dernieres images de mon Afrique
Comment revenir à la réalité ? Un mois en Afrique et le retour avec l’impression d’une aventure hors du commun, sur les bas côtés des sentiers battus, un soupçon d’ivresse pour cette plongée dans l’Afrique profonde.
Dans notre road-trip, il y avait ce zeste d’aventure d’une traversée en voiture de Dakar à Bissau, ces moments forts qui nous plaçaient en marge d’un voyage classique. Le bac de Banjul avec ces attentes interminables et son incertitude permanente, les frontières et leurs contrôles incessants avec leur rituel du « billet » offert aux gardes pour acheter la paix d’une poursuite. L’armée sénégalaise qui ferme la Casamance la nuit à cause des troubles causés par des affrontements violents entre coupeurs de bois précieux et nous laisse en rade à Diouloulou aux mains salvatrices d’une bande de curés nous accueillant avec un Jack Daniel réparateur. Il y a aussi un repas avec l’évêque de Bissau, ex-combattant de l’indépendance, homme de coeur et d’une intelligence avisée dans un pays de ruines. Et ce canot qui fonce dans les embruns à travers la baie de Bissau et son archipel des Bijagos de 88 îles, se glisse entre une flottille de bateaux chinois occupés à piller les fonds poissonneux pour arriver à Angurman où nous vivrons à l’heure des marées, seuls occupants d’un îlot à la végétation luxuriante, Robinson des temps modernes découvrant les charmes d’une vie sans Internet ni Wifi !
Jamais, dans ce périple de centaines de kms sur des routes dévastées par les rigueurs d’une nature en révolte, de saisons de pluie qui ravagent les infrastructures, nous ne sentirons la peur ou un danger réel, tout au plus une sourde angoisse dissipée par les rires des interlocuteurs et la gentillesse profonde des locaux, même dans les moments les plus difficiles.
Il reste avant tout, l’extraordinaire accueil des habitants. Pas une personne qui ne nous saluera d’un franc « -Ca va bien ? » agrémenté d’un sourire jovial, pas une qui ne nous lancera une oeillade complice comme pour nous remercier de partager un moment de leur vie si dure ! Et le sourire malicieux des enfants comme le signe d’un bonheur immédiat et sans calcul !
Car ne nous y trompons pas, leur existence est partagée entre les difficultés quotidiennes pour obtenir les moyens de subsister et l’extrême désorganisation d’une vie sociale où la corruption générale ronge les espoirs d’un avenir meilleur.
L’incurie et l’absence de perspectives gangrènent le tissu social jusqu’à nous faire perdre confiance.
Imaginez cette savane si belle et majestueuse où les baobabs se dressent en griffant l’horizon de leurs branches décharnées avec des amoncellements de plastiques comme un cancer que rien ne peut entraver. Dans les champs, autour des villes, au milieu des habitations, des zones entières infectées de ces immondices imputrescibles, entretenues par le comportement des pouvoirs publics incapable de faire appliquer l’interdiction des sacs plastiques prises il y a plusieurs années. Et quand l’on voit des « Auchan » les distribuer aux caisses et enrichir sans cesse ce « léviathan » de la pollution, on a honte de laisser ce monde agoniser sous le poids de nos turpitudes.
Si l’on devait terminer par quelques flashes, on peut décrire ces pays de l’Afrique Noire comme un gigantesque laboratoire des drames qui nous attendent. Des zones entières sont en train de disparaitre, mangroves dévorées par la montée des eaux inéluctable et déjà perceptible, exodes des populations vers des villes polluées sans perspectives, désorganisation absolue qui mènent à l’éclatement des valeurs de la famille, économie pillée par les néo-coloniaux venant se servir sur la bête sans renvoyer l’ascenseur.
Le pays est parsemé de maisons inachevées, de ruines abandonnées, et les voitures exportées de l’Europe, brinquebalantes y vivent une énième vie de misère en dégageant des nuages polluants de gaz toxiques.
Et pourtant ! Les habitants sont beaux et gentils. Les tenues de football sont les habits communs avec une prédilection pour les grands footballeurs espagnols et portugais même si l’on voit Neymar prendre sa place dans ce concert des stars qui font rêver les jeunes sur des champs de fortune avec des ballons ayant largement passés leur date de péremption.
Il y a ce curé miracle sénégalais qui nous accompagnait, Albert, pêcheur de thiof (un succulent poisson que nous dévorerons matin, midi et soir en grillades savoureuses !) qui enfilait sa soutane dans les moments les plus chauds et accomplissaient des miracles pour nous extirper de situations inextricables…
Il y a le temps différent, les heures éternelles, les nuits au ciel constellé, les marées comme rythme d’une vie sans attache.
Il y a le sourire et la beauté des femmes pour balayer les nuages et entretenir l’espoir !
Il y a l’Afrique éternelle et les rythmes d’une musique envoutante que Rita paradis, notre voisine à la Saumone, nous offrait en gage d'amitié.
L’Afrique où l’espoir en partage !