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Festival du livres de Nice

Publié le par Bernard Oheix

Festival du livres de Nice

Un festival du livres, pour un auteur, c'est l'angoisse d'être confronté aux monstres de la littérature qui règnent sur les ventes est attirent en masse le public (n'est-ce pas monsieur Foenkinos !), c'est aussi l'espoir permanent d'une vente, d'une rencontre, d'un espoir instillé par un passant attentionné, par une autrice qui trône à vos côtés et se débat ans la même problématique que vous, exister, toucher l'autre, éclairer son avenir !

Je suis donc arrivé en ce vendredi 31 mai, la boule au ventre, me suis installé sur le stand de mon éditeur Ovadia devant ma pile de livres, et dans le soleil irradiant, attendu mon futur lecteur, celui qui s'affranchirait de 18€ pour m'offrir le rêve d'une émotion en partage !

Disons-le crûment, les débuts furent difficile ! Les 8 auteurs présents des éditions Ovadia, sous l'oeil complice et maternel de Laurence Berlioz, la responsable de notre petite tribu,  n'en menaient pas large. Et quand les portes du Festival s'ouvrirent, une cohorte de lecteurs potentiels, l'oeil fureteur, se déversèrent entre les rangées de stands, les visages hiératiques des auteurs devant les piles colorées de livres aux noms tout aussi improbables que le mien.

Et le temps s'étira jusqu'à l'infini, même si à mes côtés, une autrice, Roselyne Giacchero, vendait et trustait les achats de notre groupe. Heureusement qu'elle était sympathique et trouvait les mots pour me consoler, sinon, je l'aurais détestée !

C'est donc sur le score pharamineux de 3 livres de La Métisse du peuple des Épines et d'un Les joueurs du Dimanche de mon fils Julien Oheix, un livre remarquable tout droit sorti des presses dont je vous reparlerai, que la première journée s'acheva avec un retour sur Cannes, le moral dans les chaussettes, et un bouchon s'ur l'autoroutes de plus de 15 kms qui me fit définitivement haîr l'idée même d'y retourner le lendemain !

Surtout, que le lendemain, les choses n'empirèrent point mais ne s'améliorèrent pas ! Le samedi, en fin de journée, malgré le vent entêtant, je n'avais réussi l'exploit que d'en vendre 3 autres des miens, et un seul de mon fils en prime !

6 métisses et deux joueurs du dimanche achetés pour 18h de présence, l'horreur absolue que mon éditeur, au moment de mon départ, la mine déconfite, balaya en me serrant dans ses bras pour me donner de l'espoir.... "-c'est demain que cela va se passer pour toi, ne perd pas courage !"

Mais la nuit fut dure, je le concède !

Et quand, le dimanche se leva et que je fis la première vente de mon stand, enchaînant les achats sous l'oeil désarmé de mes collègues, je sus que Frédéric était non seulement mon éditeur mais aussi un prophète ! Toute la journée, par vagues, je vendis mon âme avec délice, accrochant le passant avec délectation et obtenant 14 ventes de La Métisse et 3 des Joueurs du dimanche  pour culminer à 20 du mien et à 5 de mon fils ! Banco, et merci Frédéric Ovadia !

Bernard triomphant par mon ami photographe, le talentueux Éric Dervaux !

Bernard triomphant par mon ami photographe, le talentueux Éric Dervaux !

Alors que reste-t-il de ces 3 journées entre l'espoir et le bonheur... quelques livres vendus offrant un peu de baume au coeur de votre ego, des discussions passionnées entre auteurs et avec les acheteurs potentiels... bien sûr !

Mais ce que je retiendrai de ces longues heures, c'est le regard complice du dessinateur Beltramo évoquant les sorties de neige à Caille avec notre prof Dédé Aschiéri, c'est René, fendant la foule en voyant mon nom pour me rappeler que nous étions au Lycée Carnot ensemble, c'est Jacline qui évoque avec nostalgie ce Festival de Digne où nous étions allés voir Philippe Garrel, c'est Ginette, la maman d'amis qui me transmet le bonjour de visages qui se sont fondus dans l'ombre du passé, c'est Philippe né à Madagascar et fasciné par le destin de Talike ou ce couple dont la femme porte un collier Antandroy acheté à Tuléar...

C'est aussi tous ces amis, Isabelle et Luc, Patrick Mottard devant ses nombreux livres avec Dominique goguenarde devant nos angoisses, Zineb et son amie éclairant d'un sourire les travées du jardin Albert 1er, Badou et sa bande dont Bakary, joueur de foot, qui repartira avec le livre de mon fils Julien.

C'est aussi toutes ces autrices et auteurs qui partagent le même rêve que vous. Pascale est sa gifle magistrale d'un recueil de nouvelles sur l'amour, qu'avec ses partenaires, Sandrine et autres, elles réussirent à diffuser en épuisant leur stock de 45 livres. C'est Anthony Armando et son doux visage sur sa trottinette, Roselyne Giacchero, 40 livres vendus et ses mots de tendresse et de réconfort qui vous ouvre les secrets des portes du Nil et des pyramides.

C'est aussi ces inconnus qui s'arrêtent pour vous écouter, vous regarder et qui vous offrent un moment d'éternité !

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Festival du Film : This is the end !

Publié le par Bernard Oheix

Et voilà que retentissent les trompettes de la remise des prix du Festival 2024 !

Pour moi, 36 films au compteur, un score tout à fait exceptionnel compte-tenu de la situation, avec une partie de l'équipe de la Pampa en train de fêter le véritable accueil enthousiasmant du public dans mon jardin, deux petites filles (les miennes, Lise et Alma) sur les bras, et les difficultés générées par un système qui, malgré des salles loin d'être pleines, empêche l'accès aux séances de trop nombreux cinéphiles.

Mais 36 films exclusivement à la salle de la Licorne, couvrant toutes les sélections, c'est un beau score, et ce d'autant plus que cette édition nous aura réservé de belles surprises et un panorama mondial d'une grande qualité !

Et à tout d'abord, honneur à un cinéma français qui s'affiche dans une forme étonnante, multipliant les propositions originales, avec de jeunes cinéastes, de nombreuses réalisatrices, des actrices et acteurs portant des projets ancrés dans le territoire d'une France plurielle.

Il y a bien sûr, La Pampa d'Antoine Chevrolier, un 1er film magistral où, sur fond d'un rodéo à moto, une amitié indéfectible entre deux jeunes, le conformisme de conventions sociales qui condamne l'homosexualité de l'un pour son coach, l'amour d'un père qui ne sait l'exprimer si ce n'est dans sa passion pour la victoire en moto-cross, dessine un monde imparfait que rien n'entravera dans sa marche funeste. Ce film est appelé à obtenir un vrai succès populaire pour sa sortie à l'automne, tant, à Cannes, chaque représentation a débouché sur une standing-ovation.

Tout aussi envoutant En Fanfare d'Emmanuel Courcol qui mêle la musique et le la découverte du frère inconnu, tromboniste dans une fanfare, avec un chef d'orchestre célèbre atteint d'une leucémie. Une saga autour d'une famille que la musique réunit et qui survivra aux drames de la vie.

Le roman de Jim des frères Larrieu est une bouleversante ode à la paternité porté par un Karim Leclou d'une justesse incroyable. Père de substitution, il va élever Aymeric jusqu'à ses 10 ans et l'irruption d'un père biologique qui va lui arracher cet enfant et partir vivre au Québec. Des années plus tard, cet enfant revient pour solder ses comptes avec celui qu'il pense l'avoir abandonné. Un casting magnifique (Sara Giraudeau, Laétita Dosh...), une caméra qui s'approche des personnages dans les paysages grandioses du Jura, un bijou dont on ne sort pas indemne !

Animale d'Emma Benestan se déroule en Camargue, celle des taureaux et des chevaux. Une jeune femme (Incroyable Oulaya Amamra) va vivre un drame et n'aura de cesse de se venger, sur le fil d'une fiction onirique, entre le cauchemar et les souvenirs qui émergent petit à petit, elle réussira à reprendre son destin en main. Vision étonnante du monde macho des razzeteurs et de l'affirmation d'une femme qui communie avec les animaux pour se venger des hommes. 

L'Amour Ouf de Gilles Lellouche est un film passionnant sur l'éternel thème d'un amour fou d'adolescents qui ne pourra se conclure qu'après la violence, l'injustice et la prison. Clotaire n'est pas armé pour affronter sa vie et ne s'exprime que par la violence, Jackie va meubler sa vie de vide. Ils vont pourtant se retrouver et affronter leur passion, réussir à tirer un trait sur le passé afin de s'approprier un avenir. C'est beau et haletant, c'est l'amour revisité dans un univers de fureur et de bruits. C'est une vision moderne mais si juste des sentiments éternels qui font qu'un homme et une femme sont parfois fait l'un pour l'autre contre les aléas du présent !

Il n'y avait pas que les films français pour briller, quelques perles d'horizons lointains venaient nous plonger dans des univers que nous ne voulons pas toujours voir et qui ouvraient des portes sur l'au-delà qui nous entoure.

Le Village près du Paradis de Mo Harawe (Somalie) décrit la survie quotidienne d'une famille désaccordée coincée entre des clans, dans un pays de misère et de guerres, avec des drones qui bombardent des cibles sur les routes. Manger est le seul objectif d'une journée de labeur à enterrer des morts ou vendre des tissus sur des étals de fortune. Pourtant, des femmes vont tenter de prendre leur destin en main et créer l'espoir d'un monde meilleur. 

Norah de Tawfik Alzaidi (Arabie Saoudite) joue de la même variation, celle d'une solidarité entre femmes dans un pays de misère, quand la fragilité de l'existence ne gomme pas la solidarité et l'entraide.

 All we imagine as light est un film indien en compétition d'une réalisatrice Payat Kapadia qui montre l'aliénation des femmes empêtrées dans un réseau de règles, un corset de liens qui les enferment dans la domination des hommes et des clans. Pourtant Prabha et Anu vont réussir à se libérer de leurs chaînes et vivre leur vie. Un germe d'espoir dans un océan d'aliénation.

Et je ne peux que terminer, même si je n'ai vu que 50% de la sélection, à l'heure de la montée du tapis rouge pour la remise des prix, par deux films en compétition qui pour moi, sont les deux bijoux de cette édition.

Ma Palme d'or va à La plus précieuses des marchandises de Michel Hazanavicius, un film d'animation moi qui n'aime que très peu l'animation. C'est un chef d'oeuvre qu'il aurait été impossible de tourner en réel et qui grâce à ce trait incroyable nous plonge dans les remugles de l'histoire pour faire émerger un conte de fée à vous tirer des larmes. Indispensable et merci monsieur Hazanavicius.

Et le prix spécial du jury est attribué à The Seed of the sacres Fig de l'iranien Mohammad Rasoulof, qui ose, dans un pays de dictature porter la parole de ceux qui refusent de vivre dans le passé, sous la botte de fer d'un régime qui les prive de tous les droits et des rêves d'un monde meilleur. Bravo à ce cri dans la nuit iranienne porteur d'un espoir.

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Festival du Film : 17 films et après !

Publié le par Bernard Oheix

Festival du Film 2024, et comme à chaque édition, ce frisson indicible à l'idée de partir sur les chemins de la découverte d'un 7ème Art libéré de toutes les entraves d'un monde sclérosé. Et en cette année 2024, avouons que la lecture de la réalité vaut bien la fiction la plus osée qu'un scénariste qui aurait abusé de produits illicites, puisse imaginer !

Nous nous préparons donc, comme de sages élèves qui auraient bien fait leurs devoirs pour la composition finale : aller au cinéma régulièrement tout au long de l'année, remplir un dossier en février avec une lettre de motivation afin de justifier le privilège d'un badge cinéphile, respecter les consignes de Cannes Cinéma, assister à la présentation, passer des heures sur son téléphone afin de tenter de trouver des places disponibles dans les quotas diminués des cinéphiles, trop âgés et sans intérêts pour les pontes du Festival ! 

Mais quand la lumière s'éteindra et que le cadre noir de l'écran s'illuminera, toujours cet incroyable sentiment de pénétrer dans une cité interdite où tout devient possible !

17 films en 4 jours, une moyenne raisonnable compte tenu de la présence en mon home d'une horde de cinéphiles venant de Corse, de Bresse et de Paris (sans badges, eux qui depuis plus de 10 ans débarquent sanglés de leur sésame mais que les contraintes actuelles condamnent à voler des places en catimini !).

Mais le nombre de films ne fait pas la qualité et du 15ème au dernier de ce matin, la sortie précipité après 30 minutes de projection, pour les 3 films... un chinois incongru de femmes qui chantent pendant une demi heure sans que ne se dessine la moindre esquisse d'un scénariste au travail, Rumours avec une pléiade d'acteurs (Kate Blanchet, Ménochet...) singeant un G7 improbable et qui ne cultive que l'ennui et le désir de vrais morts-vivants, et enfin Les reines du drame où des trans exacerbées se pelotent sans retenue et sans aucun espoir d'attirer notre attention !

Bon, mais heureusement, il y a aussi de bons films, de ceux qui touchent et nous donnent la certitude qu'une équipe s'est soudée afin de transmettre un message, une humeur, un désir de faire et de partage.

C'est le cas avec Les Fantômes de Jonathan Millet, (Semaine de la Critique) une fiction qui plonge dans les horreurs de l'après guerre de Syrie. Un commando secret traque les tortionnaires qui ont tué et violé au nom de la loi de Bachar... Une quête douloureuse, complexe et dangereuse qui nous attire dans sa toile et ne laisse pas indifférent. C'est aussi avec La femme à l'aiguille, (en compétition), le destin tragique d'une femme qui se retrouve complice dans un traffic d'enfants, un film saisissant et prenant qui pose le problème de ces naissances non désirées et débouche sur l'horreur du sacrifice. À voir absolument !

Vingt dieux, (Un certain regard) un premier film de Louise Courvoisier est une ode à l'amitié et à l'amour. Totone se retrouve en charge de sa petite soeur de 7 ans et décide de créer son propre fromage, un comté de qualité grâce à des expédients (vol de lait, recettes à dénicher et une bande de copains soudés autour de son projet fou. Film fort et fascinant sur la vie dans un village, l'espoir et le désespoir, l'amour et la lutte pour survivre. Nul doute que la caméra d'or ne sera pas loin de cette oeuvre sans complaisance aux relents de la vie de ses campagnes sans espoirs.

La mer au loin (semaine de la critique), de Saïd Hamich Benlarbi est une ode à l'espoir. Des clandestins sans papiers vivent à Marseille et un marocain va rencontrer l'amour auprès d'une Anna Mouglalis, sublime. Un retour au Maroc pour solder sa rencontre va dérégler son amour mais le film se terminera sur le bonheur d'accepter de n'être ni Marocain, ni Français, mais simplement un homme qui s'accepte et décide de prendre sa vie en main auprès de celle qu'il aime, sans frontières désormais !

La prisonnière de Bordeaux de Patricia Mazuy (Quinzaine des cinéastes) réunit Isabelle Huppert et Hafsia Herzi dans une ode à l'amitié, à la volonté de s'émanciper de deux femmes qui croisent leur chemin dans le hall d'une prison où elles viennent visiter leur conjoint respectif. Un film élégant, intelligent et qui offre deux facettes de la vie de femmes qui tentent de trouver un sens au séisme déclenché par des hommes de pouvoir qui les laissent seules pour trouver une solution à leur destin tragique !

Notons qu'après avoir été gardienne de prison dans Borgo, Hafsia Herzi est cette fois-ci, visiteuse de prison, et que son parcours dans le cinema devra un jour s'émanciper des portes des pénitenciers ! On l'espère pour elle tant c'est une actrice remarquable et touchante d'une grâce visuelle magique !

 

Il y a tant d'autres films dont on pourrait parler, et aussi tous ceux que l'on a pu voir. Mais il reste encore 6 jours de Festival pour dévorer d'autres oeuvres et la certitude de trouver des pépites qui nous ferons rêver d'un monde meilleur ou les êtres pourront s'émanciper de leurs chaines et atteindre un peu de ce bonheur qui nous tend les bras et que nous tentons de saisir désespérément.

Alors, je vais me précipiter vers Le Limonov de Kyril Serebrennikov en espérant m'embarquer pour un long voyage sur les traces d'un poète hors du commun !

Vite, le cinéma m'attend !

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Balaruc les bains : à l'ombre de Brassens !

Publié le par Bernard Oheix

Bon, le coup de la cure dans un établissement thermal, je ne l'avais jamais envisagé...mais à partir d'un certain âge, ou même d'un âge certain, quand un cousin vous confie qu'il en sort et se sent régénéré, que 3 semaines à l'ombre des jeunes filles en fleurs d'un printemps qui voit le Festival du Film de Cannes s'approcher à grands pas, sont une bénédiction, sur un coup de tête et les conseils d'une doctoresse adorable, on signe le parchemin de son engagement et l'on part pour cette expédition en terre inconnue chargée de vous remettre sur pieds !

Et me voici donc à Balaruc les bains, en face de Sète, sur l'étang de Thau, logé au Mas du Madre dans un bungalow cosy, avec terrasse inutilisable pour cause de vent et de pluie incessants !

Qu'à cela ne tienne, il va bien falloir les subir ces 3 semaines où mon corps doit s'exprimer sous les mains expertes de femmes et d'hommes habitués à triturer les dépouilles déchues de milliers de curistes en mal d'espérance d'une jeunesse à retrouver !

Dans le cimetière marin de Sète, une tombe pour l'éternité d'un homme qui savait s'affranchir des contraintes.

Dans le cimetière marin de Sète, une tombe pour l'éternité d'un homme qui savait s'affranchir des contraintes.

Dans une usine à gaz où des milliers de curistes se précipitent chaque jour, à toute heure, leur montre électronique au poignet réglant leurs déplacements, d'un atelier à l'autre, d'une piscine à une baignoire sulfureuse, des mains d'une masseuse sous l'eau au jet puissant projeté sur votre dos, de sièges qui vous torturent au vide d'un esprit qui s'égare à la recherche du temps perdu, les 2 heures quotidiennes de soins vous engluent dans des rituels abscons rythmés par les sourires et les soins d'un personnel attachant, esclaves de notre remise en forme mais si dévoués à leur mission. 

Je pense à Bénédicte chargée de diriger les jets de boue chaude sur vos articulations en vous prodiguant ses conseils avisés et son sourire, à Louanne et son accent chantant, vous plongeant avec bonne humeur dans une baignoire bardée de trous filtrant des jets d'air qui vont laminer votre corps, à Alexander, dont les mains vont dénouer vos tensions dans un massage sous l'eau... et à tous les autres, solidaires dans la volonté de permettre aux vieux corps fatigués que nous sommes d'espérer retrouver une nouvelle jeunesse !

Une machine de torture vous aspergeant d'une boue à 42 degrés, comme la preuve qu'il faut souffrir pour redevenir jeune et beau !

Une machine de torture vous aspergeant d'une boue à 42 degrés, comme la preuve qu'il faut souffrir pour redevenir jeune et beau !

3 semaines c'est long ! Mais c'est aussi l'opportunité de dévorer des plateaux d'huitres à 10€ à Bouzigues, de dévorer des Tieles et de se retrouver à Sète avec mon ami Philippe Lopez à L'Aïoli pour un repas plantureux et chez lui avec Mimie pour une Paëlla d'anthologie !

C'est aussi quelques bons livres aux matins blêmes, des films dans un excellent cinéma "le Comedia" à la programmation d'une richesse incroyable, de bader le long des canaux de cette ville de Sète fascinante que chantait Brassens et qui voit affluer des milliers de touristes par vagues permanentes à la recherche d'une nouvelle jeunesse !

Alors, une cure à Balaruc, pourquoi pas ?

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Les Muvrini pour toujours !

Publié le par Bernard Oheix

Les muvrini, les mouflons corses, entre la tradition et la modernité. Je les avais découverts en concert, au tout début de leur carrière, sur une plage de Moriani, en face de Bastia, au début des années 80, dans des polyphonies subjuguantes qui m'avaient emporté dans l'univers des musiques du monde, sur les rives d'un chant ancestral où la voix porte les sons en ouvrant les portes de l'inconnu !

Depuis un demi-siècle, ils ont affronté des scènes innombrables, un public acquis à la cause d'un chant universel et diffusé un message de paix et d'harmonie dans un monde se convulsant et plongeant dans la violence de l'intolérance.

Ils sont un mythe et les mythes sont faits pour perdurer. Ils sont des immortels qui ont marqué l'histoire d'une île et d'un peuple, sous la conduite de Jean-François et Alain Bernardini, les frères emblématiques d'une corse magnifiée !

Et j'ai eu l'incroyable privilège des les programmer 3 fois dans mes saisons culturelles cannoises et d'assister à une dizaine de leurs concerts... 

Les Muvrini pour toujours !

C'est dans un Palais des Festivals comble, programmés par Sophie Dupont, la Directrice des Évènements, qu'ils sont venus pour une tournée ambitieuse, 9 musiciens sur scène et une cohorte de techniciens réglant le son et la lumière, un merchandising où leurs CD, posters, photos s'arrachent à la volée. 

Jean-François Bernardini entre dans le noir et sa voix chaude transmet d'entrée un message d'amitié... l'émotion sera au rendez-vous en ce dimanche 7 avril 2024 ou corses et non-corses vont communier dans une ferveur portée par des musiciens remarquables. Les voix des chanteurs avec Alain Bernardini en chef de choeur, un clavier et une batterie, discrets mais omniprésents, un guitariste qui fait chanter les cordes, un bassiste black remarquable, un poly-instrumentiste, cornemuse, flûtes et autres, et enfin, une violoncelliste pour accorder tous ces musiciens et donner un glissando qui fait penser au souffle du vent dans les collines de la Castagniccia.

Un son puissant, des lumières sophistiquées, une mise en scène sans fausses notes, donnent une couleur extraordinaire au concert et suspendent le temps pour 2 heures et demi de ravissement entrecoupés d'interventions spontanées du leader sur les thèmes de la non-violence, de l'amitié entre les peuples, de la folie du monde et des maffieux qui pervertissent le tempo d'un monde nouveau.

Il improvisera aussi avec humour sur la corse, ses rites et ses expressions, mais jamais ne transgressera une règle d'or : parler au nom de tous, à tous, et autoriser le rêve d'un monde meilleur en partage !

Et c'est dans une ferveur incroyable, le public debout battant des bras et chantant avec eux, que les Muvrini achèveront leur soirée avant de rejoindre les spectateurs éblouis dans le hall de la salle pour un dernier échange d'amitié et de partage.

Un concert qui fait date et une corse que l'on ne peut qu'aimer : merci à vous de vous être livrés avec votre naturel et votre sensibilité. 

Pace e salute !

Les Muvrini, ou le bonheur de se sentir vivant et de traverser le temps en cherchant toujours à être sincère et à innover !

Les Muvrini, ou le bonheur de se sentir vivant et de traverser le temps en cherchant toujours à être sincère et à innover !

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Le Système Castafiore : clap de fin !

Publié le par Bernard Oheix

Depuis 40 ans, le Système Castafiore offre une vision décalée de la danse en utilisant une panoplie d'arts connexes : les costumes, les formes imaginaires, une bande son travaillée, des propos incongrues, des mouvements piochés dans un imaginaire débordant.

Marcia Barcellos et Karl Biscuit se sont rencontrés pour la vie et pour la création, et j'ai eu le privilège, au long de ces 26 pièces de les accompagner, de suivre l'évolution de leurs travaux, de communier avec eux et une troupe soudée par un idéal.

Leurs pièces sont des cris, de désespoir souvent, d'humour toujours et portent l'espoir d'un monde nouveau. C'est un honneur pour moi d'être leur ami et c'est avec nostalgie que je me suis présenté le vendredi 15 mars au Théâtre de Grasse, ville de leur résidence depuis 1997, pour la première de leur dernière création. Un évènement qui ne pouvait laisser insensible ceux qui aiment la vie dans le spectacle ou le spectacle de la vie !

Le Système Castafiore : clap de fin !

Dans Post-Card, le duo de créateurs plonge dans les abysses de leur propre histoire en offrant un panorama serti de bijoux tirés de leurs nombreuses créations. C'est un flash-back étonnant, retrouver des sensations enfouies, faire resurgir des images, des mots, des gestes que nous avions tapis dans notre inconscient. Mais l'art des Castafiore c'est de faire du neuf, même avec du vieux, et la proposition initiale ne s'enferme jamais dans la nostalgie, bien au contraire, elle se sublime et offre en deux fois une heure, une véritable création jonglant avec des bribes de leur passé.

Un bouquet final à couper le souffle, pour un dernier cri d'amour à cette scène qui leur offrait la possibilité de rencontrer un public et de nouer avec lui, un lien passionné et passionnant !

Le 1er acte est à dominante sombre, les animaux fantasmés de leur imaginaire peuplent l'espace scénique et les danseurs évoluent sur le fil, entre le non-sens et la beauté d'un geste, dans un dispositif technique sublimé et une musique éthérée. 

Le 2ème acte sera plus coloré, des mots et des phrases sentencieuses permettant des chorégraphies plurielles où l'absurde s'installe comme pour dénoncer la vanité de ceux qui pensent trop à un monde ordonné dans notre univers déréglé.

Alors oui, Le Système Castafiore peut se retirer sous un tonnerre d'applaudissements, avec la satisfaction du devoir accompli dans un ultime opus bien nécessaire pour la compréhension de la vastitude de leur travaux s'étalant sur 4 décennies.

Mais une question se pose, qui pourra reprendre le flambeau de cette flamboyance, qui pour perpétuer cette recherche si précise d'un geste décalé, d'un monde a créé, d'un univers à nul autre pareil ? 

Le Système Castafiore : clap de fin !

Alors Marcia et Karl, merci pour ce privilège que j'ai eu de partager un peu de votre vie, de vos passions et de votre profonde sincérité. Vous avez porté le flambeau de la danse et d'un art à la Française dans des tournées qui vous ont menées aux quatre coins du monde mais vous n'avez jamais oublié d'être vous-mêmes, à nul autres pareils, mais toujours si proches de vos racines et de vos passions.

À bientôt donc, pour de nouvelles aventures, dans ce monde qui souffre et où la culture semble bien négligée par tant d'irresponsables ! Bravo à la Ville de Grasse qui vous a toujours soutenu et vive le geste libéré dont vous étiez l'incarnation et qu'il faudra chercher et trouver désormais chez d'autres créateurs !

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souvenirs, souvenirs !

Publié le par Bernard Oheix

Plongée dans quelques souvenirs d'un temps passé mais si présent ! Suite à mon intervention à la bibliothèque Nucéra de Nice sur La Métisse du Peuple des Épines, j'ai cherché un certain nombre de documents pour illustrer ma conférence et au hasard de cette démarche, des photos, des textes ont émergé de ma mémoire et de mon ordinateur...

Cela m'a donné l'envie de partager avec vous quelques uns de ces souvenirs, comme en rappel d'un temps béni pour la culture, cette période des années 90 où tout semblait possible, où les grands anciens poussaient encore leurs dernières notes, où le rêve pouvait se conjuguer au présent, où la gloire n'était pas un morceau d'un réseau social mais bien une démarche ou l'artiste s'exposait aux yeux de tous et partageait le verre de l'amitié avec ses interlocuteurs. 

Voici donc quelques pages de mon album souvenir !

L'homme de La Messe pour le Temps Présent, celui qui a révolutionné une certaine approche de la danse moderne en la vulgarisant auprès du grand public. Ma première rencontre avec cet homme de légende se passait en Avignon en 1969, l'année de mon bac, quand en arrivant pour le festival, je lus sur la route cette immense inscription : "Béjart fait la pute sur le trottoir de la contestation". Des belges, qui dormaient à la belle étoile sur la Bartelasse, à côté de mon sac de couchage, m'emmenèrent dans le palais des papes pour "À la recherche de..." avec Jorge Donn et Maria Casarès ! Le choc ! Et c'est bien longtemps après que j'ai pu l'accueillir à Cannes et siroter un verre en compagnie d'un de mes maitres !

L'homme de La Messe pour le Temps Présent, celui qui a révolutionné une certaine approche de la danse moderne en la vulgarisant auprès du grand public. Ma première rencontre avec cet homme de légende se passait en Avignon en 1969, l'année de mon bac, quand en arrivant pour le festival, je lus sur la route cette immense inscription : "Béjart fait la pute sur le trottoir de la contestation". Des belges, qui dormaient à la belle étoile sur la Bartelasse, à côté de mon sac de couchage, m'emmenèrent dans le palais des papes pour "À la recherche de..." avec Jorge Donn et Maria Casarès ! Le choc ! Et c'est bien longtemps après que j'ai pu l'accueillir à Cannes et siroter un verre en compagnie d'un de mes maitres !

Un des plus beaux coup de ma carrière de programmateur ! Tricarde car alcoolique et annulant ses concerts, je la contacte par un ami américain qui la connaissait. Je déjeune avec elle dans un hôtel de St Jean Cap Ferrat et nous topons pour un comme back à Cannes ! Le concert sera sublime et elle renaitra de ses cendres en redevenant l'éternelle Lizza. Il y avait une vraie émotion quand je l'accompagnais en la soutenant avant l'entrée en scène. Mais quand la lumière jaillit elle redevint cette femme éternelle d'une scène qui la transportait !

Un des plus beaux coup de ma carrière de programmateur ! Tricarde car alcoolique et annulant ses concerts, je la contacte par un ami américain qui la connaissait. Je déjeune avec elle dans un hôtel de St Jean Cap Ferrat et nous topons pour un comme back à Cannes ! Le concert sera sublime et elle renaitra de ses cendres en redevenant l'éternelle Lizza. Il y avait une vraie émotion quand je l'accompagnais en la soutenant avant l'entrée en scène. Mais quand la lumière jaillit elle redevint cette femme éternelle d'une scène qui la transportait !

Une exposition de photos de Chiara Samughéo, sa présence pour le vernissage, une suite de rendez-vous, de coups de téléphone, comme celui d'une finale France-Italie en foot que nous avions remportée et mon coup de fil "-On a gagné Claudia !" auquel elle répondit par un "-mais non, on a perdu !".  Tant d'autres moments comme ce repas au Majestic à l'ouverture du Festival du Film avec Chiara et son "-dire qu'il m'avait demandé de faire la montée des marches avec un collier Choppard. Mais je suis tellement mieux avec vous !". Sous le sceau d'une amitié, le plaisir de se retrouver. Claudia, une de mes muses qui m'a offert le plaisir d'être à ses côtés par choix, et tant d'anecdotes qui remontent quand je pense à elle ! Claudia for ever !

Une exposition de photos de Chiara Samughéo, sa présence pour le vernissage, une suite de rendez-vous, de coups de téléphone, comme celui d'une finale France-Italie en foot que nous avions remportée et mon coup de fil "-On a gagné Claudia !" auquel elle répondit par un "-mais non, on a perdu !". Tant d'autres moments comme ce repas au Majestic à l'ouverture du Festival du Film avec Chiara et son "-dire qu'il m'avait demandé de faire la montée des marches avec un collier Choppard. Mais je suis tellement mieux avec vous !". Sous le sceau d'une amitié, le plaisir de se retrouver. Claudia, une de mes muses qui m'a offert le plaisir d'être à ses côtés par choix, et tant d'anecdotes qui remontent quand je pense à elle ! Claudia for ever !

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Rencontre à Nice autour de La Métisse !

Publié le par Bernard Oheix

Pascal Albertini, un vieux complice de mon fils, un des responsables de la bibliothèque Nucéra de Nice, m'a invité ce vendredi 1er mars, à une rencontre à l'auditorium avec le public afin de présenter La Métisse du Peuple des Épines.

Exercice complexe, quelques nuits tourmentées en écho de la peur d'une salle vide, à une prestation sur un objet si précieux à mes yeux à faire partager, avec l'ombre de Talike, la métisse sur mon épaule, elle qui vit dans cet île mystère comme un choix d'assumer son clan et sa fratrie.

Bonne nouvelle, 35 personnes pénétrant dans la salle sur la musique de Tiharea, quelques têtes connues émergeant de mon passé, de vieux complices heureux de me retrouver

 

Avant la tourmente, le temps suspend son vol !

Avant la tourmente, le temps suspend son vol !

Talike, sa voix chaude comme un baume sur la douleur d'un monde imparfait !

Talike, sa voix chaude comme un baume sur la douleur d'un monde imparfait !

Mon complice Gilles Ferretti, le technicien de la salle si efficace et si attentionné, m'aura permis de jongler avec la technique, entre la musique, les images et la présentation du livre. Que dire si ce n'est que j'avais l'impression de communier avec mon passé, avec le présent de Talike, avec le désir que mes mots trouvent la lumière dans le regard des autres !

Alors, je ne sais si l'entreprise fut une réussite, mais je suis persuadé que l'annonce probable d'une tournée de Talike en Europe aura touché le public subjugué par la voix d'une chanteuse hors norme !

Je tiens donc à remercier tous ceux qui m'ont aidé à me lancer dans cette aventure de l'édition de La Métisse du peuple des épines : Myriam Zemour et Jean-Marie Martinez mes correcteurs complices, Éric Dervaux, le photographe et l'ami de tous les jours, mon éditeur, Frédéric Ovadia et son assistante Laurence Berlioz qui a suivi mes errements avec professionnalisme et amitié, l'équipe de la Bibliothèque Nucéra dont Pascal Albertini et Gilles Ferretti sont la preuve que l'amitié et le courage existent encore dans la relation entre les individus. 

Et si dans l'écoute et l'attention de ceux qui étaient présents, quelques mots, quelques chants résonnent encore, alors je n'aurai pas écrit ce livre pour rien. Merci à vous les Fédérica, Georges, Anna, Alain et et Désirée qui par votre présence, calmez les tempêtes qui agitent les affres de la création !

Rencontre à Nice autour de La Métisse !

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Nouvelles de mes nouvelles !

Publié le par Bernard Oheix

Au fil des années et des images insoutenables d'une humanité en souffrance, j'ai accumulé une série de nouvelles dont j'envisage la prochaine édition chez mon éditeur Ovadia.

Vous avez pu découvrir Ali est né dans le précédent article et je vous livre le préambule de ces 16 récits qui véhiculent le regard désorienté de celui qui cherche un peu de vérité dans la cruauté des hommes et la barbarie d'un monde qui perd son sens dans la fureur des drames qui le consument !

Bon courage !

 

Dans le domaine de l’horreur, la réalité dépasse largement la fiction et rien ne peut décrire la vraie douleur de quelqu’un qui souffre dans sa chair, dans son esprit. Les mots sont impuissants, les phrases inutiles, il ne reste que ce déchirement profond de l’être meurtri, cet impossible partage d’une souffrance indicible. Vous pouvez essayer de reproduire avec ce maigre alphabet les cris intérieurs, ils seront toujours assourdis, si loin de la crudité d’un hurlement qui doit jaillir en réponse au mal qui ronge.

Quand l’on regarde les actualités télévisées, quand on parcourt les feuilles d’un journal, plonge dans les reportages d’un magazine, on est appelé à croiser nos regards, nos pensées avec des évènements qui, chacun, représente une somme de douleurs et de drames incommensurables comme aucun scénariste, aucune fiction ne pourrait les rendre.  Quoi de plus odieux que la situation au Darfour avec ses populations exterminées, ses enfants violés, cette faim qui dévore une partie de notre humanité ? Quoi de plus intolérable que ces femmes toujours voilées de l’Afghanistan, cette déforestation de l’Amazonie, la situation au proche orient, la haine du juif et de l’arabe, les ravages du sida en Afrique, le commerce de la chair en Thaïlande, le corps décharné d’un homme rongé par la drogue, le ventre vide et si gros d’un enfant au bord d’une route sans destination ?

Et pour tenter de comprendre ma démarche, établir un lien entre le regard apeuré d’un enfant au moment du sacrifice et celui de son bourreau, fait-il de vous un propagandiste de ce drame ? Que peut-on découvrir derrière les prunelles exorbitées de l’auteur de cette sauvagerie barbaresque qui ne peut contrôler ses pulsions morbides et souffle sur les braises du cauchemar ? Existe-t-il un châtiment à la mesure de l’horreur accomplie ? Un million de victimes sous les yeux des occidentaux dans la région des grands lacs africains ont-ils valeur de symbole pour des sociétés repues dans leur conformisme et dans la paix illusoire de leurs frontières ?

 

Dans toutes ces histoires, dans les emballements de ces élans mortifères, il y a toujours en point commun la décapitation des élites intellectuelles et des artistes pour des raisons aussi contradictoires que le pouvoir absolu, la domination de la matière sur l’esprit, le refus d’ouvrir une porte sur l’avenir par les gardiens qui en possèdent les clefs. Tous ceux dont les cris peuvent devenir audibles deviennent suspects, tous ceux dont l’écho peut transformer la souffrance en actes et la dévoiler aux yeux du monde sont des dangers pour les maîtres de l’horreur qui campent sur ces ruines gorgées de douleurs.

Derrière le masque de la religion qui autorise toutes les vilenies, derrière les potentats nationaux, locaux, les caïds de quartiers, il y a toujours le goût du pouvoir, les intérêts privés, la raison de la force sur la force de la raison, histoire éternelle où le plus démuni est toujours la victime. C’est ainsi que se construit le monde, que s’érige l’histoire de demain, dans la frénésie des passions exacerbées !

Ce mal ne touche pas seulement le tiers monde, les pays de la faim, l’obscurantisme des sans espoirs, il gangrène les riches qui entretiennent cette pauvreté, il corrompt les nations arc-boutées sur leur sang, leur race, leur histoire falsifiée, leurs légendes frelatées de héros inutiles. Brecht déclarait : « Bienheureux les pays qui n’ont pas besoin de héros », il se trompait, il n’y a pas de pays heureux, il n’y pas de société « humaine », juste une gigantesque arène où la partition de la mort est la seule conduite que nous avons trouvée pour aller vers le futur en boitillant, cahin-caha, éclopés de la vie, perclus des drames que nous refusons de voir et d’entendre, parmi les millions de morts et de bouches avides qui appellent au secours désespérément sans que jamais on les entende.

Que reste-t-il de ces drames si réels ? Quelques photos jaunies par le temps toujours chassées par d’autres documents encore plus cruels, l’horreur n’ayant pas de frontières et reculant les limites de l’indicible, de l’inaudible ! Le sentiment confus d’un marasme avec en revers cette capacité de fermer les yeux, de clore nos oreilles, de fermer nos bouches afin de ne pas désespérer de nous-mêmes et de continuer à vivre malgré la cacophonie ambiante dans l’atonie la plus totale.

Il n’y peut-être rien à faire. Nous avons accepté la dérégulation sauvage pour une rentabilité à court terme et l’exploitation des plus faibles au profit des nantis, nous nous aidons d’une religion comme une béquille qui nous garantirait la vie éternelle en rémission d’une vie de souffrance, nous acclamons les forts et les portons au pouvoir en démissionnant de notre droit de contrôle, blanc-seing dont ils usent largement devant notre apathie, nous abandonnons notre planète à nos déchets,  faisons mourir nos rêves parce qu’il est plus facile de se laisser porter par les flots tumultueux de nos faiblesses que de se battre pour une liberté qui ne serait pas seulement la nôtre, mais un bien de partage, un trésor commun qui impliquerait une vigilance de tous les instants. Il y a si peu d’humanité en l’homme que l’on peut désespérer de lui.

Alors que faire ? Le temps des révolutions est bien terminé, elles ont si peu accouché d’un monde meilleur que l’on peut légitimement s’interroger sur leur utilité. Fermer les yeux et rejoindre la grande masse de ceux qui privilégient l’illusion d’un confort parce qu’ils sont nés du bon côté de la frontière et ne veulent pas sentir la colère gronder dans le ventre de ceux qui n’ont rien ? Léguer à nos enfants un monde où le cancer de l’égoïsme se développe, tenter de vivre tout simplement ? Savoir que l’on a si peu de place et d’importance qu’il n’est nul besoin de revendiquer d’exister et de trouver un sens à sa vie pour aspirer au bonheur.

 

Peut-être un peu de tout cela ! Etre capable de dire non, de pleurer devant la souffrance des autres, de s’émouvoir et de rêver, de rire et de respecter. C’est par les mots que je veux lutter, en dessinant les contours d’un univers incomplet, en mettant en exergue les plaies de notre tissu social, les déchirures de nos rapports à l’autre, en décrivant la souffrance de la victime tout en tentant de saisir les revers cachés de celui qui commet l’irréparable, en riant de ne pas me prendre au sérieux tout en offrant la description de quelques moments d’inhumanité à la sagacité du lecteur qui me suit dans le parcours erratique de ces troubles si inhumains. Puisse-t-il partager un soupçon d’émotion et panser quelques plaies, puisse-t-il offrir un peu de réconfort à ceux qui en sont trop démunis.

Si le stylo était une arme, il pourrait venger bien des humiliés, si l’esprit primait sur la matière les larmes se fondraient en un océan de douceurs, si le soleil se décidait à briller pour tout le monde, les exclus se retrouveraient exposés à ses caresses. Les mots restent des mots, les idées des idées, mais la douleur est tangible, les blessures saignent et nous avons si peu de temps pour apprendre à grandir et aimer.

Voilà donc un chapelet de nouvelles qui ont pour but de vous étonner, de vous émouvoir, parfois de vous entraîner sur les rives escarpées de l’horreur au quotidien. Partageons-les comme le pain qui accueille ceux qui ont faim à l’issue d’une grande traversée du désert. Rappelez-vous, ce ne sont que des mots, des lettres de papier, des signes tracés sur une feuille blanche. Mais derrière ces mots, on trouve une réalité que même les phrases les plus sincères ne peuvent pas décrire : celle de millions et de millions d’êtres humains qui souffrent dans leur chair et dont les rêves sont bornés par l’ignominie de leurs frères.

De l’écrivain qui compose une partition définitive destinée à venger son talent méconnu au cerveau torturé d’un bourreau exécutant les victimes innocentes d’un génocide, d’un sniper se complaisant dans la brutalité et jouissant de la torture à une naissance en accéléré au bout d’un cordon qui s’avèrera comme un film en raccourci d’une vie incomplète, d’une malle bourrée de chefs-d’œuvre inconnus aux yeux d’une proie terrienne dans un café galactique, de Betty, hantée par les camps de la mort à cet enfant de la guerre à la recherche d’un ennemi fantôme, de tous ces personnages, il ne restera sans doute que l’amertume d’un monde à construire pour que vivent les hommes et qu’ils apprennent à se regarder comme des êtres humains, se détachant de ces liens tragiques qui les réunissent et sont le dénominateur commun de leur incapacité de vivre en harmonie.

 

Bonne lecture.

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Ali est né (La suite) !

Publié le par Bernard Oheix

-Qu’est-ce que je peux faire ?

-Qu’est-ce que je peux faire ?

-Tu sais pour l’infirmier qui m’a violée le mois dernier dans sa voiture, quand il m’a sodomisée, figure-toi qu’il a introduit un rat dans mon anus et depuis Nestor remonte petit à petit dans ma colonne vertébrale pour me dévorer le cerveau…

-Nestor ?

-Ben oui, le rat ! C’est ainsi que je l’appelle, tu ne trouves pas que c’est mignon pour un monstre qui me dévore le bulbe rachidien.

-Mais que veux-tu que je fasse pour te soulager ?

-Simple, il faudrait que tu introduises ta main dans mon cul et que tu t’enfonces pour l’attraper. Je suis sûre de mon coup, quand il verra tes doigts s’agiter, il va se jeter dessus et les mordre. Tu n’auras plus qu’à retirer le bras et il sera piégé. Je le mettrai dans une cage et il regrettera d’être venu au monde, par contre il faut que tu penses à me faire jouir quand tu seras en moi, et après, il faudra bien se laver les mains. Tu peux le faire pour moi, dis ?

Je ne savais si j’en avais vraiment envie. J’hésitais en soupesant le pour et le contre quand Sophie, la grande Sophie est arrivée. Cela faisait trois ans qu’elle était muette. Un matin pendant la réunion, elle s’était dressée et avait déclaré qu’elle refuserait désormais de s’exprimer. C’était son auto-stoppeur, celui qu’elle avait chargé sur la nationale 7 et qui l’avait violée pour s’installer dans sa tête qui la commandait et elle en avait vraiment marre d’entendre ses mots dans sa propre bouche. Tout ce qu’elle disait provenait de lui, et le seul moyen de le faire taire était de la fermer définitivement. « -Je me révolte désormais, il pourra guider mes gestes, j’en suis désolée, il est odieux, mais au moins mes pensées seront miennes. » Elle s’était rassise et depuis on n’avait plus entendu le son de sa voix. Cela ne l’empêchait pas de vivre avec le groupe, c’était juste un peu plus compliqué pour communiquer avec elle.

 Elle a croisé son index et son majeur pour signifier qu’elle voulait une cigarette. Nadia lui en a tendu une et elle l’a enfournée, la mastiquant avec délectation. Elle a déglutit son tabac et craché quelques brins puis est rentrée se vautrer devant le téléviseur pour fermer les yeux.

C’était une journée vraiment compliquée et les choses ne se sont pas arrangées avec Micheline qui a déboulé de la maison en montrant le ciel. Elle  s’est mise à hurler : -Regardez, venez voir, y a  des bites qui volent de partout. Elles arrivent tôt cette saison ! Faites attention, elles vont se mettre à pisser !

Je n’y croyais pas une seconde bien sûr, mais j’ai quand même enfilé mon bonnet, on ne savait jamais trop avec les bites volantes !

-Ecoute, Nadia, tu devrais plutôt envoyer Ali pour piéger ton rat.

-Mais je peux pas, tu me l’as pas encore fait, ou alors viens derrière la porte, je te suce un peu et avec de la chance j’aurai mon bébé, mon petit Ali.

Je n’avais vraiment pas envie d’une pipe à cette heure, d’autant plus qu’un nouvel arrivant avec une barbe longue jusqu’à la taille se pointait à l’horizon. C’est Thérèse qui l’a accueilli, normal, elle était la cheftaine, et ça, elle savait vraiment le faire, toujours avec son air de bonne sœur à nous dire ce qui était bien et ce qui l’était pas ! Elle répondait à nos questions invariablement par une autre question ce qui fait que les débats s’éternisaient avec elle et que l’on oubliait la première interrogation et que l’on ne savait jamais où l’on allait aboutir quand on tentait de la suivre dans les méandres compliqués de son raisonnement. C’était frustrant et le nouvel arrivant allait découvrir un interrogatoire façon Thérèse.

-Mais vous sortez d’où, vous ?

-Mais d’une autre planète, bien sûr.

-Et qu’est-ce que vous faites ?

-Je suis un moine et je viens vous évangéliser.

-Votre nom ?

-Diomède, le castrateur.

J’ai bien vu Thérèse lever les yeux au ciel, elle n’y croyait pas une seconde. Lui manifestement représentait une bonne source de dialogue. Elle aurait du travail notre cheftaine. Tant mieux, qu’elle comprenne que tout n’était pas si drôle dans notre univers. Et puis il allait falloir lui passer un bon savon car manifestement il avait oublié la fonction de l’eau et la crasse le recouvrait d’une pellicule épaisse. Moi ce qui m’attirait c’était ses ongles, des griffes recourbées d’au moins six centimètres qui lui donnaient l’air d’un oiseau de proie. Je lui aurais bien proposé de les extraire mais je ne le connaissais pas encore suffisamment. De toutes les façons, on avait le temps, il était là pour un bon moment vu sa tronche d’ahuri.

Nadia m’a regardé. Elle attendait ma décision. C’est fou ce qu’elle m’aimait. Pourquoi pas après tout ! Un petit coup vite fait, une bonne giclée et elle me lâcherait la grappe et retournerait à ses fantasmes. On est rentré et Mickey pérorait comme d’habitude. Il inventait un système d’antivol à base de résistance électrique et d’ammoniaque. Il en avait marre d’être potentiellement la victime d’un malandrin et se préparait activement à cette confrontation. Il fallait surveiller toutes les bouteilles de détergents pour être sûr de survivre. Avec lui, on n’était jamais vraiment sûr que ses expériences ne nous mèneraient pas à faire sauter la baraque avec tous ceux qui y vivaient. Je l’ai contourné avec précaution, il était vraiment trop imprévisible.

Je me suis dirigé vers le grand placard des jeux, il y en avait plein à notre disposition et je me disais qu’une petite partie de trivial-poursuite serait la bienvenue. J’allais bien trouver deux où trois joueurs disposés à se faire battre. J’avais appris toutes les réponses par cœur. J’ai ouvert la porte et j’ai vu Shiaman recroquevillée près des balais, les yeux grands ouverts. C’était ma préférée, une petite brunette qui souriait toujours et ne s’énervait jamais.

-Mais qu’est-ce que tu fais donc là ?

-C’est l’ascenseur, il est bloqué, je l’attends depuis tout à l’heure.

-Bon, ne t’inquiète pas, je vais faire appeler le réparateur.

Bien sûr, je n’en ai rien fait, je savais qu’il n’y avait pas d’ascenseur dans ce placard. L’heure du repas s’annonçait. Ils nous livraient la bouffe dans des grandes marmites de la cuisine centrale. Comme elle était loin et qu’il y avait un trafic intense, cela arrivait toujours un peu froid, mais ce n’est qu’une habitude à prendre.

Jean-Marc demanda s’il y avait de la purée. Faut dire qu’avec les cinq dents qu’il lui restait, la mastication n’était pas chose aisée. Je lui avais demandé pourquoi il s’obstinait à se faire sauter une dent pas jour, mais il m’avait répondu que c’était un secret et que s’il le disait à moi ou à un autre, il les perdrait toutes. Il n’en avait plus pour longtemps avant de pouvoir tout nous dire. Sa technique se sophistiquait. Au début, il se cognait la mâchoire contre le lavabo mais les inconvénients étaient nombreux. Il n’arrivait pas à bien viser et ne se la cassait qu’à moitié, ou même se trompait de cible. Et puis il fallait tout nettoyer après, et cela lui prenait un temps infini pendant lequel il hurlait de douleur, cela nous empêchait de travailler tranquillement, énervait les pensionnaires. Il prenait désormais son temps, un rituel bien rodé, enroulant sa mâchoire d’un tissu, il ligaturait sa dent avec un gros fil de nylon et l’accrochait à la poignée de la porte et quand l’un d’entre nous allait faire ses besoins, il entendait un crac et pouvait observer sa satisfaction, une extraction bien menée, un travail d’orfèvre qui le remplissait de fierté. Il prenait un sirop anesthésiant avant ce qui fait qu’il ne sentait même plus la douleur, cela l’attristait bien un peu, mais il avait compris que ses cris nous perturbaient.

C’était le jour du boudin et nous y avons encore eu droit. Angéla s’est levée, a rempli un broc d’eau et l’a versé sur les gros étrons qui marinaient dans la marmite. Elle ne supportait pas que l’on mange du sang mais Jean-Marc s’en foutait, il était en train de se gaver de mousseline par les espaces béants que ses cinq dents laissaient entrevoir quand il ouvrait la bouche, par contre on était plusieurs à aimer la consistance moelleuse d’un bon boudin et il a fallu égoutter le plat avant de pouvoir se servir. Tant pis, jusque-là, la journée avait été presque normale. Personne ne pouvait prévoir que Julien pète un plomb. 

Il a pris un couteau de cuisine et l’a lancé violemment sur son vis-à-vis, en l’occurrence le pauvre Christian qui n’y pouvait rien. La lame a ricoché sur son pull et a atterri à terre sous le buffet. Thérèse est intervenue avec promptitude, elle s’est interposée entre eux et a empêché que Julien, dans sa crise, ne se jette sur sa victime. Il lui hurlait au visage qu’il l’avait reconnu le traître, et que ce n’était pas besoin de se déguiser, qu’il était l’ennemi du masque de fer et qu’il le vengerait. Sa visite thérapeutique d’hier à la prison du Fort Sainte-Marguerite avait laissé des traces. Il se prenait pour le vengeur du prisonnier masqué, le fils du roi, alors que tout le monde savait parfaitement que ce n’était pas Christian qui jouait un double jeu. Lui n’y était strictement pour rien. Nous savions pertinemment que son truc c’était les photos de joueuses de tennis, toutes ses belles Kournikova, Mauresmo, Mary Pierce et autres championnes qu’il collectionnait dans des tenues affriolantes, leurs jupettes dans le vent, les jambes écartées dans l’effort pour rattraper la balle. Il ne se séparait jamais de son album et il était en train de hurler que Julien l’avait lâchement agressé parce qu’il était jaloux de ses photos et qu’il voulait lui dérober ses fiancées.

Une voiture est venue chercher un Julien désemparé. Il savait qu’il avait fauté, la violence sur les autres était prohibée, c’est une règle intangible, un principe sacro-saint qu’il ne fallait pas transgresser sous peine de retourner au centre illico. Il était penaud et tout chamboulé, il ne s’expliquait pas son geste et a embrassé Christian en l’assurant qu’il n’en voulait aucunement à ses trésors. Cela a fait un vide et Thérèse nous a réunis pour un groupe de paroles. Cela a cassé l’ambiance. Je n’avais pas du tout envie de parler et j’ai repris mon livre pour me plonger dans la phénoménologie. La page 72 était toujours au fond de ma poche et personne n’avait pu me la voler. J’ai remis la page à sa place et je me suis immergé dans mon bouquin. La lecture a vraiment du bon, j’ai pu tout oublier.

Au bout d’un moment, vu que personne ne voulait s’exprimer, elle nous a libérés et Nono est venu me demander de l’aider à enlever son casque. C’était un magnifique casque de football américain bleu avec des étoiles et le nom de l’équipe de Boston en lettres dorées. J’ai dû refuser car nous avions interdiction de lui ôter. Il faut dire qu’il se précipitait la tête la première contre les portes fermées et les murs dès qu’il en avait l’occasion. Il avait cabossé tant de parois et des cicatrices couraient sur son visage, c’est pour ça qu’on l’obligeait à le porter. Son visage était une carte routière, avec des grosses nationales, des petites départementales et même des carrefours, une plan Michelin déambulant. Il disait que quand il se regardait dans un miroir, son visage se déformait, la partie droite s’estompait et il n’avait plus que la moitié de ses cheveux comme un iroquois.

J’ai vu Nadia en train de parler avec Danièle derrière les fourrés d’aubépine du jardin, des histoires de femmes sans doute, je me suis approché pour écouter discrètement leur conversation. J’aimais beaucoup surprendre les discussions. Elle était en train de lui expliquer qu’aucun rat ne pourrait rentrer par sa minette vu qu’elle s’était ligaturée le sexe avec un fil de pêche, le matin même avant de venir au centre. Elle a soulevé sa jupe et baissé sa culotte. Elle s’était cousue les lèvres intimes et l’on voyait des gouttes de sang perler sur sa fente, le fil comprimait le bouton de son clitoris en l’entortillant, cela me rappelait une paupiette de veau dans une assiette de jus de tomates. Elles ne m’en ont pas voulu de les surprendre, bien au contraire, cela les a émoustillées et Nadia en a profité pour me demander si j’étais enfin  prêt à lui faire son enfant.

-Je réfléchis encore, on verra tout à l’heure !

Il y a eu un instant de répit, le calme plat avant la tempête. Françoise a jailli de la maison comme si elle avait le feu aux fesses. Elle était encore débraillée et sortait des cabinets. Elle avait sans aucun doute vu un serpent lui rentrer dans l’intestin pendant qu’elle faisait ses besoins. Cela ne lui était plus arrivé depuis un mois et elle était manifestement terrorisée. Elle s’est arrêtée, a pointé le doigt vers le cumulus blanc qui paressait dans le ciel et s’est mise à hurler: -C’est lui, ce nuage satanique, c’est sa faute, il a réveillé les serpents du diable ! Elle s’est enfuie, elle était vraiment paniquée. J’ai averti Thérèse et nous avons formé deux groupes pour la retrouver.

Nous avons exploré les entrées des immeubles et tous les recoins. Un chien aboyait dans le quartier, cela a attiré l’attention de Nadia très sensible aux animaux. Un berger allemand qui gardait une villa manifestait sa colère et nous alertait. Il grognait et grattait le sol avec ses pattes, furieux contre l’intruse qui l’empêchait de se coucher dans sa niche. Françoise s’était glissée par l’étroite ouverture et l’on ne voyait que sa tête blonde émerger de la pimpante cabane verte et rose. Il a fallu la rassurer, lui promettre que les serpents avaient raté leur coup pour qu’elle accepte de sortir et libère la place pour le chien qui se précipita sur sa gamelle. Heureusement qu’elle ne lui avait pas mangé sa pitance.

Diomède le castrateur, avec les pans de son cache-poussière qui balayaient le sol, ne cessait de demander si c’était de lui que l’on riait quand il n’était pas là. Thérèse l’a rassuré et tout le monde a rejoint le centre pour prendre un thé ou un café avec des petits gâteaux. C’était un moment important, tous assis en rond, à récapituler les évènements de la journée avant de rejoindre nos appartements thérapeutiques. C’était le dernier de nos rendez-vous, après nous aurions la possibilité de nous retrouver chez nous et d’être libre.

Nadia s’est installée à mes côtés et a posé sa tête contre la mienne. Elle ne parlait plus mais je sentais sa respiration, elle était oppressée à l’idée de se retrouver seule. Elle espérait vraiment que je l’inviterais à m’accompagner, que nous passerions la nuit ensemble. J’en avais marre d’être homo et finalement quand la réunion s’est terminée, je lui ai pris la main et nous sommes partis. Nos pas se sont accordés et je crois que Jean-Paul était un peu jaloux, je le comprends, il l’aimait tellement.

Elle a accepté de se laver les dents pour moi et je lui ai préparé une salade de tomates et de la mozzarella. On a regardé la télévision, c’était un épisode de Colombo et on a ri en pensant à Diomède le castrateur à cause de son imperméable. Elle ne m’a plus parlé de Nestor, il avait dû s’endormir et j’en ai profité pour lui faire l’amour. C’était bon et je sais qu’elle a eu du plaisir, quand elle ne fait pas semblant d’avoir un orgasme, c’est qu’elle est vraiment contente. Elle n’a pas simulé, elle est restée les yeux grands ouverts pendant que je jouissais et nous nous sommes endormis dans les bras l’un de l’autre.

C’était vraiment une bonne journée mais je ne sais toujours pas si Ali est né.

 

PS : En hommage aux personnels qui rendent l’hôpital psychiatrique un peu plus humain et tentent  d’harmoniser le monde des cauchemars et celui de la réalité

 

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