Maligne
Avez-vous remarqué que ce cancer que votre docteur a décelé chez vous est toujours petit, selon lui ?
Bon, je n’imaginais pas prendre du plaisir à un spectacle sur cette maladie... Quand un ami m’a proposé de m’inviter à la Pépinière du Théâtre pour assister à la révélation de la saison, je me suis interrogé : avais-je vraiment envie de découvrir l’univers de Noémie Caillault se replongeant dans l’histoire authentique de sa lutte contre son cancer du sein ?
C’était pas gagné et pourtant !
Longiligne jeune fille au charme adolescent, elle s’impose dans un spectacle aux saveurs troubles. Comédienne amateur, elle se repose sur une vraie nature, sur une personnalité exubérante, et un texte tiré au couteau, écrit au fil des sentiments diffus d’un sujet hors norme ! Comment émouvoir sans pathos ? Comment faire rire de l’atroce ? Elle y parvient avec une élégance suprême, un sens du timing et du placement naturel.
Quelques chaises en vague décors, des mouvements perpétuels, comme pour vaincre la peur de l’immobilité définitive que cette annonce provoque en elle, un cancer du sein...
Par petites touches, elle progresse vers sa rémission, mammographie hilarante, chimiothérapie rocambolesque, hospitalisation avec notes étoilées pour les différents établissements qu’elle va fréquenter assidûment, regards des autres et observations si juste de soi-même !
Les cheveux qui tombent, le rapport désopilant à une mère omniprésente qui en veut presque à sa fille de lui infliger son cancer et ne sais comment intégrer ce paramètre dans ses rapports avec elle, les amis qui ne savent comment se situer, en parler où pas, consoler où provoquer, tout y passe d’un alphabet de l’incongrue et du dérisoire, bréviaire indispensable pour ceux et celles qui, comme nous tous, savent que la frontière est ténue entre l’aujourd’hui et un lendemain d’horreur !
Noémie Caillault a du talent et elle parle juste de ce qu’elle connait trop bien. Elle nous donne une grande bouffée d’espérance et la certitude que rien n’est jamais prévisible. Qui aurait parié un kopeck sur une carrière de comédienne flamboyante à l’heure d’un bilan de santé au ciel obscur.
J’ai ris et j’ai été ému, comme tout le monde dans une salle bourrée à craquer où le silence alternait avec les rires, où le sacré se heurtait au trivial, la vie contre la mort. Vaincue par sa force vitale et son retour parmi les vivants pour une seconde vie. Elle nous offre un beau cadeau, la possibilité de réfléchir avec légèreté aux choses essentielles qui nous hantent !
Et moi je garde d’elle, la certitude qu’un mal peut déboucher sur un bien, et qu’une destinée se forge dans l’adversité et que le grand livre des humains ne se clôt jamais sans qu’une surprise ne soit possible !
Merci Noémie de m’avoir redonné de l’espoir devant la nuit qui tombe !