Le grenier de la mémoire 19 : petite pause en mouvements !
Dans le moove... toujours ! Entre deux concerts et une multitude de spectacles, un travail prenant et dévorant, quelques livres, les enfants à faire grandir, une vie sociale riche... somme toute le quotidien de nombre d'entre nous, il y avait le sport comme une religion ! Transpirer avec son corps pour faire respirer sa tête et évacuer le stress !
Accepter de souffrir pour maintenir un fragile équilibre dans sa mécanique intérieure !
J'avais toujours pratiqué une activité physique. Jeune footballeur (gardien de but à tendance passoire à l'USCBO), (presque) brillant handballeur adolescent (avec Aschieri comme mentor et Puleo comme capitaine accédant à la Nationale 3), puis cycliste sans panache (quoique !) sur les routes goudronnées azuréennes...
C'est à Bourg en Bresse, à cause de mon toubib que je suis reparti de plus belle sur mon deux roues ! Patrick Petitpoisson, en plus d'être mon voisin, ami et mari de ma secrétaire à la MJC de Bourg, m'a convaincu de ré-enfourcher mon destrier afin de parcourir les monts du Jura, les routes sinueuses du Bugey, de longer les chemins des étangs des Dombes ! Cadre paradisiaque doublé chez mon ami d'une envie de conquête pour partir vers les frontières de nos limites !
C'est ainsi qu'il m'emmena, accroché à sa roue vers de nouveaux horizons . Cela a commencé timidement par un Bourg en Bresse/Cannes via Grenoble, le Vercors et la plongée vers la Méditerranée en 2 étapes ! C'était notre cadeau, un pari que nous avions fait pour le mariage de mon frère : descendre en vélo pour célébrer ses noces ! Nous avions belle allure en embrassant la mariée avec nos cuissards moulants sur des muscles roulants !
Et puis on est passé aux choses sérieuses !
De Bourg à Budapest : deux semaines sur la selle, 100 à 120 kms par jour, les cols Autrichiens comme arbitre de notre volonté !
Venise-Gdansk, un bain dans la Méditerranée chaude au départ, un bain dans l'eau glacée de la Baltique à l'arrivée. Et entre les deux, l'inconnu !
Et bien sûr, entre deux grandes expéditions, les tours de Sardaigne, de Corse, des randonnées dans le Sud-Ouest...
Mais c'est bien plus tard que je me suis rendu compte de l'erreur que nous avions fait. Un jour, en lisant mon Libération quotidien, je suis tombé sur cet article, et j'ai tout compris !
Mais ma vie sportive ne se résolvait pas à pédaler dans la semoule ! Très tôt, avec mon père, sur les terrains du Golf de La Napoule, nous avions été initiés avec mes frères au cross ! En 1981, Daniel Veylon, un jeune adjoint au Maire, partenaire de la MJC et ami, m'avait engagé dans un pari : faire le semi-marathon de Bourg en Bresse pour fêter l'arrivée de la gauche au pouvoir ! Il a fallut s'entraîner dans les sous bois bressans. J'y ai découvert l'ivresse de ce moment de bascule incroyable, quand la souffrance devient plaisir, que le souffle cesse d'écorcher pour devenir un fluide bienfaiteur ! Ah, endomorphines... quand tu nous tiens !
Et j'ai couru... couru... sans m'arrêter ! (avec la musique, en hommage à Christophe !). Une vingtaine de semi entre Cannes, Nice et Antibes !
Suis pas certain que le style parle pour moi ! Grimace non feinte, allure pataude... pas un seigneur du macadam, plutôt un tâcheron de la souffrance !
Il me restait la natation comme ultime rédemption ! Et je devins donc un grand nageur devant l'éternel ! Faut dire que ma piscine initiale (celle des Campelières avec les cours privés de Martine Cohen pour m'inculquer les rudiments de la mécanique des fluides) se transforma en la plus belle piscine du monde, la Méditerranée, à 50 pas de mon seuil, accessible par tous les temps, (mes voyages annuels en Russie en janvier, avec leurs bains rituels dans la glace, m'ayant rapidement convaincu de la relativité du froid sur l'organisme humain !).
J'ai donc brassé/crawlé et de traversées des îles en traversées de la baie de Cannes, appris à ne pas être le vilain petit canard de la mare aux diables ! C'est dans la mer que je me suis senti pour la première fois capable d'être totalement en phase avec mon environnement même si en quelques occasions, elle m'a rappelé de ne pas la sous-estimer. La frontière est fragile entre la conscience et l'inconscience, entre le calme et la tempête ! Entre la plage de Porto et les rouleaux des vagues qui nous empêchent de revenir, n'est-ce pas mon Angéla adorée !
Et avec tout cela, un seul triathlon de fait à Saint-Laurent du Var ! Deux médailles en chocolat aux Cross de Nice-Matin, des courses avec l'équipe du Palais des Festivals où je n'ai pas flamboyé mais que j'ai terminé avec constance (jamais d'abandon !). Et le plaisir extrême d'avoir reculé quelques limites de mon corps ! Et l'extraordinaire sensation de partage, avec mon père, mes frères, mes amis, de souffrir et d'aimer ensemble pour un combat inutile mais ô combien précieux !
Avec l'espoir, cher Patrick Petitpoisson, d'un dernier challenge que nous avions envisagé et que nous devrons tenir : un Trieste/Cythère par la côte Adriatique... même avec des vélos électriques pour compenser l'âge de nos artères ! Pari Tenu ? Allez, pour cela il faudra se sortir de ce Covid19 à peu près intacts !