Festival du Film 2018... Un début en fanfare !
12 films et déjà une impression d’être au centre du monde du 7ème Art, qualité au rendez-vous des cinéphages, films intéressants, voire passionnants dégustés sans retenue. Le festival semble bien parti, puisse-t-il tenir ses promesses et continuer à nous emmener vers ces chemins de traverses qui nous font voyager au coeur des hommes et à travers les paysages si divers de notre planète, celle des sentiments d’une urgence à mieux lire ce monde.
De cette ouverture, nous pouvons retenir la qualité avérée du cinéma des antipodes avec deux films australiens et un superbe court métrage. That’s not me réalisé par Grégory Erdstein est l’histoire de deux soeurs jumelles dont l’une réussit à devenir une star pendant que l’autre doit assumer son rôle de doublure frustrée. La légende de Ben Hall de Matthew Holmes est tirée d’une véritable histoire et se situe plus classiquement sur le terrain d’un western Australien. Ben Hall, l’ennemi public numéro 1, détrousseur de diligences et de convois d’or, dans une dernière randonnée sauvage, va tenter de fuir et d’échapper aux forces qui le traquent.
Un court métrage The Dam (Brendon McDonnel), va introduire ce qui semble être le thème de cette 71ème édition du Festival de Film de Cannes : l’homosexualité. Deux jeunes se baignent dans la mer, 40 ans plus tard, ils se retrouvent au crépuscule de la vie et vont dans un dernier round, tenter de renouer les fils de leur histoire afin de la comprendre. 3Trois bijoux qui montrent à l’évidence combien ce cinéma des antipodes est riche et mérite d’être plus reconnu.
Sur le thème des amours lesbiens et homosexuels, nous allons enchaîner avec Sauvage (réalisation Camille Vidal-Naquet) de la semaine de la critique (1er ou 2ème film), remarquable portrait d’un enfant perdu, prostitué, drogué, malade. Sans affect, il va plonger vers son destin sans pouvoir saisir les mains qui se tendent pour le sauver. troublant. Plus classique le Plaire, aimer et courir vite de Christophe Honoré en compétition. Un écrivain précieux dévoré par le sida rencontre un jeune et va tenter de résister à la passion d’un dernier amour. Magnifiquement interprété par Pierre Deladonchamps et un surprenant Vincent Lacoste, le film se penche sur cette époque où la maladie emportait les uns après les autres ceux qui avaient osé transgresser la norme. Académique mais élégant !
Pour cette compétition officielle, les premiers films visionnés sont porteurs d’enthousiasme cinéphilique. Todos lo saben (Everybody Knows) avec le couple charismatique (Pénélope Cruz/Javier Bardem) dans une réalisation de l’iranien Asghari Farhadi, est un bijou esthétique, sensuel, dramatique, formidablement mis en scène et interprété ! Jubilation !
L’été du banni russe Serebrennikov se penche en noir et blanc sur les années 80 et l’irruption du rock et du punk dans la société des jeunes russes. Le corset de l’histoire va exploser dans une mise en scène échevelée où l’art graphique vient compléter cette découverte de la liberté déclinée sous toutes ses formes, y compris celle d’un amour partagé entre une femme et deux rockers. Yomeddine de l’égyptien Abu Bakr Shawky est un road movie où deux exclus, un lépreux et un orphelin nubien, vont partir à la recherche de leur passé. Sublime portrait rempli d’espoir, où le drame côtoie en permanence l’humour, où la force de vie est plus importante que toutes les forces du mal. Le jeu des deux acteurs amateurs est époustouflant et les couleurs d’une Egypte de la tolérance se dessinent entre les lignes de fracture d’une société enfermée dans ses peurs.
Artic de Joé Penna est un huis clos dans l’immensité glacée du pôle. Un homme perdu dans les neiges va tenter de survivre en sauvant une inconnue en puisant dans sa force et ses limites extrêmes imposées par des conditions surhumaines. Mads Mikkelsen est éblouissant, seul acteur quasiment d’un Robinson Crusoé des glaces éternelles.
Petra de Jaime Rosales est d’un académisme troublant, en rupture avec le sujet horrible qui en est la trame. Lent glissement où une jeune femme recherche son père (un odieux sculpteur célèbre) et qui débouchera sur des secrets de famille entrainant un suicide et un meurtre. Quand le silence comme les paroles peuvent tuer !
Rafales de films, rafales d’espoir. On attend avec gourmandise les films qui suivent. Le cinéma est toujours cet art de tous les mystères, capable de nous surprendre et de nous émouvoir ! Vive le Festival du Film de Cannes !