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cinema

Festival du Film, 2015... 2ème livraison !

Publié le par Bernard Oheix

Ô désespoir, Ô rage ! Ô Mad Max ! On espérait retrouver ses racines originelles, toujours aussi fou et torturé dans un monde carbonisé par la haine. Las ! Plongé dans un amusement pour gamin « acnéïque », gigantesque tarte à la chantilly sans saveur ni intelligence, juste un excès de testostérone dans un salmigondis de religion païenne et de destruction de véhicules tous plus improbables les uns que les autres… jusqu’à l’overdose d’un néant de sable dans lequel le réalisateur se noie sans rémission ! Bon, cela m’apprendra à rêver de mes émotions d’antan !

Heureusement, il y a les films du 7ème Art, ceux fait pour des spectateurs sensés être normalement constitués, et de ce point de vue, ce week-end du 16 et 17 mai 2015 aura été un moment de cinéphilie intense !

Touch de Christopher Hougton (Australie) est un bon thriller mâtiné de 6ème sens, et L’étage du dessous de Radu Muntean (Roumanie), l’habituelle chronique sociale douce amère sur un thème important… la volonté de ne pas se mêler des affaires des autres, jusqu’au remord qui ronge ! Plus percutant, le passionnant film Argentin de Santiago Mitre, Paulina. Une jeune et brillante avocate décide d’aller enseigner les principes démocratiques dans une mission à Posadas, région du Nord de l’Argentine, contre l’avis de son père, un ex-révolutionnaire devenu juge. Violée par des jeunes, elle décidera de garder l’enfant comme un symbole de cette réalité qu’elle veut mais ne peut transformer.

Ann de Naomi Kawase est un film émouvant et une belle confirmation pour la prolixe réalisatrice japonaise de Still the Water. Un homme, Sentaro, blessé et triste, gère un snack qui propose des « doriyakis », sorte de galette aux haricots confis. Tokue, une septuagénaire lépreuse, va se faire embaucher et lui apprendre la recette authentique des « doriyakis ». Une amitié étrange les relie et il retrouvera alors la fierté et l’amour de la vie !

Le Conte des Contes de Matteo Garrone est une « fantasmagorie » mixant trois histoires entre l’épopée médiévale et le conte magique. 3 royaumes, des animaux fantastiques, une magie bien présente, des acteurs truculents, des décors sublimes, une vraie plongée dans un monde onirique, magnifiquement mis en scène… Il y a du Pasolini du Décaméron dans cette fable grivoise…Bon, pourquoi parlent-ils tous en anglais…faudra m’expliquer et c’est dommage, tant l’italien aurait chanter à nos oreilles !

Les Chaises musicales, de Marie Belhomme, en avant-première, est une aimable comédie avec Isabelle Carré tentant de sauver une réalisation manquant d’inspiration !

Ni le ciel, ni la terre de Clément Cogitorre avec un Jeremy Régnier magique, aurait pu être un grand film si son approche passionnante (la disparition physique mystérieuse de 4 soldats Français) avait débouché sur une résolution autre que le mystère et la proposition mystique ! Le huis clos de la guerre des hommes et le rapport aux autochtones restent un angle particulièrement fort de ce film attachant et surprenant.

Trois souvenirs de ma jeunesse de Arnaud Despleschin, peut nous irriter à cause d’une construction et d’une ligne directrice défaillante… Pourquoi 3 souvenirs ? Le dernier aurait suffit largement à justifier le film et ce d’autant plus que les deux premiers induisent des pistes qui semblent largement inexploitées et inutiles… Reste une magnifique histoire d’amour adolescente au charme vénéneux sur 1h30 !

Le Fils de Saul de Laszlo Nemes (Hongrie) sera mon premier vrai coup de coeur… un coup au plexus aussi, tant cette histoire qui se déroule dans un camp de concentration est à la limite du soutenable, par le sujet d’abord, un membre des « sondercommando » chargés de l’exécution et de « ramassage » des milliers de juifs qui débarquent pour être gazés, eux-mêmes condamnés en sursis, mais aussi par le traitement filmique et sonore de la pellicule. A hauteur d’épaule du protagoniste, sans cesse en mouvements parce que s’arrêter serait mourrir, phagocyté par les bribes de dialogues incessantes d’un monde à l’agonie où tout est horreur, le film dérobe avec pudeur la vision clinique des monceaux de cadavres, rendant encore plus explicite cette barbarie méthodique et organisée où le rendement est indispensable, où les « sujets » sont des dépouilles à faire disparaître. La tentative de révolte sera brisée mais des traces de cette holocauste seront à jamais inscrite dans l’histoire de l’inhumanité !

Un film salutaire à l’heure du déchaînement des forces sombres qui traversent notre société !

Voilà, j’attaque mon 20ème film…mais les Festivaliers cinéphiles ont envahi La Bocca et les files d’attentes grandissent comme notre impatience à partager l’écran de nos fantasmes ! Faut s’y faire même si rien ne sert de vociférer ! Cannes est bien le centre d’un monde de l’image avec ses lois et ses règles sans merci qui nous conduisent, après 1 heure d’attente à être refoulé au dernier moment par manque de places ! Dur, dur d’être un festivalier de base !

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Clip Départ ! Festival de Cannes (1)

Publié le par Bernard Oheix

Et la grande foire mondiale de l’image 2015 est donc lancée, un 68ème Festival, mon 38ème personnellement... J’ai tout vécu des diverses façons d’assister aux séances : invitations quémandées, portes dérobées, fausses cartes de presse, contrefaçon des billets...à l’époque où en maîtrise de Cinéma, rien ne pouvait arrêter les étudiants de l’Université de Nice dévoreurs de pellicule que nous étions ! Et puis il y a eu à partir de 1996 mon retour sur la Côte d’Azur après un exil doré à la MJC de Bourg en Bresse, jusqu’à ce poste de Directeur de l’Evénementiel au Palais des Festivals à partir de 2001 m’autorisant une certaine (relative) liberté... plus besoin de tricher !

Désormais, avec la retraite en chantant que j’ai décidé de prendre, c’est comme un cinéphile de base avec son badge autour du cou que je vis le Festival du Film de Cannes, avec ses cohortes de files d’attente, les discussions dans les queues avec des inconnus cinéphiles, les échanges d’information et les tuyaux sur les films à ne manquer sous aucun prétexte... Un mixte entre d’insupportables contraintes et le divin plaisir toujours renouvelé d’une extase !

Ma dernière montée des marches sur le tapis rouge remonte à 10 ans environ, et je ne le regrette pas, tenue de soirée, noeud papillon, si loin à mes yeux des 24 image/seconde dont les 24 marches de l’escalier mythique sont le symbole...Ma réalité c’est la cinéphile, la vraie, celle qui m’autorise à voir les films en continu dans une salle de La Bocca, un quartier de Cannes, à l’Ouest de la Croisette, sans forcément choisir, acceptant d’être surpris ou déçu, ingérant les milliers de kms qui séparent un réalisateur Australien d’un Vénézuélien, un Chinois d’un Turc, même si à chaque édition, quelques thèmes, quelques tics, des références étranges viennent percuter notre conscience, comme si les cinéastes se donnaient étrangement la main à l’heure de concevoir leur oeuvre dans le creuset de leur culture ! Quels seront ces thèmes... réponse dans une trentaine de films même si la dizaine que j’ai déjà regardés me donnent d’ores et déjà quelques indications (les jeunes et la délinquance, les lieux d’enfermement... à vérifier !)

En pré-ouverture, Christina Noble, nonobstant la noblesse du sujet (une irlandaise part sauver des enfants des rues au Viet-Nam et créer des dizaines de centres d’accueil dans le monde) est un film sans relief, trop convenu, manquant d’un regard mordant bien loin de la complaisance !

C’est donc avec le film d’ouverture, La tête haute d’Emmanuelle Bercot que les premières émotions jaillissent ! Un beau film grave, porté par des acteurs sublimes, sur un jeune qui, de 6 ans à 18 ans, sera encadré par des éducateurs et une juge pour enfants tentant de le sauver de lui-même et de la violence qui le dévaste ! A l’heure où les cris d’orfraies de ceux qui voudraient toujours plus de sanctions exemplaires et vilipendent une justice dite laxiste, ce film retrace fidèlement le chemin de rédemption d’un enfant perdu, coincé entre une mère aimante mais désaxée, l’absence du père, et l’impossibilité du rêve d’un futur. Il montre que le pardon et la 2ème chance sont indispensables pour guérir, il trace un chemin original entre le poing fermé et la main ouverte !

Rafale d’oeuvres du Cinéma des Antipodes à l’occasion du Festival Cannes séniors et un magnifique Healing de Graig Monahan (Australie) qui aura le Grand Prix. Sur un thème qui rejoint celui de Bercot (lieu d’enfermement pour adultes, semi liberté et 2ème chance), Viktor, un meurtrier, retrouvera sa place dans la société et le coeur de son fils grâce au efforts de gardiens éducateurs et d’un programme de réinsertion qui lui permet de gérer une volière de rapaces.

Tabula Rasa de Adryanto Dewo (Indonésie) et White Lies de Dana Rotberg (Nouvelle Zélande) proposent deux films originaux aux émotions «exotiques» mais à l’immense humanité. Dans le premier, un aborigène Papou recruté pour son talent de footballeur sur son île, se retrouve dans les rues de Djakarta après un accident à la cheville qui brise sa carrière. Il se reconstruira grâce à une rencontre avec une femme qui lui donnera sa chance et à l’art culinaire dont il deviendra un maître. Dans le second, après le massacre de ses parents par des colons blancs au début du siècle dernier, une native devient un «marabout» et maintient les traditions de son peuple... Contacté par la servante d’une riche colon, elle découvrira que c’est une fille de son peuple que sa mère a «blanchit» afin de lui offrir un monde meilleur. La naissance d’une enfant lui offrira une descendance et permettra la transmission de son savoir !

On peut passer alors sur le scabreux soft de My Mistress de Stephen Lance (Australie) avec une Emmanuelle Béart en maitresse Sado-maso (!!!) et sur Ewerything We Loved de Max Currie (Nouvelle Zélande) ou le rapt par un couple d’un enfant vivant afin de remplacer un enfant mort aurait mérité un traitement plus nerveux et tendu...

Reste pour conclure cette première rafale de films, celui de la Semaine de la Critique (1er ou 2ème film) Sleeping Giant d’Andrew Cividino (Canada) nous montre l’errance d’un adolescent en vacances, perdu dans sa découverte de la sexualité et les rapports avec deux jeunes flirtant avec la délinquance et les défis physiques. Film fort intéressant, à la thématique puissante, qui s’étire parfois et manque de reliefs pour convaincre totalement !

Voilà, mon dixième film sera le Mad Max...Bien loin du Cinéma D’Auteurs mais si proche de nos émotions de grands enfants ! Rendez-vous donc très bientôt pour de nouveaux commentaires en direct !

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Festival du Film Panafricain de Cannes

Publié le par Bernard Oheix

Cette année, Basile Ngangue Ebelle, le président fondateur, animateur, coursier et autre VRP multicartes du Festival m’a demandé d’intégrer le jury... Un honneur de participer à l’aventure de ce Festival qui contre vents et marées, montre le chemin d’une authentique prise de conscience du cinéma panafricain et trace les voies de sa reconnaissance et de son développement à l’international.

Dans le jury, sous la responsabilité de la Présidente Stephanie Girerd, dite «Mobutu women», la réalisatrice de l’excellent «L’Africaine», prix du public 2014, et qui su s’imposer, contrairement à son surnom, avec beaucoup de finesse et de doigté pour canaliser les énergies des membres de son jury haut en couleurs... Une productrice belle comme un soleil, Nadia Tamo, une réalisatrice camerounaise, l’énergique et volcanique Françoise Ellong dont le dernier film Waka truste d’innombrables récompenses dans les Festivals d’Afrique, l’élégant Glag Amog Lemra le réalisateur congolais de «Entre le marteau et l’enclume» dont je dis tout le bien que je pensais dans mon article sur la précédente édition, une réalisateur congolais Tima Ouamba, son story-bord sous forme de BD sous le bras (Le mystère de la terre pourpre) en recherche de producteur et un béninois débonnaire, Ayékoro Kossou, excellent réalisateur de courts métrage au sourire enjôleur (son documentaire sur le handicap au Bénin est un magnifique hommage à la prise de conscience et au dévouement de ceux qui traitent le problème dans une société qui à peur de la maladie !).

Repas en commun (poulet yassa et poissons braisés au riz pimenté, bananes planteurs), visionnement de films en continue, discussions et débats parfois toniques, petits verres de vin au bar convivial de cet hôtel dans lequel le Festival se déroule et où se brasse des idées, des échanges, des confrontations sur ces cultures si diverses qui composent l’arc en ciel d’une Afrique plurielle et de ses descendants, essaimé sur les chemins de l’esclavage et d’une diaspora trop souvent chassée par la misère, recréant un petit monde de paix dans une société trop souvent déchirée !

Et si la culture était ce «chaînon manquant» dont l’absence se fait cruellement sentir entre les nations et les races ?

Et si nous pouvions démontrer qu’entre nos différences, gisent des trésors d’humanité qu’il est indispensable de conserver, et que le chemin le plus direct entre les êtres humains réside bien dans l’acceptation de l’autre !

Au menu du festival, près de 40 films réparties en 3 catégories, court-métrages, documentaires et fictions… Une orgie d’images à ingérer en quelques 3 jours afin de remettre les Dikalo d’Or (l’Appel), la récompense suprême attribuée par le jury à la cérémonie de clôture.

Dans la catégorie des Courts, 3 films se sont détachés. Le prix a été remporté par Sketch de Stéphane Barton. Un petit bijou sur un jeune plus ou moins autiste, doué d’un talent de dessinateur qui lui permettra de démêler l’enlèvement d’une jeune fille grâce à un dessein. Narration nerveuse, cadre précis, interprétation remarquable…tout était réuni pour qu’il s’impose. Deux autres films sont à noter, The Double Deal, de Mark Holden où un « addict » au poker, sombre dans le jeu jusqu’à avoir un accident et se présenter devant Dieu qui lui propose de jouer son retour à la vie sur un coup de cartes ! Jouissif malgré la morale un peu convenue du « happy end », ce qui n’est pas le cas de l’horrifique For Dinner de Jeffrey Williams, où pour se venger de sa femme devenue lesbienne et qui a voulu le quitter, un homme passe des petites annonces sur internet et mijote ses victimes féminines en bons petits plats pour les servir en diner à sa femme captive !

Dans la série des documentaires, de nombreux films passionnants et instructifs. Poverty, inc. de Mark Weber est une charge contre tous les systèmes de soutiens à la pauvreté par les pays riches. Des cargaisons de riz qui ruinent les agriculteurs locaux, des oeufs distribués qui démontent les filières ovines.. avec à chaque fois l’exode des nouveaux chômeurs vers des capitales aux bidonvilles tentaculaires, de l’argent qui s’évapore dans les classes dirigeantes… Même l’action des biens pensants (Bono…) qui est scruté et analysé avec ses effets pervers ! Une charge salutaire qui démontre à l’évidence le « business » de la charité et les méthodes de cette nouvelle colonisation des pays pauvres. I love Kuduro de Marion Petrocino est le portrait, dans une Angola en pleine guerre civile, de ces jeunes musiciens et danseurs qui échappent au temps en fusionnant la House et la Techno avec les rythmes traditionnels angolais en un Kuduro (littéralement, le cul dur) qui emporte tout sur son passage et fera oublier les drames de la guerre ! Mais le Dikalo sera attribué à Camp 72 de Seema Mathur pour son poignant témoignage sur l’horreur de la guerre civile au Libéria et sur la nécessaire réconciliation entre les bourreaux et les victimes. A partir des travaux d’un tribunal de la réconciliation et de ses préconisations toujours pas respectées par le pouvoir politique, des témoins racontent l’horreur au quotidien, les bourreaux voisins, l’inhumanité et la barbarie… pendant que certains anciens chefs sont toujours des hommes politiques, sénateurs et autres, en contradiction avec les propositions de la Commission de la Réconciliation. Un exercice salutaire de mémoire à l’heure où tant de pays se déchirent et où les forces du mal (viols et esclavages des femmes, asservissements des populations, victimes civiles et intégrismes divers !) ont une dangereuse propension à se répandre à la surface de notre planète !

Enfin pour les longs métrages, si l’on excepte le film hors compétition fort attrayant, Njinga, Princesse d’Angola de Sergio Graciano (une fresque historique se déroulant au XVIIème siècle sur le combat et la rébellion d’une reine guerrière contre les envahisseurs portugais et hollandais), seuls deux films pouvaient prétendre au grand prix du jury. Dealer de Jean-Luc Herbulot est une plongée frénétique d’un homme qui « deale » de petites quantités de drogue et se retrouve piégé dans une grosse histoire, une journée de merde où tout se dérégle, tempo halluciné, excellence du jeu d’acteur, montage moderne… un polar « Gonzo » comme un coup de poing !

Le Dikalo d’Or et les Prix d’Interprétation masculine et féminine seront attribués à un drame romantique éthiopien Price of Love de Hermon Hailay. Un jeune chauffeur de taxi tombe amoureux d’une prostituée, réveillant un passé de douleurs et devenant un homme par le même occasion. Un final entre le happy end et le drame, un couple d’acteurs excellents, une technique soignée avec une image « bollywodienne » aux couleurs criardes, la dénonciation des rêves d’un départ pour l’ailleurs bien souvent revers de la prostitution et de l’esclavage des femmes… tous les ingrédients d’un film porteur d’espoir et dénonçant les miroirs de la vie.

Voilà. Une semaine de repos pour recharger les batteries et une autre manifestation nous attend, le Festival du Film de Cannes ! Mais dans celui-là, je ne serai pas jury, juste spectateur et mon objectif est de 35 films ! Cela me donnera un mois de mai à près de 70 toiles…Pas mal non !

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Timbuktu et les Héritiers

Publié le par Bernard Oheix

Deux films à l’affiche... deux bijoux qui montrent à l’évidence toute la richesse et la poésie de l’image, toute la force et la conviction d’un engagement, l’incroyable pouvoir de fascination d’une histoire juste filmée avec le coeur pour un véritable message d’humanisme. Je ne reviendrai pas sur Timbuktu de Abderrahmane Sissako (cf. mon article du mois de mai dans ce blog) si ce n’est pour vous dire que «Ma Palme d’Or 2014» est «Le» film de l’année. Il est désormais à l’affiche, il est possible de le voir, il est indispensable de le visionner pour mieux comprendre ce qui se passe dans certaines parties du monde traversées par la folie meurtrière de l’intégrisme. Face au pouvoir d’une dictature, tout discours est immédiatement confronté à un contre-discours, une propagande à une contre-propagande, sans que les frontières ne puissent bouger dans ce choc sans vainqueur possible. Mais comment lutter contre une image juste. Contre la guerre du Vietnam, la photo d’une petite fille nue courant sur une route dévastée à plus fait que tous les discours du monde. Pour exprimer la famine en Afrique, une photo de Salgado a renvoyé des générations entières vers le confort de leur égoïsme...

Il fait nul doute que Timbuktu est une oeuvre majeure pour comprendre le monde dans lequel nous vivons.

Mais un autre film vient de sortir sans tambours ni trompettes, animé par la force de ceux qui le voient et en sont les véritables portes paroles. Les Héritiers, où comment intégrer notre vision de la jeunesse dans un univers où nous ne comprenons pas toujours le véritable enjeu de ce qui se trame dans nos banlieues et dans la tête de nos enfants, ceux d’une 3ème génération après la révolution des années 1968 où nous pensions changer le monde sans comprendre qu’il nous fallait aussi changer pour réussir cette révolution sans guerre.

Les Héritiers est un film de Marie-Castille Mention-Schaar avec comme seule actrice connue, une Ariane Ascaride solaire au zénith de son talent, une actrice qui réussit à nous faire partager sa passion et son amour de la transmission du savoir sous les traits d’une enseignante passionnée. Une pléiade de jeunes actrices et acteurs au réalisme foudroyant l’entoure. L’histoire semble presque rebutante de banalité, une énième séquence de la jeunesse d’une banlieue difficile comme on n’en a tant vues, avec tous les poncifs imaginables depuis le choc de la Palme d’Or du Festival de Cannes 2008, Entre les murs de Laurent Cantet.

Et pourtant, le film tiré d’une histoire vraie arrive à renouveler le genre, nous fait passer par toute la gamme des émotions, du rire aux larmes, de la profondeur à la légèreté, de l’attachement à la répulsion, comme sous la palette d’un peintre, l’éclairage permettant des interprétations variées d’une même scène.

La professeur d’Art de cette seconde condamnée à l’échec va réussir l’impossible : fédérer autour d’un projet les personnalités si différentes de cette bande de «barbares» modernes, agrégat de nationalités et de confessions diverses, traversée par les échos d’un monde en fureur que plus personne ne comprend. En parlant de la «grande histoire», la Shoah, ils vont transformer leur propre monde, se ré-approprier une fierté dont on les prive, une capacité de vivre ensemble et d’inventer de nouvelles règles d’harmonie.

Sans jamais caricaturer, abordant par touches légères d’innombrables pistes (le port du voile, la conversion à l’Islam, le rôle des caïds et la pression sur les filles, les vies brisées des parents), la réalisatrice garde le fil de son histoire pour décrypter avec cohérence la véritable histoire morcelée de leurs vies en lambeaux et redonner un lien à l’ensemble.

On en arrive à travers tant d’émotions à espérer un happy end et il n’est que justice qu’il arrive comme pour nous donner le souffle d’espérer, la force d’y croire !

oui, il est possible de changer le monde, oui, il est possible d’introduire de la beauté dans les paysages dévastés de notre société égoïste, oui la vie est belle !

Et si vous ne me croyez pas, allez voir Les Héritiers, au delà d’un vrai film particulièrement soigné et même académique, au delà d’une technique qui évite tous les poncifs (le bruit des voix, les couleurs criardes), il y a une authentique histoire de l’homme en train de se souvenir des drames passés pour exorciser les démons du présent !

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Plaidoyer pour Timbuktu...

Publié le par Bernard Oheix

Voilà donc un jury du Festival de Cannes composé de gens éminents et respectables, dont chacun est une partie du cinéma contemporain, qui aiment le 7ème art et en sont des acteurs majeurs... Jane Campion, Carole Bouquet, Dafoe, Garcia Bernal, Refn, que du beau monde, la crème, l’élite. On ne peut douter de la probité de ces personnalités et aucun lobby au monde n’aurait les moyens d’influer sur leur jugement...c’est un fait avéré mais alors, comment expliquer que le palmarès soit indigne de leur talent !

Je suis persuadé que si vous invitiez à la maison l’un des membres de ce jury et qu’après un bon repas, vous l’invitiez à voir le film turc dans une salle de votre quartier, il en ressortirait horrifié en se demandant comment on peut infliger une heure de champs/contre-champs sur des dialogues ésotériques et abscons, insérés dans un film de 3h20 au spectateur même cinéphile le plus branché, même si par ailleurs le film a d’indéniables qualités artistiques, même si le final est, parait-il, très beau, ce final que je n’ai pas vu puisque je suis sorti épuisé après deux et quart de film ?

Le syndrome de L’Oncle Boonmen, celui qui se souvient de ses vies antérieures (ce filmThaïlandais de l’édition 2010 dont le président était Tim Burton) vient-il encore de sévir ?

Si la personnalité des membres du jury n’est pas remise en cause, alors c’est bien dans cet habit de jury du plus grand Festival du monde qu’il faut chercher, dans les mécanismes sans doute inconscients qui font que chacun se saborde et abandonne son libre-arbitre. Interdiction de prendre du plaisir, nécessité de faire compliqué, postulat de surprendre et de faire différemment, émulation malsaine qui débouche sur des choix absurdes. Fuite en avant vers les frontières du réel !

A la lecture des nombreuses Palmes qui parsèment les éditions du Festival, très souvent, la qualité prime, les choix sont offensifs entre le cinéma commercial et le cinéma d’auteur, tension évidente entre ces deux tendances qui animent la production mondiale. Cannes sait se positionner entre ces deux options, miracle d’équilibre, mais trébuche parfois aveuglé par la volonté de trop bien faire !

Pourquoi ne pas se laisser aller à la poésie tragique d’un film africain ? Il y a tout dans Timbuktu, et d’abord le sujet, l’intégrisme dont on peut penser qu’il pourrait primer sur le nombrilisme d’un adolescent attardé nous infligeant une nouvelle fois, les hurlements de sa mère (Dolan) ou une énième variation sur une émission de télé-réalité (le Meraviglie). Il y a une beauté sublime et désespérée dans la complainte d’une femme fouettée pour avoir chanté et qui exprime sa douleur devant les bourreaux en chantant cette douleur. Il y a toute la noblesse d’un père de famille vivant dans le désert qui sera abattu avec sa femme, unis dans l’amour comme dans la mort. Il y a l’absurdité des ordres des terroristes, les armes qui tirent et la force surréaliste d’un peuple qui lutte afin de garder sa dignité (la partie de football sans ballon). On convoque Kafka dans ce grand désert tout blanc où luit la mort avide, les surréalistes toquent à notre porte devant ce dialogue des intégristes sur la victoire de l’équipe de France en 1998 alors que le foot est interdit, ou dans ces dialogues que l’on traduit en langues multiples pour se faire comprendre. Il y a du suspense et une énergie sans limite dans une écriture cinématographique parfaite... mais qu’est-ce que tout cela devant des séquences d’une heure de dialogues abscons entre deux individus perdus dans leur solitude ?

Que devra faire l’Afrique pour être primée à Cannes ? On n’a pas souvent l’occasion d’hériter d’un tel chef d’oeuvre de ce continent pour avoir le droit de l’ignorer !

Et si l’on aime pas l’Afrique, pourquoi ne pas reconnaitre aux frères Dardenne dans Deux jours et une nuit, l’incroyable originalité du sujet abordé et son traitement particulièrement dynamique. Un thème social scénarisé sous la forme d’un polar, la quête éperdue d’une Marion Cotillard éblouissante vers sa dignité et la reconquête de son honneur... Aller de famille en famille pour convaincre ses collègues de changer leur vote quand à son licenciement contre une prime, c’est moins glamour qu’une litanie de jurons hurlés avec l’accent Québécois, c’est moins exotique que les maisons troglodytes de la Turquie ou que la Belluci déguisée en fée ridicule...mais cela fonctionne quand on a les Dardenne aux commandes !

Que se passe-t-il dans la tête de chaque jury et comment en arriver à un tel échec du collectif sur le désir de l’individu ?

Pour avoir participé à de nombreux jurys (cinéma, chansons, humour...) et pour avoir géré pendant 15 ans celui de la pyrotechnie à Cannes, je pense qu’il y a un syndrome du membre parfait d’un jury qui se met en branle à endosser une responsabilité aussi importante. Il n’est pas aisé d’être celui qui va juger les autres et le collectif renforce cette tendance suicidaire à l’automutilation des sens les plus primaires. Comme si l’on s’aveuglait de trop regarder les autres au détriment de son propre plaisir !

Moi, en cette année 2014, ma Palme d’Or reste attribuée à Timbuktu et mon film fétiche demeure Le Dardenne... même s’il y avait nombre autres films qui auraient pu prétendre à être célébrés sans que l’on ait l’impression de déchoir.

Tant pis pour Jane Campion la présidente, dont on pouvait attendre plus de lucidité, tant pis pour les autres jurés...tant pis pour le cinéma Africain qui attendra encore pour être reconnu à sa juste valeur !

Et pour finir, ce lendemain de Festival nous aura offert un autre palmarès tout autant tragique, celui d’un FN à 25% pour une élection Européenne. La aussi, il y a un vers dans le fruit, une indécence à imaginer qu’un quart des électeurs auront choisi les chemins de l’horreur, le bourrage d’urnes de leur fiel, la complainte absurde de leur médiocrité. Les abstentionnistes nombreux sont comme leur pendant. Il n’en reste pas moins que des êtres dit civilisés en ce XXI siècle, osent faire balbutier l’histoire et trébucher les valeurs fondamentales de l’humanité. Comment se faire séduire par les sirènes d’un Bleu Marine à la teinte foncée en filigrane ? Relisons l’histoire, revoyons les formidables films de l‘Apocalypse diffusés par Arte, il y a quelques semaines, sur la montée du nazisme, écoutons les rumeurs du passé et comprenons bien que le séisme que nous avons vécu en ce 25 mai dépasse largement l'anecdote !

Nous sommes bien dans une crise majeure de la démocratie et pour ceux qui l’ignorerait encore, du chaos nait l’horreur, et le diable ne résiste jamais à être sollicité, il s’impose comme une évidence quand on l’invoque !

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Coup de folie sur la Croisette (3)

Publié le par Bernard Oheix

Que s’est-il passé en ces mercredi et jeudi 21 et 22 mai d’un Festival pas comme les autres... Tout a commencé par une panne de projecteur à la salle de la Licorne, haut lieu des cinéphiles, et c’était bien la première fois qu’un tel fait advenait,, nous privant de films pendant 24 h, puis par une éclipse de jour causée par des nuages noirs roulant dans le ciel, à laquelle a succédé un orage diluvien plongeant les festivaliers dans les bras de dizaines de noirs vendant des parapluies à 10€, surgis comme par magie, de tous les recoins de la ville, et pour finir, par vagues déferlantes une série de films magnifiques, comme pour me narguer, moi qui avait osé mettre en doute la haute tenue de cette édition 2014... Alors, petite revue d’effectifs !

Et tout d’abord les prétendants à une consécration finale. Maps of the Star, de David Cronenberg. Peinture au vitriol de l’univers Hollywoodien...où la drogue et le sexe servent de toile de fond au pouvoir de l’image et du paraître, où l’inceste plonge dans l’histoire des familles, où l’enfant génial devient un tyran incontrôlable, où rien n’est respecté, même pas la mort, et où les assistants des stars sont traités comme des esclaves. Cronenberg signe ici, une de ses oeuvre la plus troublante, la plus dérangeante, véritable miroir d’un monde en train de se déchirer et dont les codes centrés sur des égos surdimensionnés transforment la machine à rêves en cauchemars. Il dispose d’une Julianne Moore terrifiante d’impudeur et de méchanceté en star déclinante. Une palme d’interprétation serait un minimum pour ce film et pour l’actrice.

Deux fois Palme d’Or déjà, les frères Dardenne venaient pour tenter la passe de 3 et ouvrir une nouvelle perspective à ceux qui tentent de décrocher l’or... Leur film, Deux jours, une nuit est génial, comme d’habitude, un bijou social transformant en aventure la quête éperdue vers sa reconnaissance d’une Marion Cotillard ouvrière licenciée par un vote de ses collègues à qui l’on demande de choisir entre une prime ou son poste de travail. Cette quête haletante chez tous ceux qui ont voté pour infirmer leur décision, donne au film une tension et un rythme étouffant. Les personnages, derrière leurs réponses, campent des positions souvent justes, reconnaissables sans manichéisme. C’est un grand film qui sera au palmarès, osons et disons pour un Prix Spécial du Jury... Réponse dès ce soir.

Il y a deux fibres chez Ken Loach, l’historique et la sociale. Dans Jimmy’s Hall, il réussit à nouer ces deux tendances qui parcourent son oeuvre. Un jeune irlandais débarque chez lui dans les années 1930 après 10 ans d’exil pour rejoindre sa mère et renouer les fils de son histoire. Il va raviver toutes les plaies non-refermées depuis son départ en rouvrant une maison associative, véritable MJC avant l’heure, malgré l’opposition des fascistes, des propriétaires terriens et d’une Eglise omnipotente et farouchement engagée dans son refus de laisser le peuple danser et se cultiver.

C’est un film d’une facture particulièrement classique, du Loach dans l’image, un monument à sa propre gloire. On y plonge avec ravissement... mais sans surprise. Un film indispensable, beau comme une page d’histoire, où la culture Irlandaise est mise en valeur et où les jeunes portent l’espoir d’un monde nouveau.

Un petit mot sur un très beau film tiré d’une histoire réelle qui s’est déroulée à la fin des années 90, Foxcatcher réalisé par Bennet Miller avec des acteurs incroyables (et souvent à contre emploi) comme Steve Carell, Mark Ruffalo, Channing Tatum. Dans le milieu sportif de la lutte, un milliardaire (John «Eagle» DuPont) fonde une école de lutte et réunit les meilleurs compétiteurs avec l’ambition de truster les médailles pour son pays et d’être reconnu comme un entraineur... et un père par ses lutteurs ! Sa folie débouchera sur un drame sanglant et la mort guette ceux qui s’approchent de son rêve mortifère.

Et s’il fallait donc se coller au jeu des palmes du mois de mai, un jeu typiquement cannois en ce dernier jour du Festival, cela pourrait donner...

Bon, Je ne vais pas me mettre à la place du jury mais vais vous offrir mon palmarès...

Et tout d’abord, n’ayant visionné qu’une partie de la sélection, (11 sur 18), certains films dont on dit le plus grand bien ont pu m’échapper... Assayas, Mike Leigh, Kawase, Hazanavicius... Excusez du peu !

Ensuite, je refuse tout idée de prix et de récompense pour le «chouchou» de la critique, l'hystérique Mommy du Québécois Xavier Dolan. Même si, pour son 4ème opus, il y a indéniablement une amélioration, son cinéma épileptique et ses tics «mégalomaniaques», sa capacité à se centrer sur sa petite personne et à coller des scènes sans logique (pourquoi la première ?), sa façon d’aborder la technique sous l’angle unique de l’effet, son rapport à l’histoire éternelle des liens avec «une maman» omniprésente déclinés à l’infini, sont insupportables. Qu’il ait un avenir est évident... mais qu’il grandisse vite, par pitié, afin de nous offrir ce cinéma adulte qu’il semble capable de porter !

And the winner is...

Palme d’Or : Timbuktu de Abderrahmane Sissako

Prix Spécial du Jury : Deux jours, une nuit des frères Dardenne

Interprétation féminine : Julianne Moore (Maps of the Star de David Cronenberg)

Et pour les autres accessits, je fais confiance à Jeanne Campion, Carole Bouquet, Sofia Coppola, Willem Dafoe, Garcia Bernal.... qui composent un beau jury 2014

Enfin, comment ne pas parler de la dernière oeuvre de Wim Wenders, Le sel de la Terre, une révélation, un film qui ouvre l’intelligence et donne une leçon d’art, de vie, d’humanité au spectateur. Un film sublime et sublimé sur l’oeuvre d’un photographe Sebastiao Salgado dont on connait forcément quelques uns de ses clichés célèbres. Il a grandi au Brésil, s’est réfugié en France, a parcouru le monde pour le capturer dans sa boite noire. Il s’est d’abord centré sur l’histoire des hommes jusqu’à figer l’insoutenable, les massacres, les exodes, les charniers de cette fin du XXème siècle. Hutus et Tutsis, Ethiopie, Sahel, Sarajevo... Clichés mortifères qui le résoudront à fuir le monde des humains et à se réfugier dans celui de la nature. Utopie mise en oeuvre avec ce reboisement d’une forêt détruite au Brésil et ses derniers reportages sur les animaux et la végétation pour une ode à la création, lui le spécialiste de toutes les morts.

Le film mêle habilement, images animées et fixes, extraits de reportages passés et film en train de se tourner. On y trouve par séquences, une interview de Salgado rythmant les divers chapitres. Ce philosophe et humaniste, revenu de tous les combats parle en nous regardant droit dans les yeux. D’autres interventions de ses proches, sa femme si importante, son fils, co-réalisateur et auteur des séquences du passé, son père, dessinent un portrait en creux de Sébastiao Salgado.

Il y a dans ce film documentaire, toute la fiction du monde, toute la beauté et le suspense d’une vie en mouvements perpétuels. C’est un film indispensable à l’histoire de l’homme et un hommage aux forces nobles de l’être humain devant celles obscures qui tentent de détruire les fondements d’une humanité perdue !

Le Sel de la Terre de Wim Wenders et Timbuktu de Abderrahmane Sissako prouvent que l’on peur encore raconter des histoires, quelqu’en soit la forme, qui touchent à l’essence de l’être, et que la poésie est le moteur de l’homme et le ferment de l’espoir !

Voilà, le Festival se termine tristement pour moi, sur un 34ème film argentin attendu mais raté, Jauja, avec Viggo Mortensen à 10h11 en ce samedi 24 mai 2014. C’est loin de la cible des 4O films espérés mais pas catastrophique si l’on considère que j’ai perdu 24h pendant la panne du projecteur à la salle de la Licorne et fait l’impasse sur les deux derniers jours de projections pour me rendre à Nîmes pour une fête de famille.

Festival contrasté, bizarre, tourmenté, indécis, festival bien en phase avec le tempo de la crise actuelle, mais Festival du Film de Cannes tout de même, moments magiques aussi ou tout peut advenir, se déclencher, éclairer le monde et rendre plus lisible les pages brouillées de la vie !

Merci à tous les faiseurs d’images qui tentent de décrypter la réalité et nous offrent un peu de leur âme !

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Festival du Film 2... à mi-parcours !

Publié le par Bernard Oheix

Petit bilan à mi-parcours. Sauf à imaginer que les derniers jours ne présentent que des chefs d’oeuvre (ou des navets !), on voit bien après 20 films, les tendances de cette édition 2014. Disons-le tout net, ce ne sera pas un grand crû dont on se rappellera particulièrement pour son lot de découvertes et de coups de coeur. Ce n’est en aucun cas la faute du Festival et de ses programmateurs puisque cette tendance dépasse largement la seule compétition et touche aussi Un Certain Regard, La Semaine de la Critique, la Quinzaine et toutes les autres sélections diverses...

Petite revue d’effectif de nos déceptions et des quelques bonnes surprises !

Atomisé Egoyan que l’on attendait avec Captives, lassitude devant le vide de The Homesman de Tommy Lee Jones, films bancals comme Tourist ou l’attendu Eleanor Rigby de Ned Benson qui derrière une belle technique, étirent les plans à l’infini et se perdent dans des histoires à tiroirs, mauvais film pour l’italienne Alice Rohrwacher sur une famille germano/italienne descendant, il fait nul doute, de terroristes reconvertis en apiculteurs participant à une émission de télé-réalité sur les produits du terroir, film raté du Turc Nuri Bilge Ceylan qui commence bien son opus, le termine magnifiquement mais inflige d’insupportables dialogues en champs/contrechamps d’un verbiage pseudo philosophique comme pour éprouver le spectateur dans sa résistance à subir un vide de 60 minutes en plein milieu d’une oeuvre de 3h16. Winter Sleep aurait pu être un de ces coups de coeur que l’on affectionne et qui nous transporte, il reste un film mal maitrisé où le réalisateur se perd dans sa complaisance.

On passe sur Grace de Monaco qui réussit à conjuguer tous les défauts de Olivier Dahan (mais aussi quelques unes de ses qualités !), sur le pontifiant Amour Fou de Jessica Haussner où un acteur-pantin appelé à interpréter Heinrich Von Kleist cherche une âme soeur prête à mourir avec lui par amour (je vous assure que même vivre avec lui serait une punition !), sur Run qui tente de conjuguer tous les défauts du cinéma africain que le magnifique Tumbuktu a su éviter, et cela donne beaucoup d’amertume, des rendez-vous ratés et l’impression que la crise ne touche pas que nos portefeuilles mais aussi les esprits des scénaristes et des réalisateurs...même si les acteurs et les actrices semblent tirer leur épingle dans ce jeu de dupes !

Quelques réussites malgré tout, comme Les Combattants de Thomas Cailley, qui une nouvelle fois démontre le talent de la «french touch» tant sur le plan de la technique que des idées avec des réalisations qui pallient parfaitement le manque de moyens financiers par une inventivité et un soin dans la réalisation qui leur donne une vraie ambition. Paradoxe, dans le marasme semble-t-il du cinéma mondial, notre petit pays s’affirme avec une nouvelle génération de cinéastes et de techniciens qui promettent des lendemains heureux à l’heure où tous les indicatifs virent au rouge !

Autre petit bijou, le Relatos Selvages de l’argentin Damian Szifron qui avec des sketches imbriqués réussit à nous faire rire du tragique, sourire de la vie quotidienne et offre un bol rafraichissant de bonne humeur au festivalier épuisé !

Chaque année, nous voyons quelques tendances se dessiner, des thèmes en écho d’une polyphonie mondiale de l’image. Indubitablement, cette édition sera marquée du sceau de la présence des femmes, de leur rôle central et de personnages particulièrement affirmés, déclinant une place prépondérante dans l’univers fantasmé par le 7ème Art de la réalité ambiante. Même dans des films plus ou moins aboutis comme Homesman ou Self-Made, les femmes sont un pivot sur lequel tourbillonne les drames de la vie. Et la deuxième tendance qui semble s’inscrire en filigrane de ces pellicules, est la tentative de rire et de faire rire. Humour décalé de Turist, de Bunny et scènes diverses qui parsèment la plupart des films et apportent un peu de fraicheur dans l’eau tiède des bons sentiments.

Alors bien sûr, il reste les films des Dardenne, de Kawase, de Cronenberg, de Godard, tous ceux que l’on a pas vus et tous les autres aussi... En attendant, je file voir The Foxcatcher de Bennet Miller dont on dit beaucoup de bien et je reste accroché à mon idée d’une Palme d’Or pour le magnifique, sublime et si humain, Tumbuktu de Sissako, la révélation de cette première moitié du Festival qui récompenserait à juste titre la maturité d’un cinéma Africain qui n’a rien à envier aux canons de l’esthétique occidentale !

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Festival du Film 2014. Cannes. 1ère étape

Publié le par Bernard Oheix

le Festival du Film 2014 a pris son rythme de croisière...maison pleine, 5 films par jour, des files d’attente, les repas dans les jardins, les discussions acharnées, il ne manque que les parties de rami Corse traditionnelles... et on se croirait au Festival du Film de Cannes !

Au 14ème film, après 5 oeuvres françaises, 2 australiennes et une palette de polonais, kazakh, turc, israélien, autrichien et autres, un petit état donc de la situation du cinéma mondial !

Et tout d’abord, le miracle du Cinéma Africain existe, nous l’avons rencontré. Comment imaginer que Timbuktu, le chagrin des oiseaux ne soit pas palmé... La vraie question porte sur la nature du prix qu’il obtiendra, consécration finale, une Palme d’Or, ou un accessit ? Il est un peu tôt pour le dire, mais avouons que ce film Malien de Abderrhmane Sissako est un vrai bijou, un ovni, un formidable film en résonance avec une histoire contemporaine tragique, la prise du pouvoir par des intégristes de la ville de Tombouctou. A l’heure du Jihad qui fascine tant de jeunes du monde entier, ce film est une réponse étonnante à la fascination de l’absolu, une réponse en images aux rêves désespérés d’imposer une morale par la force. Les premières décisions des conquérants sont l’interdiction de fumer, d’écouter et de faire de la musique, et l’obligation pour les femmes d’être voilées et de mettre des chaussettes et des gants dans un pays écrasé par le soleil où le sable envahit la vie quotidienne !

Le film, d’une poésie à couper le souffle par la beauté de ses images et une bande son très soignée, une technique parfaite, va offrir à une pléiade d’acteurs jouant particulièrement juste, de mélanger l’onirique et le réel, la beauté et le sordide, l’absurde et l’humour. Il reste en mémoire des scènes d’anthologie. Le football étant interdit (même si ces intégristes parlent longuement entre eux de la victoire de la France en 1 998 et de Zidane !), les joueurs jouent donc sans ballon en une pantomime savoureuse devant les gardes qui ne savent comment réagir, la musique est prohibée, les musiciens chantent des sourates du Coran, la poissonnière interrogent les gardiens pour savoir comment elle doit travailler le poisson avec des gants, les mariages forcés permettent une savoureuse exégèse par l’Imam intégriste de la nécessité de forger les corps des combattants par la pureté des jeunes filles. Si l’humour est la politesse du désespoir, alors ce film est un chant désespéré pour invoquer une vie de beauté sur les champs démembrés d’une atrocité sans limite.

La noblesse d’une civilisation millénaire se fracasse sur la ronde des 4/4 chargés d’hommes en armes qui tirent sur tout ce qui bouge et pourchassent une gazelle du désert en une métaphore explicite sur la beauté que l’on assassine. La lapidation du couple adultère est insoutenable, non dans l’image montré réellement, mais surtout dans la symbolique évidente du massacre de l’amour !

Des téléphones portables sans réseau et des mégaphones pour dispenser toujours plus de contraintes à la population soulignent l’ubuesque mosaïque des langues véhiculant les ordres des envahisseurs. Le rapport d’un intégriste se fera en anglais car son arabe est jugé trop mauvais par son chef, le jugement s’effectuera avec 3 traducteurs, un en idiome local qui traduit en arabe afin qu’un 3ème puisse formuler en anglais et que les décisions justes soient prises par le responsable ! Comment ne pas imaginer la douleur de cette femme fouettée pour avoir osé chanter en étant seule avec des hommes dans une chambre et qui sous les coups, dans les larmes, se met à vocaliser sa peine et sa douleur en un ultime défi à ses bourreaux !

Ce film est le plus bel hommage à la tolérance qu’un cinéaste pouvait réaliser. Il prouve que la caméra est encore une arme pour ceux qui tentent de mettre un peu d’ordre dans le chaos !

Dans la série des découvertes heureuses, une séance spéciale de la Semaine de la Critique, une catégorie sélectionnant les 1er ou 2ème film de réalisateurs. Mélanie Laurent avec Respire nous offre une oeuvre magnifique, toute de tension et de crispation. Une nouvelle élève vient bouleverser le quotidien d’une jeune fille brillante mais réservée qui prépare son baccalauréat. Elle va vers ses 18 ans et a tous les tourments de cet âge, portent toutes les ambiguïtés de cet ultime passage vers le monde des adultes ! Cette amie s’avèrera une redoutable manipulatrice et sèmera le chaos autour d’elle jusqu’à un final en apocalypse. Le film échappe largement aux clichés habituels sur les films d’adolescents. Il interroge sur le rapport aux adultes sans jamais caricaturer, avec doigté, évoquant les tourments intérieurs sans être explicite, évitant le piège d’une «sexualisation» de l’attirance des deux jeunes filles. Toute la partie finale monte en un crescendo insoutenable que la bande son souligne par des phases de saturation déclenchant une vibration interne physique. Ivresse, cigarettes et sexe, vieux triptyque, mis au service d’une mythomane et qui débouche sur le drame et l’incompréhension. La dernière image nous permet enfin de respirer, et ce n’est pas le moindre des succès de la réalisatrice que de nous tenir en haleine tout le tiers final de son film !

A noter l’éblouissante performance des deux actrices, les jeunes et talentueuses Joséphine Japy et lou de Laäge.

Enfin dans les films à voir, on peut noter Bunny de la polonaise Annika Glac, un couple lunaire déguisé en lapine et en renard, propose des prospectus dans la rue. Une belle histoire nimbée de cet humour polonais, de ce «non-sense» illustré par tant de réalisateurs de ce pays et qui fait penser au Polanski des origines. Party Girl est un film Français réalisé par trois réalisateurs (Claire Burger, Samuel Théis, Marie Amachoukeli)... cas de figure assez original pour une oeuvre de tendresse sur les gens du nord, héritiers des corons, à la frontière Flamande, un peuple à la désespérance ancrée dans une soif de vivre et d’exister. Il n’y a pas de misérabilisme dans cette femme de soixante ans aux charmes usés, vivant dans un bar pour hommes et qu’un vieux retraité demande en mariage ! Leçon de vie, de tolérance et insatisfaction d’une femme pourchassée par la peur du vide et qui brise le bonheur autour d’elle comme pour exorciser ses propres démons...

Reste un film d’horreur pure de David Robert Mitchell, It Follows où comment le diable se transmet par le sexe et comment s’en débarrasser ! Accrochez-vous à vos fauteuils même s’ils n’y sont pour rien ! C’est un genre suffisamment rare à Cannes pour noter sa belle réalisation et le vrai suspense qui en découle !

Allez, je vous quitte, le 15ème film m’attend, un argentin à sketches, je vous en parlerai peut-être, l’Argentine, je connais !

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Festival du Film Panafricain de Cannes

Publié le par Bernard Oheix

Basile est ainsi, un extraterrestre, un OVNI en terre de culture, un lettré à la mode du passé plongé dans le monde bouillonnant du lendemain, un homme de coeur et de rencontres, un médiateur de toutes les bonnes volontés. Basile Ngangue Ebelle, d’origine Camerounaise, Français de vie, qui porte sa couleur comme un emblème de tous les possibles.

Qui, à part lui, pourrait, dans l’inconscience la plus totale, monter et s’arc-bouter afin de tenir les rênes d’un Festival du Film à 500 mètres de la Croisette, 15 jours avant l’autre, le grand, et cela depuis 11 ans...

Un Festival Panafricain, reflet d’un continent trop souvent perdu, si peu représenté dans les manifestations, qui peine à se développer, à trouver un public, à s’insérer dans le tissu démantelé des sociétés de pays déchirés par la pauvreté, gangrenés par la prévarication, où le bon sens à parfois tant de peine à exprimer ses besoins. On connait une poignée de cinéastes Africains reconnus pour un continent vaste comme le coeur de l’humanité. C’est si peu et tellement injuste !

3 cinéastes «congolais» réunis par les hasards de la sélection, dans une conférence commune, faisaient le constat des dérives du système, de la puissance des actions individuelles, de l’énergie d’un «nollywood» en train de se structurer, de l’espoir de trouver une oreille attentive auprès d’un responsable haut placé d’un président, afin de lancer un embryon de «CNC» à l’africaine et de permettre aux cinéastes de tourner, de croître, de se voir en miroir d’un continent, de vivre de leur art et de créer une dynamique. Tous affichaient leur détermination, mais derrière l’espoir réel d’ouvrir une voie vers l’avenir, une sombre ombre de fatalisme nimbait leur propos.... Et si l’histoire balbutiait encore et toujours... Et si chacun n’était que la énième vague d’une nouvelle jamais aboutie... Et si le système n’était que la perpétuation d’un démantèlement social, culturel... Et si le rien guettait ceux qui oeuvrent à affirmer leur spécificité afin d’ouvrir des brèches dans un 7ème Art en train de muter !

C’est ce que le Festival Panafricain tente d’offrir, une part de rêve, à tous ceux qui espèrent en ce continent fascinant et en la passion de ces acteurs culturels qui prêchent dans les déserts démembrés de leur absence de perspectives !

Que ce soit en haute couture, en musique, en arts plastiques, dans les salons d’un hôtel cannois, ou sur l’écran d’une salle de conférence qui a vu projeter une cinquantaine de films, courts et longs métrages, fictions et documentaires, l’équipe de Basile et son festival multi-culturel, renvoie clairement la problématique de l’existence d’une dynamique novatrice sur le continent noir, à la capacité d’influer de tous les acteurs d’un monde nouveau à créer, loin des déchirements et si proches des passions.

Sur quelques films :

Laurent et Safi. Réalisateur : Anton Vassil. 115 ‘

Tout sépare Laurent, jeune cadre qui doit se marier et Safiatou, une Malienne vivant en France. Et pourtant...

Il y a des «Chansons d’amour» dans cette comédie romantique plutôt réussie, un bric à broc sympathique qui force l’adhésion vers le happy-end d’une mixité possible, de couleurs, de classes sociales, de cultures... Mais ce n’est pas une thèse, juste une comédie avec des chansons plutôt réussies, des acteurs de qualité... Un «bollywood» à l’Africaine re-mixé à l’ascenseur social Français perdu !

A coeur Ouvert. Réalisateur : Ayekoro Kossou. 15’

Un couple mixte, une belle mère odieuse, un coeur qui lâche... Petit film au sujet grave, bien joué et à la morale surprenante. Une fiction comme un test pour aller vers le long métrage, une carte de visite que le réalisateur c’est donné afin de convaincre les décideurs. Une belle réussite !

Entre le marteau et l’enclume. Réalisateur : D’Amog Lemra. 98’

Construit comme un puzzle, autour de petits sketches avec des personnages récurrents, le film est une peinture saisissante de la société du Congo, de l’univers de Brazzaville de la pauvreté latente et de la richesse extrême de certains.

Il y a Pascal, le chef d’entreprise odieux, écrasant le monde de son argent, satisfaisant ses désirs lubriques sans égards pour ses victimes... Il y a la femme abusée par son pasteur, la fille dépressive du père qui a sombré dans l’alcool, le vendeur de médicaments amoureux... Toute une galerie de portraits savoureux qui dépeignent la ville, la société, l’injustice profonde du pouvoir de l’argent !

Dans une économie de moyens forcenée, le film n’en est pas moins très soigné, plans sobres, montage intelligent, raccords harmonieux. A noter la qualité d’expression des acteurs, pour la plupart amateurs, et les voix bien posés et audibles !

Une classe d’enfants regardent le film, effet miroir du cinéastes vivant en France et retourné dans son pays pour y tourner cette fiction bien plus vraie que la réalité.

Voilà une brève sélection parmi les nombreux films présentés et, disons-le, la plupart étaient de facture honorable, voire de grande qualité. Au dire des organisateurs, le niveau s’élève d’année en année et les cinéastes prennent enfin leur destin en main ! Acceptons en l’augure et que mille fleurs s’épanouissent au chevet du cinéma africain. Le monde à besoin de leur regard !

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Le temps de l'attente et de la répétition !

Publié le par Bernard Oheix

Bon, je suis d’accord avec vous, la précédente annonce était un peu «mégalo» et le ton y était sans aucun doute un peu too much... emphase, circonvolutions...cette «vie, son oeuvre»... un peu pompier, n’est-ce point ?

Mais bon, on se pardonne ! C’est vrai qu’exhumer de mes malles tant de photos, d’articles, faire un retour en arrière et en même temps, présenter mes projets et l’actualité à travers BO Conseils, m’a amusé, ému, et au fond, donné l’impression d’avoir vécu pour quelque chose... Posséder les autographes de 50% des Beatles, d’une myriade de cinéastes mythiques (de Jack Nicholson à Polanski, d’Antonioni à Léonardo le magnifique, de Kim à Sharon... Et des musiciens, plasticiens, gloires du théâtre et de la danse... Parfois, quelques annotations prouvent à l’évidence que quelque chose c’est passé, de l’ordre d’une presque amitié...Vous les retrouverez dans «mes rencontres» sur mon site www.bernardoheix.com même si je n’ai pas encore fini de les légender toutes.

Il y a aussi beaucoup de mes écrits, d’articles sur ma fonction et mes divers passages dans les lieux de culture et d’animation où j’ai oeuvré. Souvenirs, souvenirs !

Mais il n’y a pas que le passé lointain ! Il y a quelques mois de cela, mon ami Gérard Camy, directeur des études au BTS Audiovisuel de Cannes, avec qui j’ai déjà collaboré dans l’écriture par le biais de revues de cinéma, m’a sollicité pour savoir si j’avais une nouvelle adaptable au cinéma, les étudiants de fin de cycle de la promotion 2014 devant tourner un court métrage sous sa direction. Une aubaine dans la ville du cinéma !

Je lui ai transmis une de celles que j’aime particulièrement, «Ce tapuscrit est admirable» que vous pouvez retrouver sur mon site ou sur mon blog et il l’a transformé en scénario librement adapté de ma nouvelle !

Il a été emballé par le sujet. Un écrivain prend en otage un directeur de collection pour le forcer à éditer sa dernière oeuvre. Il va mettre en scène son propre suicide afin que les médias en parle et que le livre paraisse... Las, au bout du compte, il n’atteindra pas vraiment son objectif par un retournement de situation qu’il vous faudra découvrir en lisant la nouvelle ou en visionnant le film quand il sera présenté !

Je n’y avais mis qu’une condition : avoir un rôle dans le film et me voilà donc présent en ces 18 et 19 avril, sur les lieux de tournage (une étude en ville chez une amie avocate et le bureau du proviseur du lycée Carnot de Cannes), où j’avais sévi pendant mes années de bac, de 1966 à 1969, avec au milieu, un certain mois de mai 68 qui reste ancré en moi comme une période de rêve où nous pensions transformer le monde et le rendre plus juste ! J’avais juste 18 ans !

Deux jours de tournage avec des comédiens professionnels et de renom... Daniel Prévost en éditeur, Antoine Coesens en écrivain, Jacques Boudet en producteur de films et Frédéric Gorny en animateur de télé...Moi, je suis le flic au pistolet (mais la production n’a pas voulu de vrais balles !) qui va faire irruption pendant la prise d’otages !

J’ai une scène importante à jouer avec deux répliques meurtrières («-Police, ouvrez, que se passe-t-il ? et «-Je suis l’inspecteur Blot, je vous demande d’ouvrir cette porte»... ce à quoi, au bruit d’une détonation, je l’enfonce cette putain de porte à coups de tatanes et reste figé devant le cadavre d’un homme...

Et oui, tous les grands acteurs ont commencé par faire un flic qui enfonce une porte (même si je ne pouvais donner la pleine mesure de mon talent «stanislaviskien» vu que la porte appartenait à ma copine avocate et qu’il était hors de question, que la production exsangue du film ait à la remplacer !).

Maquillage avec Manon, scènes répétées de nombreuses fois, technique envahissante...

Là où les autres comédiens, les vrais, improvisent avec maestria un texte qu’ils ne connaissent qu’approximativement (n’est-ce point monsieur Prévost...) tout en réussissant à nous faire hurler de rire avec leurs improvisations.. Moi je galère avec mes deux bouts de phrase et mon simulacre d’enfoncement de porte ouverte.

Et le temps de l’attente ! Des heures avant de pouvoir contempler ce putain de cadavre d’Antoine qui respirait comme vous et moi, et de feindre la stupeur, jamais la bonne suivant le réalisateur qui, d’ami, s’était transformé, comme dans un film d’horreur, en vampire destiné à nous sucer le sang !

Et le mécanisme de la répétition ! Toujours refaire jusqu’au clap final du «-C’est bon !» du réalisateur. Le même plan, le même geste, toujours différent malgré tout, à satiété !

A travers mon expérience du documentaire «Port Lympia» de mon ami Arnaud Gobain, où je faisais le personnage récurrent entre les scènes et la voix du narrateur et ce court métrage «ce manuscrit est admirable»,(rassurez-vous, ce n’est pas une carrière qui commence, juste des chemins de traverse entre mes passions), la réalisation d’un film est synonyme de temps d’attente et d’efforts de répétition...

Bon, c’est pas la découverte du siècle, mais après avoir fait une licence et maitrise de cinéma (éditée s’il vous plait !), toucher du doigt l’interprétation et participer à l’élaboration d’une véritable oeuvre collective est un enchantement !

Et puis, comme l’on dit (et c’est vrai dans ce cas !), l’équipe était formidable, l’ambiance géniale sur le plateau et mon épaule a tenu quand j’ai enfoncé la porte !

Bon, si vous avez besoin d’un scénario avec acteur amateur, vous savez où me trouver ! Ciao, et à la première de «mon» film... heu, de celui de Gérard Camy du BTS Audiovisuel de Cannes, mon ami, que je ne remercierai jamais assez de m’entrainer sur les chemins de la création !

les acteurs sur le banc... j'y suis aussi ! L'équipe de jeunes étudiants autour et Gérard Camy comme ange tutélaire au dessus ! L'aventure d'un tournage heureux !

les acteurs sur le banc... j'y suis aussi ! L'équipe de jeunes étudiants autour et Gérard Camy comme ange tutélaire au dessus ! L'aventure d'un tournage heureux !

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