Festival du Film : 17 films et après !
Festival du Film 2024, et comme à chaque édition, ce frisson indicible à l'idée de partir sur les chemins de la découverte d'un 7ème Art libéré de toutes les entraves d'un monde sclérosé. Et en cette année 2024, avouons que la lecture de la réalité vaut bien la fiction la plus osée qu'un scénariste qui aurait abusé de produits illicites, puisse imaginer !
Nous nous préparons donc, comme de sages élèves qui auraient bien fait leurs devoirs pour la composition finale : aller au cinéma régulièrement tout au long de l'année, remplir un dossier en février avec une lettre de motivation afin de justifier le privilège d'un badge cinéphile, respecter les consignes de Cannes Cinéma, assister à la présentation, passer des heures sur son téléphone afin de tenter de trouver des places disponibles dans les quotas diminués des cinéphiles, trop âgés et sans intérêts pour les pontes du Festival !
Mais quand la lumière s'éteindra et que le cadre noir de l'écran s'illuminera, toujours cet incroyable sentiment de pénétrer dans une cité interdite où tout devient possible !
17 films en 4 jours, une moyenne raisonnable compte tenu de la présence en mon home d'une horde de cinéphiles venant de Corse, de Bresse et de Paris (sans badges, eux qui depuis plus de 10 ans débarquent sanglés de leur sésame mais que les contraintes actuelles condamnent à voler des places en catimini !).
Mais le nombre de films ne fait pas la qualité et du 15ème au dernier de ce matin, la sortie précipité après 30 minutes de projection, pour les 3 films... un chinois incongru de femmes qui chantent pendant une demi heure sans que ne se dessine la moindre esquisse d'un scénariste au travail, Rumours avec une pléiade d'acteurs (Kate Blanchet, Ménochet...) singeant un G7 improbable et qui ne cultive que l'ennui et le désir de vrais morts-vivants, et enfin Les reines du drame où des trans exacerbées se pelotent sans retenue et sans aucun espoir d'attirer notre attention !
Bon, mais heureusement, il y a aussi de bons films, de ceux qui touchent et nous donnent la certitude qu'une équipe s'est soudée afin de transmettre un message, une humeur, un désir de faire et de partage.
C'est le cas avec Les Fantômes de Jonathan Millet, (Semaine de la Critique) une fiction qui plonge dans les horreurs de l'après guerre de Syrie. Un commando secret traque les tortionnaires qui ont tué et violé au nom de la loi de Bachar... Une quête douloureuse, complexe et dangereuse qui nous attire dans sa toile et ne laisse pas indifférent. C'est aussi avec La femme à l'aiguille, (en compétition), le destin tragique d'une femme qui se retrouve complice dans un traffic d'enfants, un film saisissant et prenant qui pose le problème de ces naissances non désirées et débouche sur l'horreur du sacrifice. À voir absolument !
Vingt dieux, (Un certain regard) un premier film de Louise Courvoisier est une ode à l'amitié et à l'amour. Totone se retrouve en charge de sa petite soeur de 7 ans et décide de créer son propre fromage, un comté de qualité grâce à des expédients (vol de lait, recettes à dénicher et une bande de copains soudés autour de son projet fou. Film fort et fascinant sur la vie dans un village, l'espoir et le désespoir, l'amour et la lutte pour survivre. Nul doute que la caméra d'or ne sera pas loin de cette oeuvre sans complaisance aux relents de la vie de ses campagnes sans espoirs.
La mer au loin (semaine de la critique), de Saïd Hamich Benlarbi est une ode à l'espoir. Des clandestins sans papiers vivent à Marseille et un marocain va rencontrer l'amour auprès d'une Anna Mouglalis, sublime. Un retour au Maroc pour solder sa rencontre va dérégler son amour mais le film se terminera sur le bonheur d'accepter de n'être ni Marocain, ni Français, mais simplement un homme qui s'accepte et décide de prendre sa vie en main auprès de celle qu'il aime, sans frontières désormais !
La prisonnière de Bordeaux de Patricia Mazuy (Quinzaine des cinéastes) réunit Isabelle Huppert et Hafsia Herzi dans une ode à l'amitié, à la volonté de s'émanciper de deux femmes qui croisent leur chemin dans le hall d'une prison où elles viennent visiter leur conjoint respectif. Un film élégant, intelligent et qui offre deux facettes de la vie de femmes qui tentent de trouver un sens au séisme déclenché par des hommes de pouvoir qui les laissent seules pour trouver une solution à leur destin tragique !
Notons qu'après avoir été gardienne de prison dans Borgo, Hafsia Herzi est cette fois-ci, visiteuse de prison, et que son parcours dans le cinema devra un jour s'émanciper des portes des pénitenciers ! On l'espère pour elle tant c'est une actrice remarquable et touchante d'une grâce visuelle magique !
Il y a tant d'autres films dont on pourrait parler, et aussi tous ceux que l'on a pu voir. Mais il reste encore 6 jours de Festival pour dévorer d'autres oeuvres et la certitude de trouver des pépites qui nous ferons rêver d'un monde meilleur ou les êtres pourront s'émanciper de leurs chaines et atteindre un peu de ce bonheur qui nous tend les bras et que nous tentons de saisir désespérément.
Alors, je vais me précipiter vers Le Limonov de Kyril Serebrennikov en espérant m'embarquer pour un long voyage sur les traces d'un poète hors du commun !
Vite, le cinéma m'attend !