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Festival du Film de Cannes 2023 : 4 jours, 16 films, et après ?

Publié le par Bernard Oheix

C'est reparti pour une rafale de films dans ce monde en colère où les images de la réalité sont bien plus dramatiques que celles des fictions d'un après-covid qui a laissé des traces. L'option pandémie semble trainer dans de nombreux films, comme si les certitudes d'antan vacillaient devant le spectacle de l'incertitude générée par un virus délétère.

Mais la vie doit continuer et regarder notre passé, c'est aussi construire l'avenir !

À l'évidence de ces premiers jours, deux films en compétition que l'on retrouvera dans le palmarès... si le jury est à la hauteur de sa mission ! Réponse dans une semaine !

Le premier est un chef d'oeuvre, The Zone of interest de Jonathan Glazer et fait la jonction avec mon précédent article consacré à Simone Weil, les combats d'une effrontée.

Rudolf Hoss est le commandant du camp d'Auschwitz, particulièrement apprécié pour son efficacité, sa capacité organisationnelle dans le traitement de l'extermination des juifs, sa rigueur dans la gestion des équipes de SS...

Sa femme et ses enfants ont construit un hâvre de paix sous les murs de ce camp que l'on ne verra jamais... si ce n'est quelques cheminées rougeoyantes, une litanie de cris sourds et les fumerolles de trains débarquant leurs cargaisons.

Mais une promotion va éloigner Rudolph de son lieu de vie et sa femme refuse de le suivre, s'accrochant à ce jardin fleuri, à cette paix si durement gagnéé par son mari.

C'est dans le final qu'enfin nous pourront entrevoir la réalité de l'horreur en jeu, dans un saut temporel où les vestiges d'une humanité perdue nous sautent aux yeux dans l'insoutenable tragédie d'un siècle perdu.

La construction originale, les vides d'un écran emplit des noirs desseins de la folie humaine, nous parlent au coeur et font de ce film une oeuvre majeure pour entrevoir les failles d'une humanité perdue.

Tout aussi passionnante est l'horreur moderne que dessine Les Filles d'Olfa de Kaouther Ben Hania. La plongée dans l'univers de Daesh de deux soeurs est confrontée au sort de la mère courage et des deux autres filles trop petites pour faire le grand saut. Des années après, dans un film sur le film passionnant, de la réalité à la fiction, quand les contours du jeu d'actrices affrontent le documentaire d'une vie, s'affrontent le silence des absentes aux regrets des présentes.

C'est un film sur la radicalisation de deux tunisiennes dans une après-dictature qui a libéré toutes les forces les plus néfastes de la société au service d'une religion intégriste mais dont le sourire d'une mère laisse augurer que la vie sera plus forte que la mort.

En attendant, les deux soeurs sont détenues dans un camp en Lybie et espèrent une extradition vers la Tunisie.

Reste quelques belles pépites qui font espérer... Ama Gloria de Marie Amachoukeli à la semaine de la critique (1er ou 2ème film), où les vacances d'une petite fille chez sa nounou adorée obligée de rentrer dans son pays, au Cap-Vert. Le rapport entre Cléo et Gloria rythme le tempo de ce beau film émouvant et sincère.

Dans la même catégorie, Vincent doit mourir de Stéphan Castang, où l'excellent Karim Leklou se retrouve agressé par des inconnus qui croisent sont regard à cause d'un virus (!) mystérieux. Le film est délirant et plein d'humour, un OFNI (Objet Filmique Non-Identifié) qui part dans tous les sens et nous offre quelques scènes d'anthologie sur la manière de faire l'amour sans croiser le regard de l'autre ou d'entraver sa partenaire avec des menottes sans esprit sm mais avec l'instinct de survie !

Le Retour de Catherine Corsini est un beau film loin du parfum de scandale dont il était précédé. Khédidja, une nounou (encore !) a le tort de retourner pour son travail en Corse avec ses 2 filles adolescentes Jessica et Farah. Le passé va resurgir, les haines d'antan se cristaliser, les non-dits se découvrir dans une île pas toujours tendre avec les autres. Mais la vie sera plus forte que les haines.

Et comment ne pas parler des films ratés qui auraient pu être bons, comme Los délincuestes de Rodrigo Moreno qui, sur une bonne idée, réussit à gâcher son film en l'étirant sur 2h30 et en massacrant la 2ème partie à coups de hache dans le scénario ! Tout aussi regrettable, l'explosion en plein vol de The New Boy de Warwick Thornton qui massacre ses images superbes, une Cate Blanchett sublime et une histoire qui aurait pu être passionnante en se perdant dans les tourments intérieurs d'une jeune aborigène fascinant !

Quand à Jeunesse de Wang Bing, 20mn sur les 3h de film m'auront suffit pour apprécier la qualité de la démarche sans en supporter la longueur insupportable infligé au spectateur !

Dommage !

Mais le grand cirque continue et les films de demain seront peut-être meilleurs  que ceux d'aujourd'hui, alors vite, aux écrans, dans une course contre la montre d'une horloge qui suspend son vol !

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