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culture

Les Nuits Musicales du Suquet 2013

Publié le par Bernard Oheix

Les Nuits Musicales du Suquet ont offert des soirées bien atypiques en cette édition 2013, et si certains mélomanes ne se reconnaissent pas toujours dans les programmes proposés, d’autres s’y retrouvent malgré tout et une partie du public vient pour la rareté et l’émotion d’un Festival qui se démarque des manifestations du même format. Tous les Festivals classiques tentent de se régénérer, mais ce n’est jamais facile... Cette année, une partie du public purement classique a snobé les propositions pourtant bien alléchantes. A cela, ajoutons le cataclysme d’un mois de juillet sur la côte boudé par les touristes avec des taux de fréquentations des hôtels en chute libre (autour de 40 à 50% en moins que l’année dernière. Résultat, une fréquentation moins bonne et des rentrées financières écornées !

Mais bon, c’est la crise, et il n’y a pas de raison qu’elle ne touche que les pauvres !

Au programme de cette année :

Cyprien Katsaris en ouverture, c’est un symbole de ce que je tente de faire dans ce Festival classique : régénérer les codes, ouvrir des portes entre les genres et rendre la musique classique plus humaine, plus proche de notre environnement et de nos préoccupations. Voilà bien un grand pianiste qui ose transgresser les rituels du récital. Dans un savant dosage entre improvisations, découvertes de morceaux rarissimes et d’oeuvres plus larges, il excelle dans la pédagogie, l’éclairage didactique des oeuvres en les re-situant dans leur contexte. Il fait aimer la musique classique en la rendant vivante ! C’est en plus un homme adorable, plein de prévenance et d’attention.

Cette année, opération ambitieuse autour de Albert Camus. Un hommage rendu en musiques et en textes avec L’Orchestre de Cannes dirigé par Philippe Bender en support et Marthe Villallonga lisant des extraits du Premier Homme, ce roman au destin funeste, retrouvé inachevé après la mort de son auteur. Un roman ou tout son génie s’exprime avec les failles d’une construction inachevée pour nous faire comprendre la genèse d’un chef d’oeuvre.. En 2ème partie, la voix envoutante de Daniel Mesguich nous emportera sur les traces d’un «instit» du bled, une nouvelle déchirante, L’Hôte tirée de L’exil et le Royaume avec en prime, les images de la BD que Jacques Ferrandez a tirée de cette nouvelle, projetées sur les pierres du fronton de l’église dnas la nuit étoilée. C’est tout le drame de la Guerre d’Algérie qui se trouve en filigrane de cette histoire qui finit comme une tragédie antique. Une soirée fascinante.

La Carte Blanche à mon ami, Michael Guttman, Directeur du Festival de Pietrasanta, nous aura permis d’assister au concert d’un maître du Clavier, Boris Berezovsky, dans un programme russe ou il excelle.

J’attendais beaucoup de Mozart versus Salieri. Cette confrontation en musique tentant de mettre en regard leurs oeuvres manquait cruellement de pédagogie et d’explications pour que cette musique baroque de cour puisse s’épanouir. Dommage, car il fait nul doute que si l’histoire a quelque peu maltraité Salieri, il n’en reste pas moins que le génie d’un Mozart ne pouvait tolérer la moindre ombre ! Au passage, cassons le mythe d’un vieux Salieri accroché au pouvoir contre le jeune prodige. Seules six petites années les séparaient, tout comme en terme de précocité, Salieri n’avait rien à envier au jeune Mozart lui qui, dès l’âge de 13 ans, composa ses premières oeuvres... Mais voilà, l’histoire choisit toujours ses vainqueurs !

L’Hommage à Mikis Théodorakis fut émouvant. Un homme plusieurs fois revenu de l’enfer, donné pour mort plusieurs fois, enterré vivant deux fois, engagé de tous les combats pour la démocratie et qui eut le temps d’accumuler une oeuvre gigantesque dans tous les registres de la musique, du classique au sacré, du populaire à la musique folklorique. Et tout cela en en plus de ses activités sociales et politiques. Théodorakis un mythe en Grèce, qui en a bien besoin, même s’il est désormais un vieil homme !

C’est dans les chansons, (il en a écrit plus d’un millier), que son génie s’est imposé, partant sur des mélodies sophistiquées mais accessibles à tous, avec des textes d’une grande profondeur. Toutefois, cette création pour le Festival aurait gagné encore à la mise en valeur de quelques instrumentaux, et à une construction plus harmonieuse. Il n’empêche, que malgré ces petites réserves, le public ovationna le groupe et qu’un «sirtaki» endiablé vint secouer les gradins dans un rappel de folie.

Tout comme pour La Sinfonia Flamenca, de mon ami Juan Carmona, dont j’avais eu l’honneur de créer le premier mouvement, (il a 10 ans, déjà !) et qui fut présentée enfin, après avoir été jouée dans le monde entier, dans son intégralité à Cannes, son berceau. Accompagnée par l’Orchestre de l’Opéra de Toulon, cette symphonie mêle les codes de la musique savante avec ceux de la musique d’instinct du Flamenco. Juan Carmona est un grand monsieur, un artiste de la guitare, un visionnaire qui a su canaliser toute l’énergie de sa performance d'interprète pour donner une oeuvre composée sensuelle, à mi chemin entre une cérémonie profane et un récital sacré. Pour achever cette soirée de clôture, son groupe de Flamenco où rayonnait Jésus Carmona (un homonyme du compositeur, danseur de formation classique, adonis de la «talonnade» et roi du jeter de jambe) vint enthousiasmer le public, et achever en apothéose cette série de concerts.

A noter dans les concerts découvertes de 19h la performance de David Levy, un talentueux pianiste cannois, dans un programme de musique espagnole, qui a gagné à cette occasion, le droit de revenir en deuxième édition, sur la grande scène ! Et n’oublions pas Forabandit, l’incroyable trio composé d’un occitan, Sam Karpiena, voix et mandolocelle, Ulas Ozdemir, un turque au Baglama et au chant, et Bijan Chemirami, un iranien au zarb et percussions. Ce groupe envoutant venu des horizons de la Méditerranée, nous emporte dans des ballades dont on garde l’empreinte au fond de nous, comme un rappel entêtant d’une musique qui plonge ses racines dans notre inconscient d’homme libre !

Et pour finir, chapeau aux jeunes solistes de la région, John Gade (piano) et Dorian Rambaud (violon) et à Riccardo Caramella qui nous a proposé une soirée pour enfants avec les ineffables Babar et Pierre et le Loup servis par la belle récitante Maria Alberta Navello devant, pour la première fois, aux Nuits Musicales du Suquet, un parterre d’enfants éblouis !

Voilà une édition de plus ! Les résultats moyens en terme de fréquentation, compensés par une grande adhésion du public et un renouvellement partiel des spectateurs, nous projettent vers l’avenir, la saison 2014 où je vous retrouverai au paradis, tout là haut près des étoiles, entre les cris des sternes et les cornes des bateaux, sur la colline du Suquet... à Cannes, pour toujours !

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Spectacles à Montréal

Publié le par Bernard Oheix

Pléiade de jeunes Français dans ce Juste pour Rire de l’été 2013, par une canicule épouvantable, à faire rêver de se tapir dans les salles climatisées du Quartier des Arts, le plus longtemps possible.....

Deux volets, Zoofest, avec les jeunes pousses françaises en stand-up, souvent passées par Le Jamel Comédy Club, et une cohorte de comiques Québécois, pour 100 spectacles découverte, et le grand Festival Juste Pour Rire avec ses galas réunissant autour d’un thème unique (la sexualité, le sport, l’argent, la loose...), le gratin des humoristes de la Belle Province, mais aussi des shows enlevés et des comiques en série auxquels il faut rajouter les scènes en extérieur, gratuites, tous les jours, exercices casse gueule pour certains en train de chercher une page de notoriété dans la Ville du Rire.

Et tous cela en 15 jours de folie, au milieu d’autres manifestations (Festival du Cirque, Nuits d’Afrique, Festival de Cinéma...), dans un quartier grand comme un demi arrondissement parisien, au milieu d’une foule asphyxiante !

Bienvenue à Montréal !

Petite revue parmi la trentaine d’artistes visionnés !

En ce qui concerne nos jeunes Français, mention spéciale à Greg Romano, Dédo, Mohamed Nouar et Alban Ivanov.

Greg Romano, un niçois, impose un personnage en auto-dérision, à la limite du bon gout, exercice sur le fil qui peut à tout instant basculer dans le fou rire ou dans le «bide»...Il aura quelques moments de gloire à se souvenir ! Dédo, le Prince des Ténèbres, fait dans le noir et le caustique, tout en grincements et en rictus, un spectacle construit en interaction avec le public, sans filets, où il projette ses angoisses. Mohamed Nouar est l’arabe élégant et sarcastique, décalage permanent entre ce qu’il est sensé représenter et ce qu’il joue avec beaucoup de subtilité. Alban Ivanov lui, joue de son corps maladroit et mime beaucoup, scène d’anthologie avec un sac de farine dans lequel il plonge sa tête en une parodie d’un «Scarface» dont beaucoup se souviendront !

Dans tous ces comiques dont on entendra parler, mes deux coups de coeur vont à Bun Hay Mean et à Claudia Tagbo.

Bun Hay Mean est un chinois survolté, il a une énergie phénoménale, se tire de toutes les situations, entraine le public avec lui jusqu’à plonger littéralement dans la foule. Il est sans limites. Avec lui, les Vietnamiens deviennent les Arabes de l’Asie, les Chinois colonisent l’Afrique et les légendes poussent comme des feuilles sur des branches de bananiers. C’est un vrai grand, retenez son nom ! C’est en plus, un homme adorable, plein de tact et d’interrogations.

Quant à Claudia Tagbo, respect ! Elle est noire, petite, de grosses fesses dont elle joue avec dérision. Elle utilise son corps comme un tableau noir pour y inscrire les contours d’un paysage imaginaire. Sa face s’illumine, elle roule des yeux, tire la langue, danse, mime, et entre les traditions africaines, la place du père, l’éducation des enfants et sa vie sentimentale, tout passe à la moulinette des idées toutes faites, des images convenues et se termine en un immense concert avec le public. Attention, succès et rires garantis !

Dans les grands shows, il faut noter une comédie musicale qui débarquera en France l’an prochain et dont vous entendrez parler. Hairspray, replonge dans les années soixante, la ségrégation et l’ambiance «high school». Une jeune adolescente corpulente devient une star de la danse grâce à ses amis «blacks» dans un Baltimore plein de préjugés, entre les «bimbos» blondes racistes et celles qui vont se décoincer et trouver l’amour et la vie !

Plaisant, dans une belle mise en scène qui met en valeur une très belle distribution d’artistes chantant, dansant et jouant à la perfection, un vrai moment de détente.

Signalons la présence de Die Mobiles, jeu d’ombres sur des corps qui se désarticulent et recomposent une réalité mouvante, les vainqueurs de l’émission «Incroyable Talent» dont Gilbert Rozon, le capitaine du navire Juste Pour Rire est un membre du Jury particulièrement caustique et actif !

Et comment ne pas signaler le Gala Komedy Majic Show qui réunit autour d’Arturo Brachetti des magiciens dans un processus décalé et atypique ! Un angle de vision déjanté, entre la prouesse des numéros et une présentation toute en humour, enchaînement virevoltant et surprenant qui permet de rire en s’émerveillant. Brachetti reste un grand enfant, apte à s’enthousiasmer et à entrainer le public dans son monde d’illusions !

Signalons un excellent «Gala de la Loose» présenté par Jean-Luc Lemoine et Simon Gouache, un Québécois dont le talent acide est au service d’une charge contre les Français et les Parisiens à donner envie de lui répondre par l’humour.

Pour ce faire, il suffit de l’envoyer assister au spectacle des Pic-Bois, «Corps à corps avec frite et moule», une troupe locale déjantée dans un spectacle sur le corps et le sexe à faire hurler de mauvais gout et de médiocrité. Ce show manifestement est un «hénaurme» succès la-bas et concurrence l’accident industriel du Festival, une pièce de théâtre, Un homme, deux patrons, tiré avec beaucoup de cheveux d’une oeuvre de Carlo Goldoni, dans une mise en scène indigente et le vide abyssal d’une agitation épileptique d’acteurs à la dérive !

Comme quoi, même chez nos cousins entreprenants et dynamiques du Québec, la perfection plonge parfois dans la misère de l’échec !

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Editorial du Suquet

Publié le par Bernard Oheix

Voilà en avant-première l'éditorial que j'ai composé sur les Nuits Musicales du Suquet dont je suis le Directeur Artistique.

J'espère que cela vous donnera l'envie de venir sur les remparts de l'Eglise, tout en haut de Cannes, dans une de ces nuits étoilées où l'on peut prendre conscience que le monde est beau, que la musique est belle et que les les sternes qui planent ent en piaillant dans l'azur de la scène ont bien de la chance.... 

Et pourquoi pas vous ?

 

Rêves d'ailleurs

Chaque édition d’un Festival est une aventure, chacune nous offre son lot de mystères, ses rendez-vous ratés compensés par ses heureuses conjugaisons, une étrange alchimie dont le résultat ne dépendra que de votre adhésion... ou pas !

La programmation idéale n’existe pas. Il n’y a que l’impérative nécessité d’offrir des moments magiques de rencontres, de découvertes, de plaisirs, de communions. Et de ce point de vue, juillet 2013 devrait vous permettre de rêver à nouveau, la tête si près des étoiles...

Que ce soit avec l’Orchestre Régional de Cannes PACA dirigé par Philippe Bender qui invite, sur les rives de la Méditerranée, à goûter la poésie et la musique d’Albert Camus, avec les mots si forts d’une Marthe Villalonga et d’un Daniel Mesguich en contrepoint...

Que ce soit dans cette rencontre si belle où l’histoire est convoquée, d’un affrontement célèbre, Mozart versus Salieri, que le premier par son génie écrasa à jamais... Mais qui est Salieri, quelle musique réelle sous ce nom que le vent de la défaite emporta ? nous la redécouvrirons, et nous nous apercevrons peut-être, ce sera à vous de le dire, que les notes de musique ne meurent jamais !

Où bien avec Cyprien Katsaris, dans un programme interactif que le public guidera, surprises et connivences, quand le génie au piano permet toutes les audaces et rompt la forme d’un concert classique pour lui donner une puissance et une force sans mesure.

Mais aussi la Sinfonia Flamenca dont le premier mouvement fut créé à Cannes il y a quelques années et que l’Orchestre de Toulon nous offrira enfin dans son intégralité en prolongement d’une fête espagnole où la musique et la danse seront à l’honneur.

Et encore, un clin d’œil au Festival de Pietrasanta dirigé par Michael Guttman, qui viendra accompagner le fantastique Boris Berezovsky et le quatuor... dans un programme dédié à la musique russe.

Et Mikis Theodorakis, un des artistes qui a jonglé en permanence entre le classique et le populaire. Du Cantique des cantiques au thème de Zorba le Grec, il n’y a que quelques pas aux sons d’un bouzouki qu’il franchit avec gourmandise.

Tout cela sans oublier les quatre concerts de 19h comme des perles serties dans l’écrin de la cour du Musée de la Castre. De jeunes talentueux solistes de la région (John Cage et Dorian Rambaud) à David Levy dans un programme Espagnol (encore et toujours l’Espagne si généreuse et fascinante), Riccardo Caramella ou quand la musique des petits flirte avec le plaisir des grands, pour finir avec Forabandit, une extraordinaire fusion entre la musique orientale et l’esprit des troubadours, produit d’une résidence d’artistes sur les nouvelles musiques traditionnelles, entre la mandole, le «baglama», un luth turc, et des percussions iraniennes pour l’enchantement d’une nuit saupoudrée de mystère.

Voilà, à vous désormais de vous inviter à ces rencontres, d’habiter cet art d’un bonheur fugace mais si réel, de rêver jusqu’à la naissance du monde, jusqu’au début du bonheur à l’unisson.

Et qui aurait imaginé qu’un fil étrange, celui de la Méditerranée se fraie un chemin à l’intérieur de ces propositions... De Chypre à Mikis, de Salieri au Festival de Pietrasanta, du Flamenco à cet Hommage à Albert Camus...

Parfois, l’histoire nous convoque bien malgré nous sur nos rives si belles !

 

Bernard Oheix


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Lettre à Patrick Raynal, écrivain.

Publié le par Bernard Oheix

Il y a des rencontres fortes, des personnalités qui marquent et façonnent notre existence. Patrick Raynal fait parti de ces gens que je suis heureux d'avoir connus. On en a passé des heures à rêver ensemble d'un monde meilleur dans ce début des années 70 si riche en tension et en action. Et puis il a pris son envol, il est devenu écrivain, directeur de collection, sa vie a épousé les mots et il en a fait une longue et belle phrase. On ne s'est jamais perdu de vue même si les distances parfois entretenaient ce mystère du passage de la jeunesse au statut d'adulte affairé à se dépêtrer afin de construire sa propre vie, entre travail, famille, et un passé qui nous cheville au corps.

J'ai fait la mienne, heureuse, intense, mais toujours, un de ses livres me rappelait que nous avions partagé le même rêve d'écrire.

On vient de se retrouver, un peu plus, et comme si le temps n'avait rien effacé, nous nous sommes reconnus, encore et toujours.

Et puis il m'a offert son dernier opus et j'ai eu un vertige, l'émotion brute de savoir que derrière ses mots, il y a un peu de nous. C'est son talent qui donne un sens à des vies. Il vient, pour moi, de sortir de la littérature pour entrer de plein pied dans le monde beaucoup plus vaste des porteurs de lumière.

Ce livre est un éblouissement !

Lettre à ma grand-mère. novembre 2010. Flammarion

 

 

Cher Patrick,
je viens de terminer "Lettre à ma grand-mère".
J'ai toujours pensé que tu avais une vraie personnalité, du style, que tu savais y faire... trop parfois, un peu faiseur d'ailleurs, à l'image de ce héros de la révolution que tu incarnais
 dans notre jeunesse estudiantine niçoise, de ce Patrick Raynal truculent, espiègle, doté d'un sens de l'humour et d'une capacité d'observation hors du commun que j'ai connu. Tu avais juste ces quelques années de plus qui te donnaient l'expérience, qui t'autorisaient d'être devant moi comme un repère… 4 ans, c'est rien à 60, mais énorme, un fossé, à 20 ans. 
J'ai toujours été fier de ce lien ténu d'amitié, moi qui ai connu par mon métier, beaucoup de gens célèbres, j'avais eu cette chance de te connaître avant ton succès !
J'ai eu mes quart d'heure de gloire, plusieurs, mais ces mots dont je suis persuadé être apte à les dompter, je ne les ai pas suffisamment aimés pour leur donner une vie propre.
On pourrait aussi imaginer aussi que quand j'en avais le temps, je n'avais rien à dire, et que dès que j'ai eu beaucoup de choses à raconter, je n'ai plus eu le temps de les écrire.
Tu ne peux pas imaginer comme j'étais fier (et un peu jaloux !) de Very Nice et surtout d'Un tueur dans les arbres… Après, je m'y suis fait, tu étais un écrivain et moi non !
Un peu volontairement, j'ai coupé ce lien d'amitié, je voulais revenir, moi-aussi bardé de certitudes, un bon bouquin chaud sorti de presse comme passeport pour retrouver notre passé
et signifier qu'il s'était bien passé quelque chose dans cette ville atypique au coeur des années 70, que deux écrivains pouvaient par la magie du hasard naître en même temps, 
dans le même lieu.
Bon, il n'en a rien été, pire, tu m'infliges ce coup de génie de "Lettre à ma grand-mère". Tout ce que j'aime dans la littérature. Tout ce qui montre que derrière les mots, les phrases, il y 
a de la vie brute, du sentiment, de l'impudique, de la matière…
Tu touches si juste que tu prends tes lettres de noblesse à travers la vie de cette grand-mère héroïque. J'ai presque envie de dire que je suis jaloux de ta résistante aïeule, de ton Général Pfister, d'une saga familiale qui t'offre le vertige de plonger dans l'histoire, de ce qui se dessine à travers toi et te confère une dimension d'auteur à part entière.
Le texte de ta grand-mère est fort, dérangeant, situé dans un au delà de la littérature renvoyant à une horreur difficile à conceptualiser… mais le tien est une plongée déroutante et émouvante dans l'univers des mots, les vrais, ceux qui dévoilent la réalité et grandissent celui qui les structure et leur donne une existence, leur offre une vie propre, organise le chaos, transcende la matière.
Voilà mon Patrick ce que je voulais te dire…
Et le fait que j'ai pissé au lit jusqu'à 15 ans et qu'un psychiatre me "soigna" à coup de phénobarbital et de trimétadione en annonçant à mes parents que je ne ferais jamais d'études... n'est qu'une facette de l'étrange attirance que ton texte suscite en moi !
A la revoyure compadre !

 


 

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Nono, Jones, Le Forestier et les autres

Publié le par Bernard Oheix

C'était la nuit de la guitare en hommage à Maxime Le Forestier. Une pléïade de musiciens exceptionnels réunis par le plaisir de jouer ensemble dans une soirée où tout était possible...même l'inconcevable !

La rythmique était assurée par trois instrumentistes hors classes, Dominique Di Piazza et Fred Vinquant à la basse et Franck Agulhon à la batterie, des métronomes donnant une sécurité absolue aux solistes, tendant un rideau de notes comme un filet de protection sur lesquelles il ne restait plus qu'à ourler des partitions enlevées. Ils tiendront tout le concert au bout de leurs doigts sans faillir.

Manu Galvin, nounours chaleureux qui donne du sens à l'idée même d'un phrasé musical, une sensibilité hors norme dans la maîtrise de son instrument se dévoile comme un conteur chaleureux. il est un interprète romantique, un toucher bien spécial, une façon si douce de se glisser dans les mélodies en ciselant le silence de ses perles serties de fulgurance.

Nelson Veras, un jeune Brésilien, éblouira par son jeu tout en retenue, d'une délicatesse et d'une puissance étrange, comme si les influences conjuguées de sa culture d'Amérique du Sud et celles d'un son plus européen produisait un musicien sans frontières, ivre de toutes les libertés.

 

Nono fait pleurer sa guitare. Revennu de tous les sommets et de toutes les aventures du show-biz, tutoyant les plus grands, il reste un incomparable instrumentiste au toucher sans égal. Il possède une aptitude à faire corps avec son instrument et à transformer la plus simple des mélodies en opéra sauvage, en hymne à la déraison, en tonnerre de sons où le chaos ne plie à sa volonté de l'orchestrer. C'est Nono, un homme de coeur, dans toute sa simplicité, un génie de la guitare qui s'avère un gentleman pétri d'humanité.  

Maxime était la star, celui pour qui cette constellation de musiciens s'était réunie. Il va jouer son rôle à la perfection, distribuant les temps d'exposition, permettant à chacun de s'exprimer, débridant le concert autour de ses chansons complexes, difficiles à  interpréter. Il n'avait pas choisi un répertoire facile, piochant dans son répertoire celles qu'il affectionnait, pas toujours celles qui avaient rencontré le grand succès. Voix au grain si particulier... Même si l'âge le rattrape, il est d'une jeunesse éternelle, comme certains de ses tubes qu'il offrira en rappel au public. Merci Monsieur Maxime Le Forestier de rester cette icône de toutes les révoltes qui échappe aux temps de la soumission et au conformisme ambiant.  

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 Norbert krief dit Nono                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                               Maxime Le Forestier

 

Comment ne pas parler de mes deux complices. Jean-Claude Rapin, l'homme aux bottes rouge et à la crinière léonine. Avec lui, j'ai tout connu. Et avant tout l'amitié ! C'est un bluesman déjanté, qui peut introduire des distorsions dans toutes les mélodies les plus sophistiquées, toujours en rythme, apte à se mettre au service des autres, il part en vrille et explore des champs inconnues en cherchant à s'évader des contraintes dès que l'opportunité s'en fait sentir. C'est mon ami. C'est lui qui avait, à ma demande réuni ce panel de musiciens autour de Maxime Le Forestier. Un sans faute mon Jean-Claude. Bravo à toi.

Elève de Marcel Dadi et de Chet Atkins, Michel Haumont est le grans spécialiste du finger-style en France. il dévore des torrents de notes et distribue à la volée des cascades de sons si délicats que sa guitare chante sous les projecteurs. C'est un esthète serein, un magicien des cordes, un équilibriste de haut-vol et aussi un très vieux complice, depuis le début des années 90, du temps du Festival "Guitare Passion" qui nous a tant marqué.

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          Jean-Claude Rapin                                                                                                                                                                                                                                                             Michel Haumont

 

Reste Michael Jones. je l'ai programmé à de multiples reprises. Complice de JJ Goldman, il existe bien en dehors de son ombre tutélaire. Musicien sauvage, voix aux chaudes inflexions galloises, showman avéré, il est tout cela et bien plus encore. Il fait partie de ces leaders naturels qui s'imposent en douceur, par la puissance d'un riff, l'intonation d'un couplet qui touche le public au plexus, une façon d'être élégante et précise, d'accompagner et de prendre ses responsabilités quand la situation l'exige. Il est un grand de la musique... Il est aussi d'une simplicité et d'un abord chaleureux. C'est Michael Jones, le plus français des gallois, mon ami.    

 

 

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                                                             Michael Jones. photo d'Eric Dervaux

 

 

Et si vous n'étiez pas là au rendez-vous, si vous avez raté cette soirée au Palais des Festivals de Cannes, alors tant pis pour vous ! La prochaine fois, soyez attentifs, de tels moments sont volés à la logique du show-biz et du marketing, ils sont rares et uniques. Comme l'a déclaré Maxime Le Forestier sur scène, "des soirées comme celle-ci, nous en avons connu mais normalement, nous les partageons entre musiciens... sans le public, dans nos caves et pour l'amitié. Ce soir, vous étiez présents pour notre plus grand bonheur !"  

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Berling, Kennedy, Say, Sheller et Juliette

Publié le par Bernard Oheix

Retour sur le passé.... Mois de juillet, il fait beau. Des Nuits Musicales du Suquet Intenses, avec un public massivement présent ! Tous les soirs complets, le rêve d'un programmateur. Et surtout, des rencontres, de l'émotion, une certaine folie. Alors, pour le plaisir, retour en arrière, quelques minutes de bonheur !

 

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Charles Berling, Laure Favre Khan. Chopin sous les doigts de la sublime pianiste, Chopin dans ses mots, par ses lettres par la voix de l'acteur. Même si le spectacle manque encore un peu de réglages, ils nous emportent au coeur même de la création, dans une époque furieuse et dans les tourments d'un génie.

 

Numero-3 0827Deux êtres hors normes. Fazil Say, un pianiste éblouissant, un homme qui dompte le clavier, sans limites, hors de tout sentiers battus. Un être attachant,

turc en révolte contre tous les conformistes. 

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                                                                                  Nigel Kennedy. Bouffon superbe qui explose les codes. De Bach à Deep Purple, il n'y a qu'un pas qu'il franchit avec allègresse. Déroutant, histrion, clown céleste qui prouve que le classique est d'une modernité sans égale. Il va décoiffer une bonne partie du public qui lui réservera pourtant un triomphe à la romaine !

 

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Le moine et la titi parisienne. William Sheller en solo, ou le plus classique des modernes, un homme qui transforme son show en moment de bonheur et de confidences, en rapport direct avec le public, un homme qui a su devenir heureux....

Juliette ravira par sa gouaille et son humour ravageur. Elle s'impose dans ses chansons en osant tout, et ce d'autant plus que le frisson est bien réel quand elle chante son oeuvre si particulière entre la raison et l'absurde.

 

Tous les deux sont particulièrement contents de se retrouver dans un festival classique et nous transmettrons une bouffée de tendresse.

 

 

 

 

      Voilà, c'était il y a bien longtemps, une éternité déjà, mais ces moments si forts sont bien gravés dans la mémoire... pas seulement la mienne ! Ils sont aussi bien présents dans le coeur des spectateurs, parfois un peu déroutés, mais toujours en phase avec ces artistes qui dévoilent à l'évidence, que le classique est bien moderne et que l'art n'a pas de frontières quand il flirte avec les sommets....

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C'est quand les vacances ?

Publié le par Bernard Oheix

Bon, d'accord, c'est un peu provocateur pour quelqu'un qui, depuis le 1er juillet, est censé profiter du soleil et de siestes réparatrices et ne plus avoir, ni horaires, ni contraintes ! Le temps de la Liberté en quelque sorte, version paradisiaque et sociale de sous les pavés, la plage, 44 ans après !

 

Peut-être, mais c'était méconnaître le planning des Nuits Musicales du Suquet dont j'assume la Direction Artistique pour les 3 prochaines éditions. Le montage de Mozartissimo, un étrange OVNI réunissant 43 musiciens sous la férule de Philippe Bender de l'Orchestre Régional de Cannes Provence Côte d’Azur, 2 soprani sublimes (Amira Selim et Antonella Gozzoli) et une bande de techniciens sous la responsabilité de Paolo Micciché, le metteur en scène avec qui j'avais réalisé le Jugement Dernier/Requiem de Verdi, occupés à composer une ode visuelle aux ouverture et aria de Cosi Fan tutte, Don Giovanni et autres Flûte Enchantée… Compte tenu que c'était complet depuis 15 jours, que l'on a jonglé entre les plannings divers des uns et des autres, les aléas climatiques et la légendaire aptitude de la technique moderne à enfiler des  perles, un casse-tête pour nuits blanches ! Un triomphe pour le public !

Il y a aussi Sarah Nemtanu, l'authentique interprète de la musique du film Le Concert. A l'origine, elle devait inviter Mélanie Laurent, l'actrice aussi chanteuse pour une rencontre passionnante... Exit Mélanie en tournage avec quelque monstre sacré du cinéma américain et bienvenue à Juliette, son univers déjanté au service du classique dans un projet original... réconciliant tous les publics présents, classique comme moderne, enterrant toute querelle derrière le bon goût, l'élégance et l'humour !

Il y avait enfin un monstre sacré, ou sacré monstre, comme vous l'entendez...  Nigel Kennedy, avec son Bach qui se transforme en Deep Purple d'anthologie, smoke on water pour l'éternité, dégaine de clown triste mais passion extrême dans l'archet, errant sur tous les chemins de traverse d'une musique sans frontières !

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Le fou génial, le punk de la musique classique, l'homme qui fait voler les frontières en éclats... Nigel Kennedy, après le concert, tout heureux du tour qu'il a joué à ceux qui pensaient que la musique classique sentait la naphtaline !

 

Et notre curé national, William Sheller, voix miraculeuse pour une dialogue plein d'humour

entre sa musique, ses chansons en adresse au public... Deux heures à le séduire en communion, tout le monde debout pour une ovation finale à un homme qui n'a pas de raison de ne pas être heureux.

Restait Laure Favre-Khan, belle à la crinière blonde avec des doigts effilés et longs pour séduire l'assistance avec un Chopin que les mots de sa correspondance lus par Charles Berling rendaient tellement présent, comme si derrière le génie, la peur, la maladie, l'angoisse créatrice le rendaient si charnel que sa musique en devenait une lecture de sa vie.

Et pour finir, Fazil Say, un Turc habité, faisant chanter son piano, lui tirant des sons étranges en le faisant respirer. Tableaux d'une exposition... œuvre enchantée, quand la prouesse est au service de l'imagination, qu'elle prend le pouvoir pour nous entraîner dans un monde de perfection !

Si l’on rajoute les expériences de 19h dans la cour du Musée de la Castre, un jardin chantant avec des œuvres en bois sculptées dans des arbres, percussion/saxo, deux solistes russes et une magnifique création de Gilles Saissi autour du tango, méditation musicale et dansante en équilibre entre la voix de Carlos Gardel et les mélodies chaudes d’une Argentine moite par une équipe jeune de solistes sublimés !

6 soirées complètes, une programmation touchant plusieurs publics et rajeunissant l'assistance, un climat de sérénité et d'enthousiasme, comme si cette unité dans la diversité avait enfanté d'un monde un peu meilleur ! Je me souviendrai longtemps de cette édition, la première où je suis véritablement libre de programmer sans l'ombre tutélaire de son créateur, et des sourires heureux des 4000 personnes qui l'ont plébiscitée !

Alors à l'an prochain donc, pour une nouvelle aventure et en attendant, vive un début de retraite bien méritée en Crête  pour 3 semaines farniente à  l'ombre des verres d'uzo en fleurs ! 

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Lettre à mes amis comédiens...

Publié le par Bernard Oheix

Voici donc la lettre que j'ai envoyée à l'issue de cette première série. En effet, c'est à Nice en novembre 2012 que nous reprendrons Linge Sale pour 6 représentations au Théâtre Françis Gag. J'ai perçu, de jour en jour, une blonde s'affirmer en moi et une Martiniquaise s'épanouir... Miracle du Théâtre... Henri, lui, l'homme au maillot si explicite, reste un incorrigible technicien de base, fasciné de sentir la scène sous ses pieds et heureux de participer à cette aventure artistique. Bernard par contre reste dubitatif sur son avenir de comédien... 

 

Chers amis et néanmoins camarades.

 

blonde-tricot.JPGJe tiens à vous remercier tout particulièrement pour m’avoir :

-mis des seins, bas et jupe, perruques blonde ou noire, colifichets et fond de teint

-autorisé à pisser 4 fois en 30 mn dont une dans une bouteille d’Evian pendant la première partie de la pièce

-obligé à bouffer des sandwichs et grignoter des saloperies pendant 3 semaines au grand détriment de mon tour de taille.

-de m’avoir permis de visiter la région en faisant 20h de moto entre Cannes et Nice (dont 1h sous une pluie diluvienne) afin de pouvoir vous retrouver au Théâtre Francis Gag pour les innombrables lectures, répétitions et filages me laissant épuisé et incapable d’assumer ma vie sexuelle (d’autant plus que les stigmates de khôl, fond de teint et rouge à lèvres traînant sur ma gueule n’engageaient pas ma femme à avoir des élans de tendresse particuliers !)

-de m’avoir obligé de réveiller à minuit la mère de mes enfants afin qu’elle me fasse répéter unmart-1.JPG texte édifiant du style (-me farcir les gonzesses qui passent, -et mon cul c’est du poulet,-je vais te faire une ménagère à bigoudis…), tous textes qui portent sur les nerfs d’une femme normalement constituée réveillée par les angoisses de son mari dans le silence sépulcral d’une nuit du mois d’avril !

-donné une image particulièrement exotique et déplorable d’un Directeur de l’Evènementiel du Palais des Festivals de Cannes…d’autant plus que cette Martiniquaise me semble peu apte à lutter contre les hordes lepenistes qui semblent envahir nos urnes en nous cassant les burnes !

Spécial remerciement :

A Régis Braun pour la finesse de son choix (!!), la qualité générale de la distribution… incluant mon humble personne. C’est un beau final pour ma carrière de programmateur que nous avons fait ensemble et je suis très fier du bout de chemin que nous avons effectué de concert. Merci Régis d’avoir osé me faire passer de l’autre côté du miroir et de m’offrir ainsi, une nouvelle belle page dans ma légende en marche vers le panthéon des hurluberlus !

Collectivement à tous les acteurs, les vrais, ceux qui avaient du texte, du jeu et un rôle autre que celui de bouffon dans cette étrange pièce, Linge Sale de Jean-Claude Grumberg. Vous êtes vraiment des acteurs de talent, merci de m’avoir supporté avec tant de gentillesse et de professionnalisme. Rassurez-vous, ma carrière s’arrêtera avec cette pièce et je ne viendrai pas vous piquer vos émoluments… Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles !

bo Teeshirt

A Elisabeth, ma copine, celle avec qui je me maquilla, papota,bo-fumee.jpg babilla et tricota pendant que les garçons rivalisaient de machisme en roulant des mécaniques pendant la première heure totalement futile du spectacle !

A Marc, mon joggeur préféré, même si, à chaque fois qu’il me croisait avec ma perruque et mes seins imposants (90C), un haut-le- cœur manquait le faire vomir sur ma gabardine très « Bacallienne » qui n’en demandait pas autant !

A DEUX, au cocaïnomane Christian, en espérant que sa femme revienne. Tu es un acteur remarquable et je garderai toujours ton visage entre deux machines à laver pleurant sur son papier peint qui lui manque. Tu es plein de vitalité et tu m’as offert de bons conseils et des regards d’amitié particulièrement rassurants.

A UN, Jean-Jacques, sa mèche « nazouillarde » ne peut dissimuler son ouverture. Et même s’il se sent incapable de tendresse envers moi (Euh, envers Henri !), je ne lui en veux pas (!!). Tu m’as aidé à mieux comprendre la place d’un acteur, son rapport au metteur en scène, les petits trucs qui font que sur la scène, du chaos naît la lumière. Merci à toi pour cette leçon de choses… Cela ne faisait que 30 ans que je programmais du théâtre, désormais, je sais ce qu’est un acteur !

Et puis, à toute l’équipe du Théâtre Francis Gag, magnifiquement managé par un Pierre imposant, impavide, résistant aux crises d’un metteur en scène hypocondriaque, toujours prêt à rendre service avec un Pascal heureux à ses côtés. Merci Peter de m’avoir permis de papoter avec ta femme et d’avoir reluqué sa combinaison pendant qu’elle me maquillait !

Et puis Françoise, son soin dans le choix de mes chaussures (42 fillette), mes lingettes démaquillantes, mes bas filés, la perruque toujours prête, au petit soin pour moi  alors qu’elle n’en a plus rien à foutre puisque sa fille a réussi (enfin !) à me piquer mon poste !

Voilà, j’ai découvert sur le tard, l’ambiance d’une troupe, fut-elle éphémère, la réelle tension qui naît de s’exposer ensemble aux regards des autres, les connivences et petits secrets, engueulades et crises de nerfs, complicité et fous-rires, et l’extraordinaire humanité des belles personnes que vous êtes.

PS : Je sais que vous rêviez de voir mon jardin. Je vous propose donc de se retrouver tous en ma modeste demeure de futur ex-Directeur pour un  repas d’amitié. Je n’imagine pas, vu vos plannings chargés, tomber du premier coup sur une date où tout le monde est disponible… Alors à vos agendas !

PPS : on fera un curry de porc et des acras, je connais une Martiniquaise qui sait y faire !

La bise à toutes et tous. jogger.JPG

elisa.JPG

 

 

 

Toutes les photos des articles sur Linge Sale sont de mon ami et immense photographe, Eric Dervaux que vous pouver visiter sur son site : ericdervaux.com

 

 

 

 

 

 

A Elisabeth, ma copine femme de la troupe et à Marc, le Joggeur impérial de la

distribution !

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Linge Sale (1)

Publié le par Bernard Oheix

 

Mon jardin, toujours, lieu des grandes décisions de la programmation… C’est plus facile avec un bon rosé et des copains autour de la table de concevoir des projets ! Printemps 2011, Régis Braun, un metteur en scène ami. Ensemble, nous avons créé quelques belles pages de la culture Cannoise depuis 15 ans. Jusqu’au bout de la nuit de Rezvani, avec un pianiste perché dans les cintres, un étang sur scène (là, il avait fait fort, le bougre !), Schweik 2000, à la médiathèque de Cannes, libre interprétation de la pièce de Milan Kapel, déambulations dans les jardins luxuriants autour d’un homme qui devient le jouet des autres mais que son innocence protège de la méchanceté des autres et des institutions. Victor et les enfants au pouvoir, La fausse suivante de Marivaux et On purge Bébé de Feydeau complètent ce panorama d’un théâtre de réflexion et de divertissement dans un processus de création régionale et de productions autonomes.

Avec Régis B, on a souvent rêvé que nous transformions le monde (du théâtre), mangé des huîtres à Marseille en assistant à une trilogie d’Eschyle (ou d’un autre Grec… Je ne sais plus exactement !), imaginé des plans improbables, tenté de faire un Brecht (Je n’ai jamais, en 15 saisons pour près de 200 pièces, pu accueillir un Bertolt Brecht, sniff !). Alors, au crépuscule de mon ultime opus, toujours dans mon jardin, je lui propose une dernière wild-card pour avril 2012. Il acquiesce et m’assène débonnaire : « -OK, mais je choisis la pièce et il y aura un rôle pour toi ! ». C’est typiquement le genre de chiffon rouge auquel je ne peux résister. Il me connaît le bougre ! J’opine du bonnet en resservant une tournée de verres de rosé et on passe à autre chose tout aussi important, du style nature du dessert ou couleur du pousse-café !

Le temps s’écoule, le programme de la saison 2011/2012 « Donner du goût à vos sorties » sort avec Mon ami « Caramella fait son Cinéma » en ouverture, La Nuit de la Guitare avec tous mes potes, Le Crazy Horse, Huun Huur Tu, Hubert-Félix Thiéfaine (qui a l’obligeance de rafler 2 Victoires de la Musique un mois avant et par conséquent de me remplir le Grand Auditorium), et un mois d’avril final en apothéose avec Le Canto General (cf. mon article précédent), Linge Sale de Jean-Claude Grumberg dans une distribution comprenant Jean-Paul Icardi, (un des pseudos que j’utilise régulièrement  quand je veux cacher certains aspects de ma vie secrète) et les Voix Passions, ultime concert produit par un certain Bernard Oheix qui aura été le Directeur de l’Evènementiel du Palais des Festivals de Cannes de février 1992 à avril 2012 !

C’est dans le courant de l’été (donc trop tard pour pouvoir intervenir !) que Sophie Dupont, mon adjointe et future remplaçante, me demande si j’ai vraiment lu la pièce et si je sais quel rôle je vais interpréter. Que nenni !

blonde jambe

Et je me plonge dedans, découvrant avec horreur (et un zeste de fascination !), que je vais entrer en début de deuxième partie habillé en blonde patinée, pour revenir en Martiniquaise explosive, et finir en technicien de base désorienté ! Et ce sera ma dernière pièce en tant que Directeur de l’Evènementiel, le 20 avril 2012 ! Heureusement !

 

1ère lecture en décembre 2011 avec toute l’équipe au complet, une mise en bouche pour analyser les personnages, leur donner du sens, tenter de saisir ce que Jean-Claude Grumberg, (9 Molières, plusieurs Césars, auteur de L’Atelier) a bien voulu imaginer dans cette œuvre complexe sous-titrée (par lui-même), « une pièce sur le moins disant culturel ! ». JJ

 

Mi-mars, les comédiens entament leur marathon au Théâtre Francis Gag de Nice où se déroulent les répétitions et je les rejoins fin mars pour travailler ma partie finale. Longues journées épuisantes, de 10h à 19h, lectures à l’ espagnole ou italiennes, filage. Apprentissage du texte aux forceps (mais comment font-ils pour l’ingérer, des pages entières à la virgule près), répétitions des gestes et déplacements…

 

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Essayage des costumes, une blonde patinée aux gros seins, lunettes, bas, maquillage. Escapade en ville afin de trouver des chaussures à hauts talons (compensés !), tête des vendeuses devant mon 42 fillette… Confection de ma tenue Antillaise par une amie du Palais, elle-même Martiniquaise, avec bijoux, chapeau et apprentissage de la méthode pour se maquiller en noire voluptueuse (!!)… et toujours ces journées et soirées épuisantes à travailler, ressasser inlassablement des bouts de textes et des attitudes, des positionnements dans un décor qui prend forme petit à petit. La nuit, je réveille ma femme pour des lectures de textes, je lui impose des répétitions forcenées dès que nous roulons en voiture afin de mémoriser ces foutues 30 répliques rétives et ces 5 tirades un peu plus longues qui s’obstinent à me fuir au moindre problème de déplacement sur scène ou de stress…

 

La peur d’être ridicule, la voix haut perchée de mes premières interventions, les repas sandwichs et les crises de rire et tensions d’une microsociété soudée autour d’un projet mais qui vit sous l’œil des autres.

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J’ai découvert, après 30 années à programmer des acteurs, chanteurs comédiens, « la vie d’artiste » de l’intérieur, les petits riens, échanges et autres réglages permanents, les breaks et le trac de chacun, même des plus aguerris, au moment de se livrer au public. La distribution particulièrement brillante, de talentueux comédiens me permettant dans ce rôle « exhibitionniste » de faire illusion sur ma nature d’amateur éclairé.

Enfin, la symbolique incroyable de terminer seul en scène (c’est dans la pièce originale !), moment jouissif renvoyant à la fin de ma carrière professionnelle, écho de 15 ans de programmations, de la création de ces « Saisons à Cannes » en 1997 avec Sophie Dupont, mon adjointe qui me succèdera au 1 juillet prochain.

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2000 groupes, artistes, compagnies et troupes pour des heures de souvenirs grands ou petits, de triomphes et de bides, de pleurs et de rires…de prouesses et de ratés. Mais on y reviendra plus tard.

Pour l’heure, la blonde, la Martiniquaise et Henri, le technicien de base sont heureux de vous saluer !

 

 

 

Vive le théâtre !

 

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Canto General

Publié le par Bernard Oheix

Début des années 70. L’icône Mikis Theodorakis est en exil à Paris, libéré des geôles des colonels grecs grâce à une formidable mobilisation des intellectuels et du peuple grec. Pablo Neruda est ambassadeur à Paris d’un Chili dirigé par Salvador Allende qui tente une transition démocratique ! Les deux exilés vont croiser leur chemin. Theodorakis décide alors de mettre en musique le Canto General, long poème fleuve, pièce maîtresse de l’œuvre du poète, composée pour partie en prison dans les années 50 par Pablo Neruda qui obtient en 73 le Prix Nobel de littérature.

Une version pour orchestre « folklorique » avec bouzouki, percussions naît, bientôt complétée par une seconde sous forme de cantate avec orchestre symphonique et chœur, celle qui sera officialisée le 7 septembre 1974 à la Fête de l’Humanité et un disque LP (vous savez les fameux vinyles de l’époque !) enregistré en live par EMI chez Pathé Marconi. (Incroyable, ces noms qui fleurent la France d’un après 68... Nostalgie !).

Ce disque, je l’ai écouté en boucle. Tête ronde de Neruda, chevelure de ébouriffée d’un jeune Theodorakis, rouge et noir, dans une distribution d’exception avec Maria Farandouri et Petros Pandis (mezzo et Baryton), les Percussions de Strasbourg  et le Chœur  National  dirigé par J. Grimbert.  Il n’était qu’une partie de l’oratorio intégral, 4 chants sur les 13 originaux, mais sa force cosmique, alliage d’une poésie épique de l’homme et d’une musique populaire venant se greffer sur une orchestration classique, en déroutait plus d’un, inclassable, OMNI (objet musical non identifié), type Carmina Burana pour païen ou Requiem pour existentialiste…

Et puis, les années se sont écoulées, l’œuvre est tombée en désuétude malgré une version armada germanique pour grand orchestre. Sa complexité technique (orchestre + chœur + solistes + percussions), sa sophistication artistique, la normalisation de la Grèce comme pays européen démocratique, la renvoyant vers le néant du sirtaki !

Et pourtant, certains de ces airs sont encore dans ma mémoire, préservés, intacts. Le souffle grandiose d’une histoire de l’humanité transcendé par des mots et des notes ciselés dans l’or du temps ! America Insurrecta et Los Libertadores où les sons de la langue de Pablo Neruda se mêlent si étroitement aux notes en fusion d’un grec exalté !

J’ai attendu pendant 15 ans un « Canto » à programmer à Cannes, tellement espéré, jamais croisé. J’ai accueilli des Requiem (Mozart, Verdi), 2 Carmina Burana, des opéras en « novlangue » (Dogora), des percussions, des spectacles complétement décalés… mais jamais de Canto General… jusqu’à ce que je me décide enfin, au crépuscule de ma carrière, avec mon ami Richard Stephant, mon complice de nombres opérations bizarres, à produire ce Canto qui se refusait à moi ! Après tout, on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même !

C’était il y a plus d’une année, on vient de réaliser ce Canto General à Cannes !

Les boucles sont parfois faites pour être bouclées !

 

Vendredi 13 avril. Théâtre Debussy du Palais des Festivals. Le public arrive, s’installe. Angélique Ionatos déclame un poème de Pablo Neruda en ouverture. Elle est frêle, voix rauque, robe rouge et tunique noire. angelique

 

Voici venir l’arbre, c’est l’arbre

De l’orage, l’arbre du peuple.

Ses héros montent de la terre

Comme les feuilles par la sève,

Et le vent casse les feuillages

De la multitude grondante,

Alors la semence du pain

Retombe enfin dans le sillon.

 

 

 

 Puis le premier chant. Les chœurs montent dans la salle. L’orchestre dirigé par Giulio Magnanini (en remplacement de Philippe Bender, souffrant) s’attaque à cette partition très complexe, sophistiquée, soutenu par 3 percussionnistes qui découpent les sons et impulsent une rythmique syncopée  en brisant les mélodies. Spyros Sakkas, tête léonine de barde encadré de cheveux blancs joue de sa voix en scandant les fièvres d’un peuple en lutte.

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C’est parti pour 1h20 d’extase, devant une assistance médusée et fascinée. 15 minutes d’ovation finale, rééditées le lendemain pour une seconde représentation.

 

Envolées les angoisses d’un financement aléatoire et l’abandon en cours de chemin des deux coproducteurs prévus (il faut dire que pour cet Italien et ce Grec pressentis, que la conjoncture économique des derniers mois n’était pas au zénith et peu propice à un investissement culturel, fut-il modéré !).

Evanouies les interrogations sur un chœur amateur, magnifiquement préparé par Giulio Magnanini, mais manquant de volume (une vingtaine de choristes en plus n’auraient pas été du luxe pour cette œuvre où les mouvements choraux épousent les soubresauts d’un peuple en lutte et doivent passer par-dessus la musique pour atteindre à l'épique). Ils compensent grâce à une énergie et une passion bien présente leur manque de technicité.

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Qu’importent le manque de temps de préparation, les quelques soucis techniques de sonorisation, l’absence des images de  Paolo Miccichè (le metteur en scène avec qui j'avais réalisé le Jugement Dernier) initialement prévues, la complexité réelle d’un entreprise réunissant un orchestre régional, des choristes amateurs, des solistes grecs.

La réécriture préalable de l’œuvre sous l’œil de Mikis Theodorakis par un jeune compositeur (George Dousis), et le pianiste attitré de Theodorakis, Yannis Belonis, l’adaptant pour une intégrale jamais réalisée par un ensemble classique de type « mozartien » (45 musiciens), confère alors une modernité à cette cantate qui rend écho aux convulsions du monde actuel.

Que le glaive de l’impérialisme soit remplacé par le rouleau compresseur de l’ultralibéralisme ne change rien à la réalité de la souffrance des gens, l’écart entre les nantis et les démunis s’accroît, la douleur est un bien en partage pour les plus nombreux.

Cet Oratorio vient comme un coup de tonnerre afin de réveiller les consciences. Les combats ont changé, les armes sont différentes, mais l’art est toujours au service d’une certaine idée de la beauté et de la justice !

Et moi, avec mon copain Richard Stephant, le producteur exécutif du Canto General, on aura modestement réécrit une page d’histoire de l’Art. Un CD sera (si la qualité du live le permet), pressé et je pourrais à nouveau écouter ce chant magique d’un monde rêvé.

En attendant, dans le souper qui réunit tous les acteurs de cette saga improbable, nous avons mangé et bu, et rit et pleuré sur un chapitre de l’humanité encore à écrire : celui de la Liberté triomphante et du bonheur en héritage !

 

Moi, j’ai composé mon propre Canto General les 13 et 14 avril à Cannes !

 

PS : les photos sont de mon ami Eric Dervaux... 

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