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Mon destin

Publié le par Bernard Oheix

Cela faisait un petit moment que je ne vous avais point offert une de ces nouvelles que j'aime, de celles qui puisent leur inspiration dans ces failles qui m'inspirent, dans le décalage entre la réalité et sa perception... Vous verrez, on est au coeur du sujet !

 
A Erwan Bonthonneau, mon complice en écriture.
 
 
 Entre les certitudes et les croyances, il y a un chemin de traverse, une passerelle si ténue que nombre d’entre vous ne la percevront jamais, qui peut vous mener de la nuit à la clarté, un guide vous autorisant à plonger du rationnel vers le monde fantastique. Cette faille, si vous n’êtes pas prêts à l’intégrer dans votre vie, alors fermez ce livre, arrêtez de lire, vaquez à vos occupations et cessez de vous interroger pour vous contenter de regarder le temps s’écouler et vous rapprocher toujours plus de votre destin : une mort au travail, inéluctable et si précoce. Mais si vous êtes prêts à l’emprunter, s’il y a suffisamment de folie dans vos gènes, alors continuons ensemble, je sais que vous comprendrez mon histoire, qu’elle vous touchera dans votre conscience, qu’elle réveillera des souvenirs si anciens cachés dans votre propre vécu.
Moi, j’ai su deviner l’avenir, ma mémoire au passé portait mon devenir et je sais d’ores et déjà dompter les vagues montantes qui inscrivent en lettres de feu ce qui doit advenir, ce qui va m’arriver…et ce que j’entrevois ne me plait pas, me fait peur, me donne la nausée, mais c’est ainsi, je dois l’accepter. Je me plie à cette logique même si mon corps la refuse, même si ma tête résonne des hurlements engendrés par la terreur née de cette vision si claire, si évidente, qu’il n’y pas d’alternative et que je ne peux qu’être passif. Je n’ai pas envie de clore ce chapitre, je veux encore en écrire quelques pages.
 
Comment vous expliquer ? On peut imaginer plonger dans les racines d’un irrationnel de pacotilles, divinations nées d’un don que la nature offre à certains pour en priver la grande majorité, issue de la nuit des temps, vestige de la perte par l’homme de sa part divine, comme une malédiction des dieux envers cet être si imparfait qu’il a créé à son image. Marabout, vaudou, incantations dans les effluves d’essences d’herbes inconnues, absorption de produits divers portant le cerveau vers les rives de la divination, séances soufiques que le rythme obsédant transcende, cœur de poulet et marc de café, rêves aux clefs multiples que l’on décrypte en tentant de percer les mystères de la nuit…
L’homme s’est affranchi de ses liens et a voulu grandir sans regarder autour de lui, comme si, à l’évidence, le temps de la maturité était celui de cette libération de ses peurs les plus secrètes. Il n’a eu de cesse de s’émanciper de la tutelle des dieux pour se confondre avec l’être suprême qui l’entravait et lui ôtait ce libre arbitre auquel il aspirait. C’était ainsi et je ne me posais pas de questions, je vivais au jour le jour quand bien même ma part d’ombre envahissait de leurs ténèbres ce fil qui me reliait à ma réalité.
 
Tout avait commencé le plus banalement du monde. Je faisais mes études, normalement, loin de cette brillance qui caractérisait nombre de mes collègues, attentif à réussir et me placer dans ce grand peloton humain qui, de ma famille vers mes amis, me menait vers une classe d’âge qui nous réunissait pour apprendre, nous gorger de savoir et trouver notre place dans ce troupeau composite d’une humanité en marche vers le troisième millénaire. Tout au plus louait-on ma perspicacité, une capacité innée à m’échapper des sentiers battus pour trouver des solutions originales et arriver au même but que mes congénères sans passer par les passages obligés de cet apprentissage. J’étais au fond, terriblement banal et totalement atypique, définition qui pouvait correspondre à tant d’individus que je réussissais à me fondre dans la masse sans détonner le moins du monde.
C’était sans compter mon horloge biologique, un faisceau convergent de gènes qui s’étaient éveillés à la vie et qui envahissaient mon cerveau, juste quelques ricochets sur l’onde étale de mes sentiments. Rappelez-vous cette expérience que nous avons tous partagée d’un subtil décalage introduisant la sensation de percevoir concrètement ce qui est en train de se dérouler. Cela s’apparente au cinéma, quand l’image se trouble, quand la pellicule saute et qu’elle se dédouble : vous êtes dans l’instant unique du vécu et vous le percevez en surimpression comme si c’était déjà arrivé, comme si vous pouviez relire le monde…et tout recommencer. Chacun à un moment de son existence a pu partager cette sensation et émerger, sonné de cette vague abstraite qui vient percuter vos certitudes en dévoilant un monde souterrain où rien n’est impossible. Ce qui est un accident chez vous, ce qui intervient comme une césure paradoxale de votre rapport au monde était mon quotidien, un état permanent, une façon de vivre, un continuum qui intercalait le passé et le futur en un affrontement permanent que j’ai dû apprendre à dominer pour survivre.
Ma raison vacillait entre les deux pôles de cette tension et j’oscillais sans cesse entre un moi passé et un moi futur, entre celui qui sait ce qui va advenir et celui qui vit l’histoire, entre la divination instinctive et la mémoire écorchée du futur. Le monde n’est pas toujours beau à revivre à l’infini quand vous ne pouvez le transformer et que vous êtes condamné à le subir sans pouvoir le changer. Il est bien là le problème, ne pouvoir influer sur votre destin puisque vous ne relisez qu’à l’infini votre propre histoire, l’impression étrange de comprendre ce qui survient tout en ne pouvant intervenir. J’ai grandi avec cette épine dans l’âme, une écharde qui s’enfonçait toujours plus dans les chairs à vif de mes sens exacerbés. C’était ainsi.
Au fil du temps, cette perception s’est affinée, mes deux personnages, celui qui vivait et celui qui avait déjà vécu les évènements, campaient face à face avec toujours plus de netteté, un intervalle se créant entre ces deux pôles de mon appréhension de la vie. De la vision trouble initiale, je suis passé insensiblement par un jeu de focale inconscient, à la maîtrise absolue de ce processus qui libérait un intervalle et me permettait progressivement d’intervenir sur le déroulement de l’histoire. C’est ainsi que j’ai commencé à transformer la réalité et à apporter des réponses qui modifiaient mon présent.
A l’époque, adolescent, nous jouions avec mes frères et sœurs à un jeu qui faisait fureur dans notre famille. Passionnés de cinéma, nous nous gorgions de films programmés en continu sur les chaînes de télévision et installés sur le canapé, mon frère aîné lançait le chronomètre au clap de départ. Après 20 minutes, je devais donner les clefs du film, les ressorts du scénario, les noms des tueurs et les ingrédients de l’action. Je n’échouais jamais, aucun scénariste, aucun comédien, quelle que soit la qualité du réalisateur ne pouvait me tromper. Leur talent et leur inventivité se brisaient sur ma sagacité, cet instinct qui m’autorisait une lecture à partir des quelques éléments des scènes d’introduction. Au fond, est-ce si différent de l’aptitude d’un autiste à mémoriser les centaines de pages d’un bottin téléphonique, où d’un jongleur mental qui sent les divisions et les multiplications les plus sophistiquées et donne ses réponses plus vite que la machine sensée aider l’homme à se dépasser. J’étais fier au début de ce jeu qui m’auréolait d’une gloire qui sentait le souffre. Il m’était si facile de lire dans le jeu du comédien, dans les hésitations de son regard, dans l’agencement des séquences initiales, dans l’ossature de l’histoire que rien ne pouvait entraver cette lecture instinctive, cet art d’une « devinance » immédiate échappant apparemment à la logique la plus élémentaire.
En grandissant, avec cette culture que j’ingérais par tous les pores d’un cerveau éponge qui s’imprégnait de son environnement et se musclait de tout ce qui se déroulait autour de lui, le jeu a perdu de sa saveur et j’ai mis un frein à cette démonstration vaine de mes ressources cachées. Je commençais à comprendre ce qui se tramait dans les replis de mon subconscient et tentais de le dissimuler, tant cette force qui me portait m’apparaissait comme une source inquiétante d’ennuis qu’il me fallait désormais celer aux yeux des autres.
C’est qu’entre-temps, ces deux êtres qui m’habitaient avaient crû, déployant leurs ailes et prenant chacun une autonomie qui libérait des espaces d’intervention entre eux. Un signe prémonitoire intervint par une après-midi festive, sur le passage piéton qui menait à l’entrée de l’école, effervescence d’un dernier jour consacré à la fête. Un enfant se tenait à mes côtés quand je l’ai vu prendre son élan, j’ai perçu son crâne exploser sur la calandre de cette voiture qui fonçait sur cette avenue urbaine, deux jeunes en fuite après un vol de véhicule que les policiers pourchassaient. J’ai su exactement ce qu’il fallait que je fasse, tendre la main, l’empêcher de bondir, le retenir par le col pendant que le véhicule vrombissait et nous passait devant sans puiser sa cargaison de malheur, de drame et de sang. Une main réflexe, sans doute un geste impulsif qui ne m’a pas totalement éclairé sur ce potentiel qui gisait au fond de moi et ne demandait qu’à s‘épanouir.
 C’est un peu plus tard, dans l’été qui suivit cet incident que je compris toute la force et l’énergie qui couvaient dans mon étrange aptitude à anticiper les événements. J’avais 16 ans et ma nièce se servit un bol de chocolat au lait brûlant. Du haut de ses 8 ans, elle babillait, les vacances s’annonçaient si belles, le cabanon sur la plage de Gruissan résonnait du bonheur des retrouvailles de notre famille et le soleil luisait déjà à l’horizon promettant une de ces journées de vacances idylliques, un vrai bonheur que rien ne devait troubler.
J’ai vu exactement ce qui allait se passer. Mon moi du futur m’a interpellé, il m’a lancé un signal que je ne pouvais ignorer. J’ai perçu son mouvement pour se saisir d’une tartine de pain entraînant le basculement du bol sur sa poitrine, j’ai entendu son cri de terreur et senti l’odeur de sa chair caramélisée. Mon moi du présent n’a eu que deux secondes pour réagir. Ma main s’est glissée à la vitesse de l’éclair et j’ai projeté le bol vers le sol me brûlant au passage, à la stupéfaction de tous les présents. Deux thèses s’affrontèrent, il y avait ceux peu nombreux, qui étaient persuadés que j’avais protégé ma nièce, il y avait aussi ceux qui pensaient que mon geste était gratuit et qui, n’ayant rien appréhendé du drame en train de se tramer, se persuadaient que j’étais bien un danger pour mon environnement. Etrange concours de circonstances, ce don que je possédais bien malgré moi, devenait la source de mes ennuis et le fait de sauver ma nièce entraînait l’opprobre sur ma personne, démontrant à l’évidence ma dangerosité, une faille dans ma personnalité controversée, reflet subtil d’une peur de l’inconnu.
J’ai tenté d’expliquer la situation en pure perte dans le brouhaha et l’agitation qui régnaient. Je suis alors parti me baigner, me faisant rouler par les vagues, transi et tremblant du contrecoup de cette violence qui m’embrasait, incapable de contrôler les pulsions amères qui bouillonnaient dans mon sang. Je savais exactement ce que j’avais vu et je comprenais le prix à payer pour pouvoir intervenir sur les évènements afin de les contrecarrer : je serais toujours si seul devant mon avenir !
 
Je suis entré à l’université, licence de psychologie, maîtrise d’ethnologie sur les rites sacrés dans les civilisations primitives de l’Océanie, thèse sur les alchimistes du Moyen-Age débouchant sur une titularisation à la Sorbonne dans le département de l’histoire des civilisations et de leur rapport au sacré, accumulant un savoir que j’espérais susceptible de pouvoir m’éclairer sur les composantes de ma personnalité secrète. Car depuis longtemps, depuis ce petit déjeuner sur la plage de Gruissan d’un matin ensoleillé d’été, je dissimulais à mon entourage les ressorts profonds qui m’animaient, ces gestes d’outre monde qui surgissaient à l’improviste quand la situation impliquait que je réagisse afin de me préserver ou d’influer directement sur mon entourage.
Il faut dire que la faille s’élargissait entre ma perception du présent et son annonce prémonitoire. J’en arrivais à posséder un capital temps de près de 15 secondes, une éternité dans le cours de la vie, pour transformer la réalité, intervenir sur le déroulement des actes, un laps de temps qui créait un gouffre dans mon rapport à l’autre. Je percevais le plaisir de la femme avant que l’orgasme s’en saisisse, je connaissais les réponses usuelles des commerçants à mes questions, les interrogations de mes étudiants et les tentatives de séduction de mes étudiantes, je naviguais dans mon univers en étant toujours ailleurs, devant, quelque part dans un territoire inconnu où rien ne me raccrochait à mes frères humains. Je taisais tout cela, mais j’inquiétais bien malgré moi et ma solitude était un prix si lourd à payer pour des élans intérieurs cachés.
J’ai aussi profité de la situation. Avant qu’ils m’en interdisent l’entrée, les casinos étaient devenus un terrain d’expérimentation pour cet apprenti sorcier possédant la vision du futur. Sur la plupart des jeux de hasard, le délai dont je disposais n’était pas suffisant pour anticiper les résultats, un mur sombre s’intercalait entre mes mises et le lancement de la boule à la roulette par exemple. Il en était tout autrement à la passe anglaise ou au black-jack, quand la certitude des réponses me permettait toutes les fantaisies et les gains les plus improbables. La police des jeux m’épiait et je les narguais, les provoquant ostensiblement, c’était ma période de révolte contre cette hantise de voir ma grenade interne se dégoupiller pour me sauter à la face. Ils m’ont suivi, filmé, déshabillé, passé au scanner jusqu’à conclure un accord dans lequel les sociétés fermières des casinos entérinaient leurs pertes contre une renonciation définitive à jouer dans leurs établissements. Cet amusement avait trop duré de toute façon et je m’étais lassé de ces suites prévisibles et de ces parties interminables débouchant sur le vide des certitudes.
Dans le monde réel, les opportunités d’utiliser pour le bienfait de l’humanité, un intervalle de temps si long et bref à la fois entre les questions et les réponses ne sont pas légions. Quelques drames domestiques évités, deux ou trois situations où cet avantage concret autorisait des fantaisies d’autant plus ignorées qu’il me fallait taire et dissimuler cette faculté que la nature m’avait léguée et qui semblait se stabiliser autour d’une minute de décalage et ma vie si plate, si conforme au destin des autres se télescopait avec la fracture temporelle qui me rendait unique et si vain.
Deux êtres en un pour un vide sidéral et un don qui semblait si incongru qu’il en devenait fardeau, m’ôtant la capacité de vivre comme le commun des mortels sans offrir de contrepartie conséquente à une faille dans laquelle je m’engloutissais. J’errais dans mes profondeurs inutiles, je sombrais dans les questions existentielles, c’était trop peu et si démesurément inhumain que les réponses au pourquoi de cette faculté m’enfermaient dans un monde feutré de silence, dans l’isolement de mes pensées suicidaires. J’ai survécu pourtant à toutes mes tourmentes et je suis encore là, mais pour combien de temps ?
 
Je me sentais fatigué, sans doute d’avoir vécu deux vies en une, si épuisé que j’avais l’impression fugace de perdre du temps sur mon temps, que ma marge se décalait subtilement en se réduisant insensiblement. Je me suis chronométré et si au début de ces mesures, la fraction de l’anticipation me semblait stable, quelques signes m’alertèrent qui me permettaient de penser que la situation évoluait, que la vague redescendait sur les rives fracturées de mon sablier interne.
 
J’avais quitté l’enseignement par lassitude pour devenir un cadre dynamique jonglant avec les comptes des clients fortunés qui confiaient leur argent à ma banque afin de les faire fructifier en surfant sur les cours des actions fluctuantes. Mon talent caché ne me servait pas à grand chose en l’occurrence, trop de paramètres interférant pour qu’il puisse s’épanouir et être déterminant dans mes choix, si ce n’est qu’il m’avait appris à saisir l’instant en me liant à cet instinct hors norme que j’avais développé pour survivre dans ma jungle. Star du nouveau marché, je gagnais beaucoup d’argent, une monnaie fictive se concrétisant par des revenus tangibles, aberration d’un monde dans lequel les bénéfices de la spéculation généraient une spoliation toujours plus grande de ceux qui travaillaient à l’enrichissement des possédants. Ma villa avec piscine, les voitures de marque, les femmes d’un soir d’une jet-set frelatée étaient le quotidien d’une vie que je sentais s’effilocher. Qu’avais-je fait de mon talent, à quoi bon la possession de ce don ?
Je me souvenais de mes premières terreurs à la découverte de cette différence, de ce sentiment de panique quand il m’était apparu que je pouvais transcrire l’avenir en acte et influer sur le présent. Je me rappelais aussi de mes rêves quand la maîtrise du processus me permettait de me vivre comme un personnage hors du commun, moitié ange, moitié démon, dépositaire d’un savoir oublié que les dieux nous avaient repris en nous affranchissant de leurs liens. Pour en arriver à cette vie si vide de sens, il m’avait fallu tant de reniements, tant de lâcheté que le compte ouvert de mes faillites me rendait totalement débiteur devant ceux qui devraient juger de mes actes, dans ce futur qui m’obsédait.  
 
 C’est sans doute dans le champagne qui coulait à flot, dans l’argent si facilement gagné et si inutilement dépensé, dans cette existence si piètre, que ma foi s’est éteinte et que mon capital temps s’est épuisé. Dans les derniers mois qui se sont écoulés, au fur et à mesure que le sens de ma vie m’échappait, je percevais la vague refluant qui emportait mon talent dans ses rouleaux, disparition progressive de ce qui m’avait si longtemps fait peur mais qui vivait en moi depuis la nuit des temps. Je pense que je n’ai pas assez aimé la vie, que je n’ai pas compris le sens du message qui m’était adressé.
 
Je sors de chez le médecin. Après les examens nombreux, scanner, prise de sang, test d’effort, échographie, je lui ai posé la question fatale de mon mal. J’ai retrouvé mon don, juste une fraction lucide de tout ce que j’avais gaspillé, juste le temps d’anticiper sa réponse que j’ai reçue comme un coup violent. Il n’a pas eu besoin de parler, il m’a regardé et j’ai compris. Cette masse de chair spongieuse qui avait élu domicile si près de la zone de mes exploits, ce furoncle glissé entre mes désirs et mes peines aurait raison de moi, l’évidence s’imposait d’une vie définitive, d’un point d’exclamation qui me conduirait vers le dernier laps de temps en ma possession…et celui-là, impossible de le maîtriser, le contrôler, l’entraver, seulement le subir à un rythme que je ne pouvais estimer.
 
Qu’ai-je fait de ma vie ? Il n’y a sans doute que moi pour savoir combien j’ai perdu au jeu que l’on m’a distribué. Toutes ces cartes étalées qui auraient dû me permettre de vivre entre le présent et le futur s’évanouissent dans ce moment présent dont le germe d’une tumeur au cerveau annonce ma disparition prochaine. Je ne laisse rien, pas d’enfants pour me perpétuer, pas de femmes pour me pleurer, pas d’amis pour chanter ma mémoire, rien que le futur retiendra.
J’étais pourtant celui qui pouvait le dominer, qui aurait dû jongler avec la mémoire du temps.
 
 
 
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