitisme et tous les ostracismes fleurissent et que les portes du pouvoir s'ouvrent aux tenants d'une extrême droite même camouflée, alors il faut accepter ces mots d'une violence sans partage écrits par une survivante de ce massacre au regard lucide et à l'engagement sans faille.

 

Cette pièce, tirée de son autobiographie, écrite par Antoine Mory et Cristiana Reali, mise en scène par Pauline Susini parcourt les étapes d'une vie hors du commun. La déportation et la disparition d'êtres chers dans les soubresauts de la solution finale, l'extermination des juifs et des tsiganes, puis son engagement politique et cette lutte d'une violence inimaginable pour la légalisation de l'avortement devant une assemblée d'hommes ne reculant devant aucunes vilenies  pour couvrir sa voix.

Elle est la femme alibi comme elle se définit elle-même, celle qui offre une bonne conscience à ceux qui n'ont pas voulu voir la réalité ou en portant la parole des femmes dans une assemblée d'hommes pas du tout prêts à lâcher une partie de leurs pouvoirs pour laisser la parole à l'autre moitié de l'humanité.

Le droit de vote, la possession d'un chéquier, l'accès au travail et aux études supérieures se dessinent dans cette 2ème moitié d'un siècle de toutes les fureurs pour les femmes qui tentent d'exister.

Une jeune journaliste, Camille intervient dans une émission de radio pour parler de ses recherches sur Simone Veil. C'est alors qu'elle entre littéralement sur scène, une Cristiana Reali incarnant jusqu'à la fascination les traits de Simone Veil. Tailleur, visage encadré par des cheveux tirés, elle en est la porte parole troublante, lui permettant de la faire revivre le temps d'une scène, d'une tirade, d'une larme.

Dans une mise en abîme incroyable, l'actrice offre son corps et sa voix à l'expression d'un passé toujours présent.

C'est bouleversant, d'autant plus que les auteurs ont évité le pathétique des situations extrêmes pour faire sonner les mots justes d'un éveil de la conscience. 

Cette pièce est d'utilité publique, elle enchante l'esprit et donne le ton d'un regard sans concession mais jamais misérabiliste sur les pages troubles qu'ont vécu nos anciens. C'est aussi une leçon salutaire pour tous ces jeunes qui imaginent des vérités multiples au fil de ces réseaux où tout peut se dire, même l'inconcevable.

Oui l'être humain a une valeur, oui, il y a des principes auxquels on ne peut et doit déroger et Simone Weil, l'effrontée, nous porte vers un éveil de la conscience bien salutaire.

Et comment ne pas terminer par une plongée dans les arcanes du mémorial de la Shoah. Quand les mots de la pièce résonnent encore en nous et que nous découvrons ces bribes de l'horreur. 76 000 noms de victimes, portraits infinis de visages où les sourires nient l'horreur qui arrive à marche forcée, débris et oripeaux d'étoiles jaunies, vestiges d'une vie projetée dans le vide, photos de charniers et corps décharnés.

Oui le drame des juifs nous concerne, oui, nous nous devons de ne jamais oublier que "La Bête est toujours vivante" et qu'il suffit de si peu de choses (l'actualité nous le démontre tous les jours) pour que l'horreur fige à jamais le sourire des enfants ! 

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Pas de deux sur La Croisette : entre l'Europe et l'Afrique !

Publié le par Bernard Oheix

Aimé Ouédraogo est un personnage étrange, lunaire et flamboyant, exubérant mais pudique, toujours sur le chemin d'une danse qui parle au corps en invoquant l'esprit.

Créateur avec une équipe de bénévoles du Festival des 2 Terres, pont entre ces 2 continents qui l'habitent et  donnent un sens à sa vie, il avait depuis 3 ans dû mettre en sommeil le Festival pour cause de Covid.

En ce 22 avril 2023, dans la salle Miramar de Cannes, le Festival renaissait de ses cendres devant un public avide de renouer avec les fils d'une histoire en train de se forger, entre le Nord et le Sud, entre le noir de la peau et la blancheur de l'âme.

Après une après-midi de stages de danse, l'exposition des tableaux de Manuela Biocca et afin de sceller une convivialité de circonstance, un apéro délicieux, (verrines de taboulet et de betteraves accompagnées d'un verre de gingembre particulièrement corsé), la soirée pouvait commencer par un solo de Patricia Lionel chorégraphié par Aimé Ouédraogo. Mécanique des gestes, brisure des lignes, silence sépulcral pour cette mise en image d'un texte écrit par la danseuse portant sur les violences faites aux femmes. Un moment d'intense sensation ou le corps féminin se plie au désespoir d'un lendemain qui ne chante pas.

Le 2ème ballet sera d'inspiration ivoirienne avec une danseuse, Aminata Traoré déconstruisant la danse traditionnelle pour reconstruire un univers où le corps doit s'adapter aux balises d'un univers qui change. Fort et puissant.

La jeune compagnie Unidanse de Puget sur Argens enchaine alors avec La Valise, une oeuvre portée par l'énergie et la grâce d'une dizaine de jeunes danseuses à la recherche de leur passé, de leurs moments de vie symbolisés par ces valises que nous emportons avec nous et qui contiennent nos rêves et nos espoirs, nos déceptions et nos regrets.

Des danseuses éblouissantes dans une chorégraphie enlevée qui leur permet, entre le classique et le moderne, de développer toute la game des émotions qui touchent le public, du rire aux larmes.

Ange Kodro Aoussou-Dettman, est la chorégraphe et l'interprète (Ivoirienne et Allemande) d'un solo intimiste sur le péril encouru par les femmes quand elles donnent la vie, situation tragique que trop d'entres elles subissent dans un univers où leurs blessures sont acceptées comme une fatalité par une société qui refuse de partager leurs souffrances.

Enfin pour terminer ce cycle danse, la 5ème pièce, création d'Aimé Ouédraogo, offrira somptueusement Hors-Ligne. Un solo avec un mannequin en alter ego, des jeux d'ombres et de lumières où sa silhouette se découpe et sculpte l'espace, des mouvements fluides se heurtant à la mémoire de ceux qui peuplent nos souvenirs. Une oeuvre magistrale esthétiquement, entre la fluidité et l'ambiguïté, avec des plages de sons qui déchirent le silence et des flashs qui transpercent l'obscurité.

 

Et pour terminer en musique, après Moe Gin, un duo chant/guitare flamenco aux accents pop-rock, 2 tunisiens, Salah el-Ouergli et Medhi Belhassen, nous emportèrent avec ivresse dans une musique de transe, le Stambeli, guidant le public dans les interstices d'une raison captivée par les accords et percussions sertissant les voix des chanteurs d'une mélodie envoutante. Cet art musicolo-thérapeutique (comme celui des gnawas), est en train de sombrer dans l'oubli mais tant que des musiciens peuvent encore l'offrir aux oreilles d'un public même non-averti, alors le stambeli existera toujours pour le bonheur de ceux qui ont eu le privilège de l'entendre, un soir de Festival, entre 2 Terres, à Cannes, la ville de tant de lumières !

À l'an prochain donc, pour le Festival Les Deux Terres où Aimé et sa bande sauront encore nous surprendre et prouver que la différence n'est pas un vain mot, mais bien une valeur à chérir avec tendresse.

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Juan Carmona : la fusion pour l'éternité !

Publié le par Bernard Oheix

Juan Carmona est un guitariste flamenco pour l'éternité et un jour. Virtuose de la guitare, bardé de reconnaissance, dont ce Grand Prix Paco de Lucia remporté de haute lutte sur la scène du Palais des Festivals de Cannes à 20 ans, le Prix Charles Cros, des Latins Grammy Awards et avant tout, la ferveur constante d'un public qui le suit, le pousse et lui permet de rêver ses notes pures qui emportent les spectateurs dans un éther de douceur et de magie.

Juan Carmona qui vient de produire son 12ème album et a été programmé par Sophie Dupont, la Directrice de la programmation du Palais des Festivals de Cannes dans une salle conquise et éblouie par la virtuosité de son groupe. C'est dans un projet muri pendant les deux dernières années autour de Zyriab 6/7 qu'il vous invite. Un personnage qui l'obsède depuis qu'il l'a découvert dans une rencontre déterminante au Festival International de Luth de Tétouan au Maroc où il avait été invité et où il remporta un trophée de plus, le Zyriab des Virtuoses, à la saveur nulle autre pareille d'une rencontre fortuite à travers les époques et les cultures.

Et cela a débouché sur cet album et une tournée somptueuse.

Zyriab est un personnage hors du commun, né en 789 à Mossoul et mort en 857 à Cordoue après avoir traversé les 6700 km qui séparent ces deux régions (d'ou le 6/7 du titre de l'album), entre l'orient et l'occident, à dos de chameau, par des haltes oasiennes, dans une épopée inimaginable pour l'époque. Chassé de Bagdad à cause de la jalousie de ceux qui ne pouvaient accepter son génie musical, réfugié à à Kairouan dont il fut aussi chassé à cause d'un poème frondeur, il s'établit à Cordoue, accueilli princièrement par l'émir Abd al-Rahman où il vécu les 30 dernières années de sa vie dans le luxe. Musicien il a inventé la forme moderne de l'oud en y rajoutant une 5ème corde et il est considéré comme le père de la musique arabo-andalouse.

Mais le musicien Abu Hassan Ali ben Nafi, dit Zyriab, est aussi un lettré, poète, astronome, géographe, un homme  qui influença l'art de vivre en Andalousie et dont les découvertes ont bouleversé les cultures de ce IXème siècle qui allait ouvrir un nouveau millénaire. 

C'est ce personnage de légende trop méconnu qui a percuté l'univers de Juan Carmona, un gitan doué du talent de comprendre le monde et de l'interpréter avec des notes de musiques cristallines. Il fait nul doute que si Zyriab avait été génois ou vénitien, son nom serait devenu le symbole d'un aventurier à l'égal d'un Marco Polo ou d'un Christophe Colomb... mais il était né dans un petit village du mauvais côté de la Méditerranée !

Alors, courrez acheter cet opus de Juan Carmona. À son écoute vous allez partager un univers fascinant de fusion entre la musique orientale et le flamenco. En cette période ou l'obscurité tente de noyer le génie des hommes, vous pourrez partager un moment d'écoute de ceux qui marquent la différence comme une valeur positive.

Et si vous en avez la possibilité, prenez un billet pour assister au spectacle dans une salle, vous allez vivre un voyage intérieur en résonance avec l'épopée de ceux qui font l'histoire, les découvreurs, les magiciens du temps présent.

le groupe est somptueux avec deux percussionnistes aux tonalités différentes, un clavier, un oud et la guitare de Juan Carmona. Deux chanteurs, un de flamenco et l'autre orientaliste vont rivaliser d'audace dans une complémentarité de génie. Un danseur de flamenco sertira ses notes dans un écrin de beauté.

Alors, à vous de jouer votre partition intérieure et très longtemps après, vous aurez encore cette musique entêtante comme des vagues pour vous bercer du rêve d'un monde meilleur.

Et si vous voulez les contacter, Nomades Kultur se tient à votre disposition. Cendryne Roé, au gout si sûr, qui partage la vie et les rêves de Juan Carmona, saura répondre à vos questions.

Hasta Luego Compañero !

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Tableau d'une exécution.

Publié le par Bernard Oheix

Depuis l'ouverture de la scène 55 à Mougins, avec sa magnifique salle de 600 places, René Corbier, le Directeur Artistique propose une programmation d'une extrême richesse, son goût sûr fait merveille et allie le jeune spectacle et les valeurs plus confirmées, les découvertes et les propositions sont multiples, faisant de ce lieu, une incontournable étape avec Antibes, Cannes et Grasse.

René Corbier, ex-directeur de la culture à Cannes, mon collègue et ami des années Palais des Festivals, cultive les amitiés fidèles, respectueux et toujours ouverts, bienveillant envers les artistes et créateurs qui lui rendent bien les soins qu'il a pour eux.

C'est à Cannes, à la représentation d'une pièce sur le Festival du Film (Cannes 39/90, une histoire du Festival par la compagnie Y dont je vous reparlerai) que nous nous sommes retrouvés et qu'il m'a proposé de venir découvrir une artiste, Agnès Regolo qu'il suit depuis des années et accompagne dans sa dernière création avec sa compagnie Du Jour au Lendemain : Tableau d'une exécution avec 4 jeunes comédiens de l'Erac (École Régionale d'Acteurs de Cannes) dans sa distribution.

J'avoue que je ne savais pas ce que j'allais voir mais un spectacle reste un moment unique de découverte et qu'il soit programmé par mon ami Corbier était une bonne motivation pour être présent en ce mardi 15 novembre à 20h30 dans la salle au moment où le rideau rouge se lève !

 

Le peech du programme : "Préférée à tous ses confrères peintres, Galactia est désignée par le Doge de Venise pour peindre la fresque monumentale célébrant la victoire des Vénitiens sur les Turcs (La bataille navale de Lépante au XVIème siècle)."

Pendant 1h30, nous allons être suspendus à une mise en scène éblouissante sertissant un texte sublime de Howard Baker, écrivain poète britannique encore vivant, qui interroge les rapports entre l'Art et le Politique, l'artiste et le pouvoir, la place des femmes et le pouvoir de l'image. 

Il y a une modernité dans cette pièce qui interroge le passé pour parler de notre présent. Galactia jouée par l'étonnante Rosalie Comby, porte sur ses épaules toutes les interrogations majeures de notre société contemporaine : le pouvoir et la culture, les rapports homme/femme, l'amour et la liberté, l'argent et la gloire, les convictions et les peurs. 

Les 8 comédiens évoluent dans un décor austère où chaque élément joue son rôle dans une fluidité surprenante : tables qui se transforment en scène, en prison comme en atelier de peintre, lumières ciselées à la perfection qui découpent l'espace, costumes sombres, accessoires minimalistes comme pour mettre en valeur le texte et le mouvement.

C'est du grand théâtre, une force incroyable qui suspend le temps et vous amène à des interrogations fondamentales sans didactisme mais avec sensualité, fait appel à votre intelligence tout en vous plongeant dans un univers d'émotions.

Bravo à toute l'équipe qui a réalisé cette performance sous la direction d'Agnès Régolo, une comédienne qui a été dirigée par les plus novateurs des metteurs en scène avant de devenir, elle-même, depuis 1997, une metteuse en scène avisée qui monte des pièces où la réflexion n'est jamais loin de l'émotion, qui sous l'aspect ludique parle de la noirceur de l'âme et de la beauté de la vie.

Et bravo à toute l'équipe de la Scène 55 qui prouve à l'évidence que l'on peut faire du grand théâtre dans un monde qui s'interroge sur ses propres errements et oublie parfois sa part d'humanité.

 

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Compagnie Kafig : Le geste libéré.

Publié le par Bernard Oheix

Assister en 2022 à un spectacle de la Compagnie Kafig, dans un Grand Auditorium du Palais des Festivals de Cannes plein à craquer, c'est dévorer une madeleine à pleine dent, sans retenue, tout comme les danseurs qui nous portent aux frontières d'un geste libéré, nous renvoient aux délices du temps passé !

Je les avais découvert au tout début de leur carrière, à la fin des années 90, quand Yorgos Loukos programmait le Festival de la Danse en nous surprenant à chaque édition de quelques pépites dont il avait le secret. Mourad Merzouki apportait un regard neuf sur cette étrange danse née sur les trottoirs de broadway et tentait de lui donner ses lettres de noblesse dans un paysage chorégraphique en pleine mutation entre le classique et le moderne.

Puis le temps a passé, ils se sont installés dans le paysage de la danse contemporaine, devenant le CCN de Créteil et du Val de Marne, obtenant les moyens de leurs ambitions, la reconnaissance de leurs pairs et des institutions.

Cette normalisation aurait pu les mener sur les chemins d'un certain académisme, d'un entre soi dont la victime aurait été cette créativité, cette liberté sans mesure, mais Mourad Merzouki avait en lui la passion du geste et loin de s'affadir et de se normaliser, son expression se nourrit des mutations et s'enrichit de son expérience et de ses confrontations, devenant une des compagnies les plus populaires, tournant sur les scènes d'un hexagone fasciné par la démesure de ses propositions.

Compagnie Kafig : Le geste libéré.

Dans Zéphir, le spectacle accueilli par Sophie Dupont, la Directrice de l'Évènementiel du Palais des Festivals de Cannes, le rideau s'ouvre sur une scène fermée par des cloisons marrons, percées de trous par lesquels les danseurs apparaissent et s'évanouissent en se fondant dans le clair obscur d'un espace clos.

Le premier tableau met en scène les 10 danseurs qui tentent de créer une unité, entre les performances individuelles quand ils s'extirpent du groupe et le collectif qui les assimile en les ramenant vers la masse compacte et mouvante des interprètes.

Dans cet espace, les ouvertures originelles par lesquelles les danseurs sont apparus vont se transformer : des ventilateurs aux pales blanches brassant l'air, envoient un souffle qui sculpte le groupe de danseurs.

Par la suite, l'utilisation des lumières et de la fumée transfigure la scène en un espace où tout est possible, disparitions, découpages des corps vibrants, projections sur les danseurs qui hachent l'espace de leurs gestes mécaniques et souples, un univers de la déraison qui enflamme le public.

Le dernier tableau va permettre à d'immenses voiles aériennes d'ensevelir les danseurs dans des masses indistinctes, une princesse en habit émergeant du groupe pour tenter d'harmoniser le chaos. C'est à couper le souffle, un spectacle haletant où les corps se fondent dans la nuit, où les gestes rappellent à la vie, où les couleurs, les sensations et le rythme imposé donnent le vertige.

La partition musicale est exceptionnelle, mixant le moderne au classique, les décors fastueux et les acclamations finales du public en une "standing ovation" méritée, une juste récompense pour la performance individuelle et collective d'un groupe qui apporte le doute à nos certitudes.

Bravo à la Compagnie Kafig, à Mourad Merzouki son Directeur Artistique et chorégraphe, aux danseurs funambules qui nous prennent par la main pour ne plus nous lâcher dans ce pays des songes d'un spectacle hors-norme !

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